L’alternance : un financement public légitime ou un effet d’aubaine ?
En France, l’alternance est largement financée par l’État et les entreprises à travers les OPCO (Opérateurs de Compétences) et France Compétences. Les OPCO sont des organismes agréés par l’État qui collectent les contributions des entreprises au titre de la formation professionnelle et redistribuent ces fonds aux écoles et centres de formation. Ils jouent un rôle central en assurant la circulation de l’argent public et privé entre l’État, les entreprises, les écoles et les étudiants.
Ce mécanisme permet aux étudiants d’intégrer des écoles de commerce coûteuses tout en bénéficiant d’une prise en charge partielle, voire totale, des frais de scolarité.
Sur le plan social, l’alternance représente une avancée majeure pour l’égalité des chances : elle ouvre les portes de formations prestigieuses à des profils qui n’auraient pas les moyens de payer 15 000 euros par an. Elle favorise aussi l’insertion professionnelle et réduit le chômage des jeunes diplômés.
Mais la critique n’est pas absente. Certains dénoncent un effet d’aubaine : les fonds publics profiteraient à des institutions privées déjà riches en ressources, au détriment des universités publiques qui peinent à financer leurs laboratoires et leurs infrastructures. En clair, l’État soutient indirectement la compétitivité internationale d’écoles privées qui fonctionnent comme de véritables entreprises éducatives.
Ce mécanisme permet aux étudiants d’intégrer des écoles de commerce coûteuses tout en bénéficiant d’une prise en charge partielle, voire totale, des frais de scolarité.
Sur le plan social, l’alternance représente une avancée majeure pour l’égalité des chances : elle ouvre les portes de formations prestigieuses à des profils qui n’auraient pas les moyens de payer 15 000 euros par an. Elle favorise aussi l’insertion professionnelle et réduit le chômage des jeunes diplômés.
Mais la critique n’est pas absente. Certains dénoncent un effet d’aubaine : les fonds publics profiteraient à des institutions privées déjà riches en ressources, au détriment des universités publiques qui peinent à financer leurs laboratoires et leurs infrastructures. En clair, l’État soutient indirectement la compétitivité internationale d’écoles privées qui fonctionnent comme de véritables entreprises éducatives.
Les professeurs étrangers : l’internationalisation à tout prix ?
Le deuxième débat touche au recrutement de professeurs étrangers, principalement anglo-saxons. La logique est claire : pour apparaître dans les classements du Financial Times ou de QS Ranking, il faut publier dans des revues internationales anglophones, et afficher un corps professoral international.
Les écoles de commerce françaises investissent donc massivement dans le recrutement de chercheurs étrangers, souvent très qualifiés pour publier dans des revues classées (ABS, FT50, CNRS). Ce choix renforce la visibilité mondiale des écoles et attire des étudiants internationaux, ce qui consolide leur modèle économique.
Cependant, cette stratégie pose question :
- Elle tend à privilégier la publication scientifique sur la pédagogie et l’investissement auprès des étudiants ;
- Elle contribue à une dépendance aux standards académiques anglo-saxons, au détriment de la valorisation des savoirs locaux ;
- Elle fragilise la francophonie académique et économique, en marginalisant la production scientifique en français et en reléguant la langue française à un rôle secondaire dans un espace éducatif qui, historiquement, contribuait à son rayonnement ;
- Surtout, nombre de ces enseignants étrangers ont un profil purement académique : ils connaissent parfaitement les normes de publication scientifique, mais ni le tissu économique français, ni les spécificités du management des entreprises locales, ni encore moins l’environnement économique régional de l’école qui les recrute. Leur apport académique est réel pour les classements, mais leur valeur ajoutée en termes de compréhension du marché français ou d’accompagnement des entreprises régionales reste limitée.
Les écoles de commerce françaises investissent donc massivement dans le recrutement de chercheurs étrangers, souvent très qualifiés pour publier dans des revues classées (ABS, FT50, CNRS). Ce choix renforce la visibilité mondiale des écoles et attire des étudiants internationaux, ce qui consolide leur modèle économique.
Cependant, cette stratégie pose question :
- Elle tend à privilégier la publication scientifique sur la pédagogie et l’investissement auprès des étudiants ;
- Elle contribue à une dépendance aux standards académiques anglo-saxons, au détriment de la valorisation des savoirs locaux ;
- Elle fragilise la francophonie académique et économique, en marginalisant la production scientifique en français et en reléguant la langue française à un rôle secondaire dans un espace éducatif qui, historiquement, contribuait à son rayonnement ;
- Surtout, nombre de ces enseignants étrangers ont un profil purement académique : ils connaissent parfaitement les normes de publication scientifique, mais ni le tissu économique français, ni les spécificités du management des entreprises locales, ni encore moins l’environnement économique régional de l’école qui les recrute. Leur apport académique est réel pour les classements, mais leur valeur ajoutée en termes de compréhension du marché français ou d’accompagnement des entreprises régionales reste limitée.
Et le Maroc dans tout cela ?
Au Maroc, la situation est différente et met en évidence un autre problème structurel :
- Le financement public par l’alternance est quasi inexistant. Les écoles privées dépendent essentiellement des frais de scolarité élevés, ce qui accentue les inégalités sociales d’accès.
- Le corps professoral repose principalement sur des vacataires, souvent des enseignants issus des universités publiques, qui viennent compléter leurs revenus. Cette pratique fragilise la stabilité pédagogique et limite la capacité des écoles à construire une identité académique forte.
- Enfin, la recherche scientifique est quasiment absente des écoles de commerce marocaines. Elles assurent un rôle de formation, mais très peu de production de savoir. Or, sans recherche, il devient difficile de rivaliser sur le plan international, et encore plus de nourrir un discours académique proprement marocain dans le champ du management.
- Le financement public par l’alternance est quasi inexistant. Les écoles privées dépendent essentiellement des frais de scolarité élevés, ce qui accentue les inégalités sociales d’accès.
- Le corps professoral repose principalement sur des vacataires, souvent des enseignants issus des universités publiques, qui viennent compléter leurs revenus. Cette pratique fragilise la stabilité pédagogique et limite la capacité des écoles à construire une identité académique forte.
- Enfin, la recherche scientifique est quasiment absente des écoles de commerce marocaines. Elles assurent un rôle de formation, mais très peu de production de savoir. Or, sans recherche, il devient difficile de rivaliser sur le plan international, et encore plus de nourrir un discours académique proprement marocain dans le champ du management.
La progression française dans les classements internationaux
La politique de financement par l’alternance, combinée à une stratégie d’internationalisation et de recherche, a contribué à une nette progression des écoles françaises de commerce dans les classements du Financial Times au cours de la dernière décennie.
- Master in Management (MiM) 2024 : six écoles françaises figurent dans le Top 10 mondial, dont HEC (2e), INSEAD (3e), ainsi que ESSEC, ESCP, EDHEC et EM Lyon. L’EM Lyon, par exemple, est passée de la 21e place en 2021 à la 8e place en 2024.
- Masters in Finance 2025 : domination française avec 4 écoles dans le Top 5 mondial : ESCP (1er), SKEMA (2e), ESSEC (4e), HEC Paris (5e). L’IÉSEG, de son côté, a gagné 11 places pour atteindre la 15e place mondiale.
- Classement composite des écoles européennes 2024 : l’INSEAD occupe la première place en Europe, tandis que Skema signe la plus forte progression (+45 places).
La France est aujourd’hui le pays d’Europe continentale le mieux représenté dans les classements internationaux du FT, derrière le Royaume-Uni mais devant l’Allemagne, l’Espagne ou les Pays-Bas.
- Master in Management (MiM) 2024 : six écoles françaises figurent dans le Top 10 mondial, dont HEC (2e), INSEAD (3e), ainsi que ESSEC, ESCP, EDHEC et EM Lyon. L’EM Lyon, par exemple, est passée de la 21e place en 2021 à la 8e place en 2024.
- Masters in Finance 2025 : domination française avec 4 écoles dans le Top 5 mondial : ESCP (1er), SKEMA (2e), ESSEC (4e), HEC Paris (5e). L’IÉSEG, de son côté, a gagné 11 places pour atteindre la 15e place mondiale.
- Classement composite des écoles européennes 2024 : l’INSEAD occupe la première place en Europe, tandis que Skema signe la plus forte progression (+45 places).
La France est aujourd’hui le pays d’Europe continentale le mieux représenté dans les classements internationaux du FT, derrière le Royaume-Uni mais devant l’Allemagne, l’Espagne ou les Pays-Bas.
L’éloignement de la mission consulaire
Historiquement, les écoles de commerce dites consulaires appartenaient aux Chambres de Commerce et d’Industrie régionales, avec pour mission de former les cadres nécessaires au développement économique local. Elles devaient répondre aux besoins spécifiques des territoires en matière de management, de commerce international et d’entrepreneuriat.
Or, force est de constater qu’avec la course aux classements, à la publication internationale et à l’internationalisation du corps professoral, ces écoles s’éloignent de plus en plus de cette vocation originelle. Leur modèle, désormais globalisé, privilégie la visibilité internationale et la compétition mondiale, parfois au détriment de leur rôle de formation des élites régionales au service du tissu économique local.
L’arrivée massive de professeurs étrangers au profil purement académique accentue ce décalage : si ces enseignants contribuent à la notoriété internationale, ils fragilisent la francophonie académique, réduisent la visibilité des savoirs produits en français, et connaissent peu la réalité du business français. Ils n’apportent pas toujours de réponses adaptées aux besoins des entreprises locales et régionales, ce qui éloigne encore davantage les écoles consulaires de leur mission première.
Ce paradoxe illustre bien le dilemme actuel : comment rester compétitif dans les classements mondiaux sans perdre son ancrage territorial et sa mission première ?
Or, force est de constater qu’avec la course aux classements, à la publication internationale et à l’internationalisation du corps professoral, ces écoles s’éloignent de plus en plus de cette vocation originelle. Leur modèle, désormais globalisé, privilégie la visibilité internationale et la compétition mondiale, parfois au détriment de leur rôle de formation des élites régionales au service du tissu économique local.
L’arrivée massive de professeurs étrangers au profil purement académique accentue ce décalage : si ces enseignants contribuent à la notoriété internationale, ils fragilisent la francophonie académique, réduisent la visibilité des savoirs produits en français, et connaissent peu la réalité du business français. Ils n’apportent pas toujours de réponses adaptées aux besoins des entreprises locales et régionales, ce qui éloigne encore davantage les écoles consulaires de leur mission première.
Ce paradoxe illustre bien le dilemme actuel : comment rester compétitif dans les classements mondiaux sans perdre son ancrage territorial et sa mission première ?
Rédigé par Dr Az-Eddine Bennani