L'ODJ Média

L’IA et l’e-gouvernement en Afrique : vers une souveraineté systémique


Par Dr Az-Eddine Bennani

Les Assises de la Transformation Digitale en Afrique (ATDA) organisées à Rabat ont révélé une dynamique qui dépasse largement le cadre d’un événement technologique : il s’agit d’un moment géopolitique. L’Afrique ne se contente plus d’adopter l’intelligence artificielle ; elle commence à la penser, à la gouverner et à la réinscrire dans ses propres réalités culturelles, institutionnelles et linguistiques.

Ce que montre ce programme, c’est que l’IA n’est pas un champ technique. C’est un système complexe : un ensemble structuré où interagissent données, modèles, acteurs, institutions et finalités collectives. Les ATDA 2025 ont illustré à quel point ces dimensions doivent être pensées ensemble si l’Afrique veut atteindre une véritable souveraineté numérique.



Une Afrique qui entre dans l’ère de la souveraineté cognitive et stratégique

L’IA et l’e-gouvernement en Afrique : vers une souveraineté systémique
Sans maîtrise linguistique, il n’y a pas de maîtrise cognitive. Les panels sur les langues africaines montrent que l’Afrique a compris ce point : un continent qui ne pense pas dans ses langues deviendra captif des modèles cognitifs des autres. La digitalisation de la Darija, du Peulh, du Wolof ou du Bambara n’est pas un acte technique mais un acte politique.

E-Gouvernement : la transformation systémique de l’État africain.

Les keynotes montrent que l’État doit devenir une organisation apprenante, capable d’intégrer traitement massif des données, pilotage temps réel, infrastructures smart et gestion algorithmique des services publics. C’est ce que j’appelle l’État intelligent : articulation entre ontologie, système opérationnel et modèle de gouvernance.

Le Maroc : un laboratoire de transformation publique

Le Maroc n’est plus un importateur de stratégies digitales ; il est devenu un producteur de modèles. Plateformes de maturité digitale, réformes sectorielles, logiques d’alignement stratégique : le pays avance dans une structuration où données, infrastructures, compétences et régulation convergent. Le modèle MrabaData que je propose s’inscrit dans cette dynamique.

- Risques :
Dépendance technologique, manque de compute souverain, déficit de compétences. L’IA est un multiplicateur conditionnel : sans transformation institutionnelle, les gains restent limités.

- Opportunités :
Cloud de confiance africain, modèles d’IA multilingues, harmonisation des politiques publiques, solutions souveraines d’E-Government. L’Afrique peut devenir productrice de solutions.

L’Afrique ne discute plus la transformation digitale ; elle la structure. Le Maroc s’affirme comme laboratoire, architecte et catalyseur continental. Une IA souveraine est une IA pensée, gouvernée et appliquée depuis le territoire qui la porte.

Par Dr Az-Eddine Bennani


Samedi 15 Novembre 2025