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625 % d’augmentation : le Maroc, nouveau grenier de l’Espagne ?
Depuis 2022, le Maroc et l’Espagne ont inauguré une nouvelle ère de coopération, marquée par une volonté commune de renforcer leurs liens économiques. Ce rapprochement s’inscrit dans un contexte géopolitique apaisé, après des tensions diplomatiques qui avaient marqué les relations entre Rabat et Madrid. Aujourd’hui, cette dynamique se traduit par une intensification des échanges commerciaux, notamment dans le secteur agricole.
L’augmentation de 625 % des importations espagnoles de céréales marocaines en 2024 illustre parfaitement cette tendance. Alors que l’Espagne, traditionnellement importatrice de céréales d’Europe de l’Est ou d’Amérique du Nord, se tourne de plus en plus vers son voisin du sud, cette évolution met en lumière l’importance croissante du Maroc comme fournisseur stratégique pour l’Europe.
Plusieurs facteurs expliquent cette hausse exceptionnelle des importations espagnoles, tel que les conditions climatiques défavorables en Europe. L’Espagne a connu une sécheresse ces dernières années, ont réduit la production locale de céréales. Face à cette situation, l’Espagne a dû diversifier ses sources d’approvisionnement pour éviter une pénurie.
Le Maroc, grâce à des politiques agricoles ambitieuses telles que le Plan Maroc Vert et sa stratégie "Génération Green 2020-2030", a su augmenter sa production de céréales malgré des défis climatiques similaires. Ces efforts, combinés à une logistique renforcée et à la proximité géographique, ont permis au Royaume de devenir un partenaire incontournable pour l’Espagne.
Cette augmentation des échanges agricoles s’inscrit dans un cadre plus large de coopération économique entre les deux pays. En 2023, l’Espagne est devenue le premier partenaire commercial du Maroc, devant la France. Les exportations marocaines vers l’Espagne ne se limitent plus aux produits agricoles, mais incluent également des biens industriels, des textiles et des produits de la mer.
Pour l’Espagne, importer davantage de céréales marocaines permet non seulement de répondre à ses besoins internes, mais aussi de renforcer ses relations avec un voisin stratégique. De son côté, le Maroc profite de cette demande accrue pour consolider son rôle de fournisseur clé, tout en diversifiant ses débouchés économiques.
Cependant, cette intensification des échanges agricoles soulève des questions sur la durabilité de cette dynamique. Le Maroc, tout comme l’Espagne, est confronté aux effets du changement climatique, notamment la sécheresse et la raréfaction des ressources en eau. Ces défis pourraient limiter la capacité du Maroc à répondre à une demande croissante, surtout si les conditions climatiques continuent de se détériorer.
Par ailleurs, la dépendance croissante de l’Espagne vis-à-vis des céréales marocaines pourrait devenir un enjeu stratégique, notamment en cas de tensions géopolitiques ou de perturbations dans les chaînes d’approvisionnement.
Ce phénomène n’est pas sans rappeler les relations agricoles entre d’autres pays voisins. Par exemple, la Turquie et l’Union européenne ont également intensifié leurs échanges agricoles ces dernières années, en réponse aux défis climatiques et économiques. De même, l’Afrique subsaharienne devient un partenaire de plus en plus important pour l’Europe dans le domaine des produits agricoles.
Cependant, la relation entre le Maroc et l’Espagne se distingue par sa proximité géographique et par l’interdépendance économique qui lie les deux nations. Cette coopération pourrait servir de modèle pour d’autres partenariats régionaux, à condition qu’elle soit gérée de manière durable.
L’augmentation de 625 % des importations espagnoles de céréales marocaines en 2024 témoigne d’une coopération bilatérale en plein essor. Si cette dynamique offre des opportunités économiques considérables pour les deux pays, elle soulève également des questions sur la durabilité à long terme de cette relation, notamment face aux défis climatiques. À court terme, ce partenariat renforce les liens entre Rabat et Madrid, mais il reste à voir comment les deux nations géreront les incertitudes liées à l’environnement et aux marchés mondiaux.



