L'ODJ Média

Israël/Usa/Iran : le théâtre d’ombres


Rédigé par le Mardi 24 Juin 2025



A lire ou à écouter en podcast :


Israël/Usa/Iran : le théâtre d’ombres
A quoi auront finalement servi les frappes aériennes américaines de la nuit du 21 au 22 juin, contre trois sites nucléaires iraniens, à coup des bombes anti-bunker GBU57 portés par des bombardiers B2, de missiles Tomahawk lancés à partir de sous-marins d’attaque et d’éclatantes manifestations de triomphe « trumpiennes » ?

Les médias à sensation en ont fait leurs choux gras, les experts militaires se sont montrés beaucoup plus circonspects. 

Les sites nucléaires iraniens de Natanz, Ispahan et Fordo ont bel et bien été ciblés, mais aucun nuage de radiation n’a été signalé. 

Vérification faite, les Iraniens, qui s’attendaient aux frappes aériennes américaines, ont ou auraient déménagé 408kgs d’uranium enrichi à 60% et des équipements destinés à l’enrichissement de l’uranium, quelques jours avant l’attaque, vers d’autres installations secrètes, dont même l’Agence internationale pour l’énergie atomique (AIEA) ignore les emplacements. 

Les photos satellites montrent également que l’installation de Fordo, la plus importante dans le processus d’enrichissement de l’uranium en Iran et la mieux enterré sous des couches épaisses de béton armé et de roches, a été endommagée mais non détruite.

Medvedev a dit…

Dans un message publié, le 19 juin sur la plateforme X, l’ancien président de la Russie et actuel vice-président de son Conseil de sécurité, le Dimitri Medvedev, a donné sa réponse, en dix points, à la question posée.
 
1) Les infrastructures critiques du cycle du combustible nucléaire (Ndlr : iraniens) semblent n’avoir pas été affectées ou n’avoir subi que des dommages mineurs.
 
2) L’enrichissement de matières nucléaires - et, nous pouvons désormais le dire sans détour, la future production d’armes nucléaires- va se poursuivre.
 
3) Plusieurs pays sont prêts à fournir directement à l’Iran leurs propres ogives nucléaires.
4) Israël est attaqué, des explosions secouent le pays et les gens paniquent.
 
5) Les États-Unis sont désormais empêtrés dans un nouveau conflit, avec la perspective d’une opération terrestre qui se profile à l’horizon.
 
6) Le régime politique iranien a survécu et, selon toute vraisemblance, en est sorti encore plus fort.
 
7) Les gens se rassemblent autour du leadership spirituel du pays, y compris ceux qui y étaient auparavant indifférents ou opposés.
 
8) Donald Trump, autrefois salué comme le « président de la paix », a désormais poussé les États-Unis dans une nouvelle guerre.
 
9) La grande majorité des pays du monde s’opposent aux actions d’Israël et des États-Unis.
10) À ce rythme, Trump peut oublier le prix Nobel de la paix, même si celui-ci est devenu truqué.
 
Il est possible de rajouter à cette énumération des faits, l’efficacité des missiles hypersoniques iraniens et, à contrario, la faible efficience des systèmes de défense anti-missiles israéliens et américains.

Il fut une fois, le Droit international

Parmi les conséquences des frappes américaines en Iran les moins soulevées par les médias, la mise à mort du Droit international, qu’Israël et les Etats-Unis ont allègrement bafoué, les obsèques du Traité de non-prolifération nucléaire, censé assurer aux pays signataires le droit au développement d’un programme nucléaire civil et des instances onusiennes en général, dont les pays du Sud global commencent à se demande à quoi peuvent-elles bien être utiles, si ce n’est de servir les intérêts des puissances occidentales.

Quoi que l’on pense du régime des mollahs en Iran, ce pays n’a attaqué aucun de ses voisins, il n’y a aucune preuve qu’il ait fabriqué une bombe atomique, son programme nucléaire est parmi les plus surveillés du monde par l’AIEA et, au moment des frappes israéliennes contre ses installations nucléaires, il était engagé dans des négociations avec les Etats-Unis à ce sujet.

Israël a mal estimé la vélocité, la manœuvrabilité et la puissance de frappe des missiles hypersoniques iraniens et ne cesse de le regretter depuis le 14 juin. 

Après avoir presque épuisé leur stock de missiles intercepteurs, vu se réduire à néant leur capacité de dissuasion et leurs réseaux d’espions et de saboteurs en Iran démantelés, les Israéliens se retrouvent gros jean comme devant.

Les éternels perdants

Un cessez le feu, sans accord formel, a finalement été conclu entre les deux belligérants et le pays qui a servi d’intermédiaire pour ce faire n’est autre que… le Qatar !

Oui, c’est le même pays qui a intercepté six missiles iraniens tirés, le 23 juin, sur la base américaine d’Al Adeid, auparavant évacuée, puisque Washington en avait été prévenu par Téhéran.

En Orient compliqué, comme le qualifiait le Général De Gaulle, les ennemis de mes amis ne sont pas forcément mes ennemis et mes ennemis d’aujourd’hui seront peut-être mes amis de demain.

Les Arabes qui se sont crus malins en misant tout sur le tocard Netanyahou ne vont pas y perdre seulement leurs illusions. Il y a un retour de boomerang qui s’annonce brutal.




Ahmed Naji
Journaliste par passion, donner du relief à l'information est mon chemin de croix. En savoir plus sur cet auteur
Mardi 24 Juin 2025