Le Maroc se prépare à l’un des événements les plus médiatisés de la planète : la co-organisation de la Coupe du Monde 2030 aux côtés de l’Espagne et du Portugal. Si les regards se tournent vers les chantiers d’infrastructures et les enjeux logistiques, un autre défi, plus discret mais autrement plus complexe, plane sur cette ambition planétaire : le comportement civique des Marocains dans l’espace public.
L’étude du Centre Marocain pour la Citoyenneté (CMC), publiée en mai 2025, révèle une tension profonde entre l’objectif d’excellence affiché à l’international et le désordre social vécu au quotidien. Peut-on vraiment espérer une métamorphose civique grâce à un événement sportif ? Ou est-ce un mirage collectif ?
L’étude du Centre Marocain pour la Citoyenneté (CMC), publiée en mai 2025, révèle une tension profonde entre l’objectif d’excellence affiché à l’international et le désordre social vécu au quotidien. Peut-on vraiment espérer une métamorphose civique grâce à un événement sportif ? Ou est-ce un mirage collectif ?
Des attentes très mesurées… voire sceptiques
À la question “Pensez-vous que l’organisation de la Coupe du Monde 2030 renforcera les comportements civiques ?”, seuls 22,7 % des sondés répondent oui. Près de 33 % pensent que cela n’aura aucun effet, 36,7 % tablent sur un impact limité, et 7,7 % craignent même une aggravation des comportements.
Autrement dit, les Marocains ne se font guère d’illusions : pour eux, le football ne suffira pas à laver les incivilités, ni à repeindre la conscience collective. Et pour cause : un événement de courte durée, aussi prestigieux soit-il, ne peut remplacer une décennie de carences éducatives, d’impunités et de résignation collective.
Autrement dit, les Marocains ne se font guère d’illusions : pour eux, le football ne suffira pas à laver les incivilités, ni à repeindre la conscience collective. Et pour cause : un événement de courte durée, aussi prestigieux soit-il, ne peut remplacer une décennie de carences éducatives, d’impunités et de résignation collective.
Une image à défendre… mais fragile
Ce scepticisme s’appuie sur des réalités visibles : selon le rapport du CMC, les Marocains redoutent que certains comportements largement tolérés aujourd’hui ternissent l’image du pays en 2030.
Parmi les principaux risques identifiés figurent le harcèlement des femmes et des touristes (69,6 %), le non-respect des files d’attente (71,6 %), le désordre dans les stades et les transports, les pratiques abusives des taxis (73 %), l’absence de toilettes publiques dignes (73,6 %) et surtout le commerce malhonnête ainsi que les hausses de prix abusives (84,8 %).
Ces chiffres traduisent une angoisse nationale : être démasqués. Non pas pour ce que l’on est, mais pour ce que l’on a laissé faire depuis trop longtemps.
Parmi les principaux risques identifiés figurent le harcèlement des femmes et des touristes (69,6 %), le non-respect des files d’attente (71,6 %), le désordre dans les stades et les transports, les pratiques abusives des taxis (73 %), l’absence de toilettes publiques dignes (73,6 %) et surtout le commerce malhonnête ainsi que les hausses de prix abusives (84,8 %).
Ces chiffres traduisent une angoisse nationale : être démasqués. Non pas pour ce que l’on est, mais pour ce que l’on a laissé faire depuis trop longtemps.
Un “effet vitrine” risqué : le propre maquillé, le sale repoussé
Comme souvent avant un événement mondial, l’État risque d’opter pour des mesures cosmétiques : repeindre les murs, nettoyer les places, encadrer les “zones VIP”, multiplier les patrouilles. Mais ces actions relèvent du théâtre urbain plus que d’un véritable basculement culturel.
Le risque est de créer une “zone blanche” propre, ordonnée, touristique, pendant que le reste du pays continue de fonctionner selon les codes du désordre ambiant. Et c’est précisément ce double visage, carte postale et chaos, qui pourrait faire le plus de mal à l’image du Maroc.
Le risque est de créer une “zone blanche” propre, ordonnée, touristique, pendant que le reste du pays continue de fonctionner selon les codes du désordre ambiant. Et c’est précisément ce double visage, carte postale et chaos, qui pourrait faire le plus de mal à l’image du Maroc.
Et si c’était au contraire une chance unique ?
Malgré ces inquiétudes, certains y voient une opportunité historique. La Coupe du Monde peut être plus qu’un tournoi : un catalyseur. Un moment de mobilisation nationale autour de valeurs : respect, ponctualité, propreté, hospitalité, sécurité.
Le rapport du CMC appelle d’ailleurs à lancer une campagne nationale de sensibilisation sur le civisme, avec un calendrier long, un plan multisectoriel et une vraie volonté politique. Pas pour “faire bien”, mais pour “changer vraiment”.
Un tel projet aurait le mérite de rassembler citoyens, élus, enseignants, artistes, religieux, médias et associations autour d’une même ambition : reconstruire l’espace public comme un lieu commun, et non un territoire d’agression passive.
Le rapport du CMC appelle d’ailleurs à lancer une campagne nationale de sensibilisation sur le civisme, avec un calendrier long, un plan multisectoriel et une vraie volonté politique. Pas pour “faire bien”, mais pour “changer vraiment”.
Un tel projet aurait le mérite de rassembler citoyens, élus, enseignants, artistes, religieux, médias et associations autour d’une même ambition : reconstruire l’espace public comme un lieu commun, et non un territoire d’agression passive.
Le football ne fait pas le civisme, mais il peut l’inspirer
Rappelons une évidence : le football est un miroir. Il révèle les émotions, les tensions, les identités collectives. Il peut inspirer la fierté, l’unité, le respect de l’adversaire, la discipline tactique. Mais il peut aussi déchaîner la haine, le machisme, la violence, l’excès.
Tout dépend de ce que nous choisissons d’en faire. Le succès populaire des Lions de l’Atlas lors de la Coupe du Monde 2022 au Qatar avait prouvé qu’un élan national positif était possible. Mais une ferveur ne suffit pas à écrire une culture. Il faut des institutions, des symboles, des outils, et surtout… de la cohérence.
Tout dépend de ce que nous choisissons d’en faire. Le succès populaire des Lions de l’Atlas lors de la Coupe du Monde 2022 au Qatar avait prouvé qu’un élan national positif était possible. Mais une ferveur ne suffit pas à écrire une culture. Il faut des institutions, des symboles, des outils, et surtout… de la cohérence.
Trois piliers pour une transformation durable
Selon l’étude du CMC, la réussite d’une transformation civique durable repose sur trois piliers essentiels : d’abord, l’éducation, qui dès l’école doit apprendre à faire la queue, à ne pas salir et à respecter les règles, que ce soit dans la rue ou sur le terrain ; ensuite, l’exemplarité, où responsables politiques, artistes et stars du sport doivent montrer l’exemple en incarnant discipline, modestie, humilité et respect ; enfin, la sanction juste, car il ne peut y avoir de civisme sans règles ni application de celles-ci, l’impunité étant l’ennemie la plus redoutable du progrès.
Et si la Coupe du Monde 2030 était le point de départ, pas l’objectif final ?
La vraie question n’est pas “peut-on devenir civiques d’ici 2030 ?” mais “voulons-nous construire un pays où il est agréable de vivre… au-delà du Mondial ?” Le tournoi passera. Le monde repartira. Mais les Marocains resteront.
Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement l’image du pays. C’est sa qualité de vie, sa cohésion sociale, son avenir. Si la Coupe du Monde peut servir d’accélérateur, tant mieux. Mais il ne faut pas confondre levier et fin en soi.
Le civisme ne se décrète pas. Il se cultive. Il se pratique. Il se protège. Et il commence… bien avant le coup d’envoi.
Ce qui est en jeu, ce n’est pas seulement l’image du pays. C’est sa qualité de vie, sa cohésion sociale, son avenir. Si la Coupe du Monde peut servir d’accélérateur, tant mieux. Mais il ne faut pas confondre levier et fin en soi.
Le civisme ne se décrète pas. Il se cultive. Il se pratique. Il se protège. Et il commence… bien avant le coup d’envoi.
Dossier complet dans IMAG de LODJ
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