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Joe Biden : Un arrière goût d’inachevé


Rédigé par le Mardi 15 Décembre 2020

C’est officiel. Joe Biden est, désormais, le 46ème président des Etats-Unis d’Amérique. La contestation des résultats des élections présidentielles, une première dans l’Histoire de ce pays, n’augure pas des meilleurs auspices le mandat de Biden. Les conséquences socioéconomiques de la pandémie, non plus.
306 grands électeurs, sur les 538 que compte le collège électoral chargé d’élire le président des Etats-Unis, ont accordé leurs voix à Joe Biden. Il devient ainsi le 46ème occupant de la Maison blanche. Aucun de ses prédécesseurs n’a eu, toutefois, à souffrir du déficit de légitimité suscité par les accusations de fraudes lancées par les partisans de Donald Trump.



Joe Biden, 46ème président des Etats-Unis d'Amérique
Joe Biden, 46ème président des Etats-Unis d'Amérique
Peu importe que les remises en cause des résultats des dernières élections présidentielles américaines soient fondées ou pas. Une bonne partie de l’électorat du président sortant est fortement convaincue que la Maison blanche leur a été volée. Et ce ne sont pas les médias mainstream, qui n’ont jamais caché leur répulsion envers Trump, qui pourront les convaincre du contraire.

Comment gouverner un pays et appliquer son programme électoral quant une large frange de la population voit en le nouvel occupant de la Maison blanche un imposteur ? Les enquêtes judiciaires dont fait l’objet son fils, Hunter, concernant ses activités en Ukraine, outre ses liens révélés avec des milieux d’affaires chinois réputés proches du parti communiste, ne vont pas sûrement pas arranger les choses.

La bataille du Covid

De toute évidence, le premier défi à relever pour le nouveau Potus (président des Etats-Unis) serait de redresser une économie américaine mise à mal par les effets destructeurs de la pandémie du Covid. Les faillites d’entreprises vont s’accroître de 57% aux Etats-Unis, en 2021, selon une étude de la société française d’assurance crédit, Euler Hermès. 19 millions d’Américains, par ailleurs, vivent actuellement des allocations chômage.

Il est question d’un plan de relance de l’économie américaine. On ignore, cependant, d’où vont provenir les nécessaires financements pour ce faire, la monétisation de la dette des Etats-Unis, qui devrait se chiffrer à 25.000 milliards de dollars au moment de la prise de fonction de Joe Biden, soit quelques 100% du PIB, ayant été poussée déjà très loin. 

Vaccines-moi si tu peux

D’autre part, sans immunité collective de la population face au virus Srars-Cov2, il sera difficile à n’importe quel pays au monde de redresser ses activités productives. La campagne de vaccination contre le Covid19 a commencé le lundi 15 décembre aux Etats-Unis, alors que ce pays compte déjà 300.000 morts du fait de la pandémie.

Mais comment va s’y prendre Joe Biden avec la partie de la population de son pays, généralement des partisans de Trump gavés de théories du complot, qui refusent de se faire vacciner ? Si le nouveau Potus fait du vaccin une obligation pour tous les citoyens américains, il ne fera que conforter les thèses des complotistes.

Lame de fond

La carte intégrale du Maroc telle que reconnue par les Etats-Unis
La carte intégrale du Maroc telle que reconnue par les Etats-Unis
Ce qui semble d’ores et déjà certain, c’est que la politique extérieure des Etats-Unis, qui intéresse plus particulièrement les Marocains, ne risque pas de connaître de grands bouleversements avec l’entrée de Joe Biden à la Maison blanche. Les grandes tendances géopolitiques vers le multilatéralisme constatées vont tout simplement poursuivre leurs progrès.

A l’exception d’un changement de casting, la Chine remplaçant la Russie dans le rôle du super-méchant (les révélations sur les liens de Hunter Biden avec les Chinois n’étant pas dénuées d’arrière pensées géostratégiques), on voit mal ce que la présidence Biden pourra changer dans les conditions actuelles.

Le paramètre iranien

L’accord avec l’Iran sur le nucléaire ? Israël ne voudra jamais que Biden le réintègre tel que conclu du temps d’Obama, puisque son vrai souci est l’armement conventionnel de l’Iran, le prétexte du nucléaire étant juste pour amuser la galerie. Comme l’a bien expliqué dans un récent article Alastair Crooke, anciennement agent du MI6 et diplomate, un simple coup d’œil sur la carte suffit pour voir que si les Israéliens sont visés par des frappes nucléaires, les Palestiniens mourront également massivement.

La vraie menace iranienne réside actuellement dans ses missiles localement produits, dont les Américains ont goûté à la précision en Irak, et les drones, qui ont plu sur les infrastructures pétrolières saoudiennes en partance du Yémen. Sachant que les Iraniens disposent de suffisamment de proxy au Moyen Orient, Biden devra faire preuve de pédagogie pour expliquer à Netanyahou qu’une attaque contre l’Iran signifie des volées de missiles qui s’abattent sur Israël, qu’aucun bouclier anti-missile ne saurait toutes arrêter.

Danse avec l’Ours et le Dragon

Quand à l’axe Moscou-Pékin, il est devenu difficile d’y déceler le moindre interstice pour y glisser ne serait-ce qu’une feuille de papier. Et puis, on ne tire pas sur son fournisseur et créancier, on se contente de lui enquiquiner l’existence, comme à Hong-Kong ou dans le Xinjiang. Surtout quand il est capable d’envoyer par le fond les porte-avions qui croiseraient à proximité de ses côtes à coup de missiles antinavires.

Poutine, le regard d’une froideur d’acier, caresse le bouton des missiles hypersoniques russes qu’aucun système de défense américain n’est apte à stopper. C’est, également, devenu un acteur de poids dans un Moyen Orient qui constituait, jadis, une chasse gardée des Etats-Unis.

Les sanctions ont, d’autre part, bien peu d’effets sur un pays-continent, la Russie, qui s’auto-suffit largement pour s’alimenter en nourriture et énergie, sauf en termes de transferts de technologies, dont l’économie russe a tant besoin pour aller de l’avant.

Le temps ne recule jamais

Une fois cette esquisse dressée, le sort du décret présidentiel signé par le président sortant Donal Trump reconnaissant la marocanité du Sahara ne semble nullement menacé. Tous les grands acteurs de la scène internationale ont bien d’autres chats à fouetter.

Autant ils auraient préférés le maintien du statuquo dans l’affaire du Sahara, qui donne un levier de pression sur les protagonistes, autant ils savent ne pouvoir remettre en cause le décret de Trump sans menacer encore plus la sécurité dans une Afrique du nord déjà pas mal déstabilisée.

Ce que le Maroc a engrangé, les Marocains le gardent et on n’en parle plus. Le temps ne recule jamais. Isn't that right, Mr. President ?





Ahmed Naji
Journaliste par passion, donner du relief à l'information est mon chemin de croix. En savoir plus sur cet auteur
Mardi 15 Décembre 2020