Rédigé par Ali Bouallou
En occident laïque, la liberté de conscience est au cœur des principes de vie. Chaque citoyen est libre de ses convictions et de leur tutelle. Aucune affirmation dogmatique n’est établie et toute doctrine religieuse rigide est rejetée pour le compte d’approches questionnantes voire sceptiques, en se basant sur des principes de raison et de progrès ; une sorte de religion que les hommes et les femmes adoptent et qui ne requiert que la croyance en la loi morale et la pratique de la loyauté, de l'honnêteté et de la probité.
Dans le texte coranique, cette notion de bénédiction exprimée dans le titre de cet article se matérialise par un savoir profond, le respect envers les autres, la bonne conduite et la recherche de la sagesse. Il ne s’agit nullement d’avoir peur de l’Éternel mais plutôt d’être conscient de sa propre faiblesse par rapport à la grandeur de cet Être Suprême qui ne présente ni genèse ni finitude, veillant sur toute l’humanité.
Se conformer aux commandements de l’Éternel permet d’accéder à une vie de quiétude, de prospérité, de joie et de stabilité. L’Éternel représente également l’ordre, la quête de la vérité et l’illumination spirituelle.
Que les adeptes de « l’orthodoxie libérale » ou du « radicalisme libéral » m’excusent mais je ne vais certainement pas me censurer en disant, et sans prosélytisme aucun, que le Dieu Abrahamique est bel et bien parmi nous !
Il est demandé au croyant l’orthopraxie et non l’orthodoxie. L’orthopraxie qui vient du mot grec ancien orthos (droit) et praxis (action). Le croyant doit mettre l’action sur la conduite juste et la rectitude.
L’Eternel est donc ce principe organisateur de notre projet initiatique. Et par projet initiatique, il est signifié le travail sur soi en vue d’une vie éthique et morale.
Et cette démarche doit impérativement aller de pair avec un projet philosophique. Exprimé autrement, la foi en quête de raison doit être complétée à tous les stades de la démarche initiatique par une raison en quête de foi.
Si la foi était opposée à la raison au Moyen Âge, elles sont depuis le siècle des lumières en totale harmonie. Et de mentionner les trois sphères de l’existence du théologien philosophe danois Søren Kierkegaard (1813 – 1855), les sphères esthétique, éthique et religieuse.
La sphère esthétique se concentre sur la satisfaction effrénée et immédiate des désirs dans la généralisation et le champ des possibles. Le stade suivant, celui de l'éthique, consacre le devoir, la responsabilité et l'engagement social dans l’individuation. La sphère suivante est celle de la foi et de la relation avec l'Éternel.
Ces sphères représentent les étapes que l'individu doit transcender pour progresser mais ils illustrent également, à mon sens, le projet initiatique cité plus haut pour désarticuler nos champs de ruine intellectuels et spirituels.
Dans notre société multiséculaire, nous avons la chance d’avoir parmi nous des anciens ayant parcouru ces trois sphères de l’existence pour atteindre la sphère religieuse.
Ils donnent par la force de leur âge et de leur sagesse un caractère traditionnel à leur spiritualité sans oublier le fait que nous sommes sur une terre musulmane ouverte et tolérante, garantissant de manière constitutionnelle la liberté de culte.
La crainte de l’Éternel est liée au respect, à l’adoration et à la connaissance plutôt qu’à la peur. C’est le point de départ de la sagesse que de reconnaitre la souveraineté de l’Éternel. Commencer par la compréhension pour finir par l’action concrète en vue de la connaissance véritable.
Dans une vie, tout être humain se doit de se soumettre à un principe supérieur qui mérite adoration ou vénération. C’est la voie royale vers l’humilité et le détachement par rapport aux désirs en tous genres.
Sans soumission à un principe supérieur, l’être humain vit sous la contrainte des sphères esthétique et éthique de Søren Kierkegaard. Cela entraine une dissociation existentielle entre le corps et l’esprit alors que la démarche initiatique œuvre plutôt pour l’unité parfaite du corps et de l’esprit mais avec une prédominance de l’esprit sur le corps.
La bénédiction que l’on en tire est le bonheur d’œuvrer pour l’objectif noble qui est celui d’édifier son temple intérieur pour ériger le temple de l’humanité, le but final de tout cheminement initiatique.
La crainte de l’Eternel est donc connaissance alors que la bénédiction est bonheur pour ne pas dire Souverain Bien selon Aristote.
« Il est béni l’homme qui craint l’Éternel » deviendrait donc « Heureux est celui qui développe la connaissance de soi et du monde ».