Par Dr Az-Eddine Bennani
L’irruption de l’intelligence artificielle générative (IAG) dans l’école est un séisme silencieux. Rédiger un devoir, corriger un exercice, préparer une présentation : en quelques secondes, l’élève peut désormais accéder à des résultats qu’il fallait auparavant construire avec effort. Ce bouleversement interroge : apprendre, est-ce encore nécessaire quand la machine peut répondre à tout ?
Cette question est cruciale car elle ne concerne pas seulement les usages techniques, mais la finalité même de l’éducation. L’IAG met en tension deux visions : celle qui met l’accent sur la pédagogie et celle qui se concentre sur les enjeux systémiques et culturels.
Cette question est cruciale car elle ne concerne pas seulement les usages techniques, mais la finalité même de l’éducation. L’IAG met en tension deux visions : celle qui met l’accent sur la pédagogie et celle qui se concentre sur les enjeux systémiques et culturels.
Préserver l’acte d’apprendre
Le pédagogue français Philippe Meirieu insiste sur un point essentiel : l’école n’est pas un lieu de consommation de savoirs prêts à l’emploi, mais un espace où se construit l’autonomie intellectuelle. L’arrivée de l’IAG risque, selon lui, de renforcer une illusion : croire qu’apprendre n’exige plus ni effort, ni tâtonnement, ni confrontation à la difficulté.
Or, c’est précisément dans ces moments d’incertitude et d’effort que l’élève forge sa pensée, développe son esprit critique et découvre sa propre capacité à comprendre. Pour Philippe Meirieu, l’IAG ne doit pas être bannie, mais intégrée avec vigilance dans une pédagogie exigeante. L’enseignant doit rester médiateur, garant de la rencontre entre l’élève et le savoir, en veillant à ce que la machine ne court-circuite pas le processus d’apprentissage mais le soutienne.
Dans cette perspective, l’IAG est un outil comme d’autres avant elle - le livre, la télévision, l’ordinateur. Ce qui compte, c’est la manière dont on l’inscrit dans une démarche éducative cohérente, et la capacité des enseignants à en faire un levier d’émancipation plutôt qu’une facilité trompeuse.
Or, c’est précisément dans ces moments d’incertitude et d’effort que l’élève forge sa pensée, développe son esprit critique et découvre sa propre capacité à comprendre. Pour Philippe Meirieu, l’IAG ne doit pas être bannie, mais intégrée avec vigilance dans une pédagogie exigeante. L’enseignant doit rester médiateur, garant de la rencontre entre l’élève et le savoir, en veillant à ce que la machine ne court-circuite pas le processus d’apprentissage mais le soutienne.
Dans cette perspective, l’IAG est un outil comme d’autres avant elle - le livre, la télévision, l’ordinateur. Ce qui compte, c’est la manière dont on l’inscrit dans une démarche éducative cohérente, et la capacité des enseignants à en faire un levier d’émancipation plutôt qu’une facilité trompeuse.
Penser la souveraineté cognitive
De mon côté, je propose une lecture différente, qui élargit le regard. L’école n’est pas seulement un lieu de rencontre entre un élève, un enseignant et un savoir. Elle est aussi une institution traversée par des enjeux culturels, économiques et politiques. L’introduction massive de l’IAG dans les systèmes éducatifs pose une question de fond : qui contrôle les représentations que les élèves intègrent en apprenant avec ces outils ?
Les modèles d’IAG actuellement disponibles sont conçus ailleurs, dans des environnements culturels et économiques dominés par les grandes plateformes mondiales. Ils véhiculent des visions du monde, des biais linguistiques, des priorités éducatives qui ne correspondent pas toujours aux nôtres. En les adoptant sans recul, nous courons le risque d’une dépendance cognitive, où nos élèves penseraient avec des catégories forgées en dehors de nos contextes nationaux, culturels et linguistiques.
C’est pourquoi j’affirme que la question de l’IAG à l’école est aussi une question de souveraineté cognitive. Nous devons développer des usages éducatifs de l’IA adaptés à nos langues, à nos cultures et à nos programmes. Le Maroc, comme les autres pays du Sud, ne peut pas se contenter d’importer des solutions toutes faites. Il doit concevoir ses propres outils, former ses enseignants à des usages critiques et bâtir une gouvernance éducative capable de préserver l’autonomie de pensée des générations futures.
Les modèles d’IAG actuellement disponibles sont conçus ailleurs, dans des environnements culturels et économiques dominés par les grandes plateformes mondiales. Ils véhiculent des visions du monde, des biais linguistiques, des priorités éducatives qui ne correspondent pas toujours aux nôtres. En les adoptant sans recul, nous courons le risque d’une dépendance cognitive, où nos élèves penseraient avec des catégories forgées en dehors de nos contextes nationaux, culturels et linguistiques.
C’est pourquoi j’affirme que la question de l’IAG à l’école est aussi une question de souveraineté cognitive. Nous devons développer des usages éducatifs de l’IA adaptés à nos langues, à nos cultures et à nos programmes. Le Maroc, comme les autres pays du Sud, ne peut pas se contenter d’importer des solutions toutes faites. Il doit concevoir ses propres outils, former ses enseignants à des usages critiques et bâtir une gouvernance éducative capable de préserver l’autonomie de pensée des générations futures.
Deux voix, une même alerte
Ces deux approches ne s’opposent pas, elles se complètent. Philippe Meirieu rappelle que l’élève doit rester acteur de son apprentissage : c’est une exigence éthique de la relation pédagogique. De mon côté, j’insiste sur le fait qu’une nation doit rester maîtresse de son école à l’ère numérique : c’est une exigence politique et culturelle.
En conjuguant ces deux regards, on comprend que la véritable question n’est pas seulement : « comment utiliser l’IAG en classe ? », mais bien : « quelle école voulons-nous construire avec l’IAG ? ».
Une école qui ne renonce pas à l’effort d’apprendre, où la machine accompagne l’élève sans le remplacer. Une école qui refuse la dépendance cognitive et construit ses propres outils. Une école qui reste un lieu d’émancipation, d’esprit critique et d’ouverture sur le monde.
En conjuguant ces deux regards, on comprend que la véritable question n’est pas seulement : « comment utiliser l’IAG en classe ? », mais bien : « quelle école voulons-nous construire avec l’IAG ? ».
Une école qui ne renonce pas à l’effort d’apprendre, où la machine accompagne l’élève sans le remplacer. Une école qui refuse la dépendance cognitive et construit ses propres outils. Une école qui reste un lieu d’émancipation, d’esprit critique et d’ouverture sur le monde.