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Est-il possible de savoir pourquoi les vaccins tardent à arriver ?




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Est-il possible de savoir pourquoi les vaccins tardent à arriver ?

Il est incontestable qu’avec la crise sanitaire 2020/21, le Maroc a remporté une grande victoire d’image, aussi bien locale qu’à l’international, et la campagne de vaccination menée tambour battant un mois durant contribue grandement à cette victoire. Les plus grands et les plus puissants Etats de ce monde n’ont pas fait si bien. Mais eux, ils pataugent certes mais essaient de s’expliquer. Pourquoi n’en faisans-nous pas autant, alors que nous n’avons pas démérité ?
 

Les responsables marocains ont échappé à un problème dans lequel bien des pays sont tombés, et le sont restés : Une frange importante de leurs sociétés doute quant à l’efficacité du vaccin, voire redoutent sa potentielle dangerosité. Et pourtant, on ne sait pas vraiment grand-chose sur les paramètres des produits injectés : durée d’immunité, immunogénicité, effets secondaires… En Europe, aux Etats-Unis, ailleurs, les gens ne se sont donc pas montrés très enthousiastes à l’idée de se faire injecter quelque chose dans le corps, par méfiance, par scepticisme ou, tout simplement par ignorance. Rien de tel au Maroc !
 

Dans le royaume, la population a globalement adhéré à la campagne menée au pas de charge par le gouvernement, ministères de la Santé et surtout de l’Intérieur en pointe. La communication initiale en a été bien assurée. Mais pourquoi donc les pouvoirs publics se taisent-ils à chaque retard ? En décembre, les questions avaient commencé à se poser sur les Chinois de Sinopharm, puis les Indo-anglais d’AstraZeneca. Pas de réponse, ou bien n’importe quoi, des ministères concernés, cette fois ceux de la Santé et des Affaires étrangères.
 

Puis, idem en mars. Les 9,5 millions de doses reçues ont été administrées aux populations, dans une organisation parfaite. Puis, plus rien, les chiffres ont baissé, puis se sont tus. De la même manière que les ministres supposés rester sur le front.
 

Il n’y a pourtant aucune honte à révéler ce qu’on entreprend, l’Etat étant semble-t-il mobilisé pour acheminer sur nos terres les presque 40 millions de doses commandées. Mais pourquoi ne sait-on rien des Chinois de Sinopharm, avec lesquels le Maroc avait signé à grand bruit un deal, en train de basculer aujourd’hui en dol. Nous avons « fourni » 600 personnes au labo chinois pour les essais de phase III, et nous en avons assuré la com, au grand bonheur des mêmes Chinois, nous avons reçu les promesses de livraison en bonne position… puis, rien, ou si peu. 2,5 millions de doses, sur 40 millions au total, et cela fait plusieurs semaines que Sinopharm livre d’autres pays.
 

Que s’est-il passé ? Les Marocains, qui se sont montrés si disciplinés et coopératifs, ne méritent-ils donc pas d’avoir une réponse, pour savoir ? Le monde, autour de nous, s’étripe pour ces vaccins, les belles déclarations d’intention de solidarité internationale sont suivies par de moins louables actes de rétention des vaccins, la diplomatie vaccinale a éclaté face au nationalisme sanitaire, et c’est normal. Mais au Maroc, pourquoi donne-t-on le sentiment de craindre la parole, l’explication, voire la critique de ces labos ?
 

La nouvelle donne géopolitique au Sahara a-t-elle changé la perception qu’on les Chinois de nous, comme il se murmure ici et là, justifiant les envois de vaccins à très petites doses ? La nouvelle relation du Maroc avec le Royaume-Uni post-Brexit peut-elle accélérer la réception des vaccins AstraZeneca, comme certains le suggèrent ? Et quid des Russes de Spoutnik ? M. Bourita n’a-t-il donc rien à dire ? On sait qu’il n’aime parler que des succès, mais le retard de réception des vaccins n’est pas un échec. Après un an de gestion Covid, M. Aït Taleb garde-t-il toujours sa réticence, voire sa phobie, à s’exprimer ? Et M. Amzazi, qui a jusque-là montré une certaine hardiesse à aller devant les médias, pourquoi ne dit-il rien non plus ?
 

Ce n‘est pas en avalant leur langue que les ministres taiseux nous feront avaler la couleuvre des retards… Et en se comportant de la sorte, ces mêmes ministres courent le risque de laisser renaître cette angoisse diffuse face au vaccin et, aussi, de voir tomber l’enthousiasme né de la vaccination royale.
 

Après un an de crise sanitaire, on retiendra que le Maroc s’en est bien sorti et que les choses ont été globalement bien gérées, hormis la communication. Et nous y sommes toujours ! Dommage, nous nous étions habitués à figurer dans le top 10 mondial de quelque chose…
 

Rédigé par Aziz Boucetta sur https:panorapost.com




Mardi 30 Mars 2021