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L’intelligence artificielle face à un plafond de verre ?


Rédigé par le Mercredi 14 Mai 2025

Une étude d’Epoch AI révèle que l’intelligence artificielle pourrait plafonner en matière de raisonnement. Faut-il changer de paradigme ?



Des neurones mais pas d’idées : l’IA atteint-elle ses limites ?

L’intelligence artificielle face à un plafond de verre ?
L’étude publiée par Epoch AI jette un pavé dans la mare de l’euphorie technologique. Selon ses chercheurs, l’industrie de l’intelligence artificielle pourrait bien être en train d’atteindre un plafond dans l’amélioration des capacités de raisonnement de ses modèles. Ce constat, aussi sobre qu’inquiétant, questionne directement la trajectoire actuelle de l’IA : plus de données, plus de puissance, plus de paramètres… mais pas nécessairement plus d’intelligence.

Jusqu’ici, l’évolution des modèles d’IA – notamment des grands modèles de langage (LLM) – semblait irrésistible. Chaque année, de nouvelles architectures pulvérisent les benchmarks, impressionnent les utilisateurs et s’invitent dans toujours plus de secteurs. Mais selon Epoch AI, cette croissance quantitative montre des signes d’essoufflement qualitatif. En d'autres termes, même les modèles les plus avancés peinent à améliorer de manière significative leur capacité à raisonner logiquement, résoudre des problèmes complexes ou généraliser hors des données apprises.

Les tests évaluant la logique, la résolution de problèmes mathématiques ou encore la planification montrent une courbe de progression qui s’aplatit, malgré une explosion des ressources matérielles mobilisées. L’augmentation du nombre de paramètres ne semble plus suffire à franchir les nouvelles frontières du raisonnement artificiel.

C’est là tout le paradoxe mis en lumière par l’étude : les systèmes d’IA sont plus puissants que jamais, mais leur capacité à « penser » ou à comprendre de manière abstraite reste très limitée. Les modèles sont de plus en plus capables de simuler une réponse plausible… sans pour autant en comprendre le sens profond. La différence entre cohérence syntaxique et cohérence logique devient alors une faille structurelle.

Epoch AI suggère que le simple scaling (grossissement des modèles) ne permettra plus de dépasser cette limite. Cela soulève une question cruciale : les approches actuelles de l’IA, basées sur le deep learning et l’optimisation de très grands réseaux de neurones, sont-elles adaptées pour reproduire ou simuler une forme d’intelligence humaine ou animale ?

Pour éviter un plateau prolongé, l’étude appelle à une réorientation de la recherche, explorant des modèles hybrides, mêlant apprentissage symbolique et neuronal, ou des architectures inspirées directement de la cognition humaine. D'autres pistes évoquées incluent l’utilisation de feedbacks humains plus sophistiqués, l’apprentissage auto-supervisé par exploration, ou encore la création de modèles multi-agents capables d’apprendre en interaction.

Cette remise en cause ne signifie pas la fin de l’IA, mais plutôt le début d’une nouvelle étape plus exigeante, plus interdisciplinaire, impliquant neurosciences, philosophie de l’esprit, pédagogie ou logique formelle. Le futur de l’IA ne sera peut-être plus une simple affaire d’échelle, mais une affaire de structure et de stratégie intellectuelle.

Faut-il vraiment s’alarmer ? Après tout, les prédictions de plafond technologique ne datent pas d’hier – et l’histoire récente de l’IA regorge d’annonces prématurées sur la fin des progrès. Il se pourrait aussi que l’« apparente stagnation » ne soit qu’un creux momentané, avant l’émergence de nouveaux modèles ou de paradigmes disruptifs. Et puis, l’utilité des modèles actuels demeure immense, même sans raisonnement parfait : traduction, assistance, créativité, simulation, prédiction… Faut-il exiger de l’IA qu’elle devienne philosophe pour qu’elle nous soit utile ?

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Mercredi 14 Mai 2025