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Hicham Jerando : de YouTube à la prison par contumace, la chute d’un influenceur devenu paria

Influenceur marocain exilé au Canada, Hicham Jerando a été condamné à 15 ans de prison pour terrorisme.


Rédigé par La Rédaction le Dimanche 11 Mai 2025

Cette condamnation marque un tournant. Non seulement pour la régulation des contenus numériques à l’ère de l’activisme globalisé, mais aussi pour la manière dont le Maroc entend protéger son ordre public face aux nouvelles formes de menaces hybrides, où les discours digitaux deviennent les vecteurs d’un désordre politique transfrontalier. À l’heure où la diaspora numérique marocaine s’internationalise, l’affaire Jerando pourrait bien devenir un cas d’école.



La justice marocaine envoie un signal fort contre la radicalisation numérique

Hicham Jerando : de YouTube à la prison par contumace, la chute d’un influenceur devenu paria
Le couperet est tombé. Quinze ans de prison. Par contumace. Pour beaucoup, ce nom ne disait rien. Et pourtant, Hicham Jerando, YouTuber marocain exilé au Canada, vient d’être condamné par la chambre criminelle de première instance près la Cour d’appel de Rabat pour des accusations gravissimes : constitution d’un groupe terroriste, planification d’actes violents, intimidation, et surtout incitation directe à commettre des actes de terreur. Le ton est donné : la justice marocaine ne badine pas avec les discours jugés subversifs, surtout lorsqu’ils franchissent la ligne rouge de la violence organisée.

Au-delà de la sentence, c’est une véritable onde de choc médiatique et judiciaire qui agite les réseaux sociaux et les observateurs politiques. Car derrière ce nom se cache une figure controversée, un influenceur virulent, passé en quelques mois de commentateur en ligne à suspect de haut niveau dans une affaire aux ramifications inquiétantes.

La genèse de cette affaire trouve son point d’ancrage dans une plainte déposée par Najim Bensami, ancien procureur général à la Cour d’appel de Casablanca. En toile de fond : des contenus diffusés par Jerando, vidéos au ton agressif où l’autorité de l’État marocain est constamment remise en cause, parfois avec des accusations qui ne sont que de la diffamation purement gratuite . Mais les charges retenues vont bien plus loin que le simple délit de presse.

Les enquêteurs évoquent la constitution d’un réseau, l’utilisation de techniques d’intimidation, l’extorsion de fonds, et surtout une logique de groupe structuré avec objectifs politiques violents. Des mots qui évoquent davantage une cellule radicalisée qu’un simple cyberactiviste. C’est là que la ligne floue entre militantisme numérique et projet de déstabilisation devient préoccupante.

L’implication de proches du prévenu, notamment une nièce de seulement quinze ans, mise en examen, puis relâchée, elle aurait fourni des cartes SIM utilisées pour diffamer, menacer, et faire chanter certaines victimes au nom de son oncle. Ce détail bouleversant a profondément choqué l’opinion publique marocaine : comment une adolescente se retrouve-t-elle mêlée à ce genre d’affaire ? Est-ce une manipulation ? Une radicalisation par procuration ? Un aveuglement familial ?

Ce glissement vers le clanique inquiète : lorsque l’activisme devient familial, l’idéologie devient un héritage toxique. Certains y voient une stratégie d’influence typique des logiques sectaires, d’autres y perçoivent une forme de dérive identitaire liée à l’exil et au ressentiment.

Condamné à distance, Jerando ne s’est pas présenté à l’audience. Exilé au Canada, il continue d’alimenter ses réseaux, dénonçant une justice « politique » et un procès « à charge ». Mais dans l’opinion, le doute est là. Beaucoup s’interrogent : la liberté d’expression justifie-t-elle tout ? Peut-on à ce point attaquer les institutions d’un pays sans jamais franchir une ligne rouge ?

Cette affaire en soulève une autre : jusqu’où peut aller un influenceur sans que ses paroles deviennent des armes ? La justice a tranché. Reste à savoir comment la société civile réagira face à cette sentence lourde, mais jugée par certains dont on fait partie, comme salutaire.


 

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Dimanche 11 Mai 2025