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L’objectif Kiev, erreur de Poutine ?


Rédigé par le Samedi 26 Février 2022

Guerre Russie-Ukraine, Jour J + 3 : la logistique peine à suivre l’avance des troupes russes en territoire ukrainien, l’attaque marque le pas. Le prétexte de la protection des habitants du Donbass battu en brèche par l’assaut sur Kiev.



Première utilisation au combat du missile hypersonique 3M22 Zircon
Première utilisation au combat du missile hypersonique 3M22 Zircon
Après une journée et demie de combats, au cours desquels l’armée russe a dévasté l’infrastructure aéroportuaire militaire ukrainienne, détruisant les appareils au sol, à coups de missiles hypersoniques Zircon et de raids aériens, il semblerait que l’invasion russe ralentit.

Il s’agit bel et bien d’une invasion, du fait de l’entrée des troupes russes au Nord de l’Ukraine, en direction de la capitale Kiev, du fait que ce n’est pas une région russophone, dont Moscou pourrait prétendre protéger les habitants.

L’objectif préalablement proclamé par la Russie de détruire l’appareil militaire ukrainien, afin de faire cesser les hostilités contre les habitants du Donbass et de se prémunir contre un déploiement d’équipements militaires de l’Otan sur le territoire du pays voisin de l’Ouest, serait donc doublé d’un autre moins affiché.

De toute évidence, quand Poutine a parlé de « dénazification » de l’Ukraine, dans son discours annonçant le début des opérations militaires, il entendait littéralement changer de régime à Kiev, de manière à y installer un pouvoir politique plus pro-russe.

L’axe Moscou-Minsk

L’implication directe de la Biélorussie, qui a ouvert son territoire aux forces d’invasion russes pour attaquer Kiev par le Nord, est également une surprise.

Cette décision du président biélorusse Alexandre Loukachenko, un vieux renard de la politique de l’ère soviétique qui a longtemps joué les équilibristes entre la Russie et l’Occident, avant que la tentative de le renverser ne le jette dans les bras de Poutine, démontre à quel point Minsk est devenue totalement inféodée à Moscou.

Comme le déroulement des opérations militaires contredit souvent les plans des états-majors, ce ne sont pas les surprises qui ont manqué lors de cette invasion russe de l’Ukraine.
 
A Kharkov, ville pourtant proche des frontières avec la Russie, donc en région russophone, la résistance opposée par les soldats ukrainiens aux troupes d’invasion est farouche. Elle est maintenant encerclée. Si les forces russes devaient prendre la ville d’assaut, le bain de sang est assuré.

Melitopol est à moitié tombée entre les mains des Russes. Des combats se déroulent à Kiev, constamment bombardée.


Plus de courage que de moyens

Le Sukhoï30SM, avion de 4ème génération, abattu par son ancêtre le Sukhoï27
Le Sukhoï30SM, avion de 4ème génération, abattu par son ancêtre le Sukhoï27
Des actes de bravoure ont été également constatés, de la part de militaires ukrainiens que l’on disait, pour la plupart mal formés et démoralisés, si ce ne sont les unités composées de fanatiques néonazis, tel le régiment Azov, beaucoup plus combatives.

En plein bombardement des aéroports militaires ukrainiens, deux pilotes ukrainiens à bord d’appareils Sukhoï27 ont réussi à décoller, sans savoir par la suite ou se poser, puisque presque toutes les pistes à travers le pays étaient détruites. L’un d’entre eux a réussi à abattre deux Sukhoï30 avant de se faire abattre par un troisième.

Le Sukhoï30, appareil de 4ème génération par son avionique, est pourtant une version améliorée du Sukhoï27, qui est un chasseur d’interception. Un autre avion Sukhoï30 aurait été détruit par un missile balistique Toshka-U tiré sur la base aérienne russe de Millerovo, selon le site russe Avia.pro.

11 appareils russes auraient été abattus au total, selon le ministère de la défense ukrainien. L’armée ukrainienne a, par ailleurs, pu tirer sur le territoire russe quelques 14 engins, toutes les cibles visées se trouvant dans la région de Rostov, information non confirmée par les autorités ukrainiennes.

L’écrasante supériorité russe

L’attitude de fermeté adoptée par le président ukrainien Volodymyr Zelensky a aussi été une surprise. Cet ancien comédien de modeste carrure politique, qui n’aurait pas hésité à négocier et trouver un terrain d’entente avec Poutine s’il ne craignait de se faire renverser et éliminer par les éléments les plus radicaux de son administration, a révélé une autre stature en cette période de crise.
 
Bien sûr, toutes ces manifestations de courage individuelles seront loin de suffire face à l’écrasante puissance militaire de la Russie, qui est en train de tester sur le terrain ses systèmes d’armement les plus sophistiqués.

La Russie est la 2ème puissance militaire mondiale et consacre un budget de 61,7 milliards de dollars à son armée, selon le classement de Global Fire Power, l’Ukraine est 22ème, avec un budget de 5,9 milliards de dollars.

211 installations militaires ukrainiennes ont été détruites, selon le ministère de la défense russe. Il s’agit d’aéroports militaires, de batteries antiaériennes, de stations radars, de postes de commandement et de réseaux de communication. 160 missiles russes de différents types ont été tirés dès le premier jour sur l’Ukraine, selon des experts occidentaux cités par le Washington-post.

Les yeux plus gros que le ventre ?

L'armée russe avance sur 4 axes en Ukraine, dans des régions russophones, sauf au Nord en direction de Kiev
L'armée russe avance sur 4 axes en Ukraine, dans des régions russophones, sauf au Nord en direction de Kiev
Poutine a vraiment mis le paquet, puisque l’on parle de milliers de véhicules blindés ayant franchi les frontières. La 57ème brigade ukrainienne a d’ailleurs rendu les armes.

Pour remonter le moral des troupes, il a été accordé une augmentation de 30% des salaires des soldats ukrainiens.

Selon des sources non confirmées, une partie de l’armée russe considère qu’après avoir brisé les capacités militaires de l’Ukraine, nul besoin d’aller plus avant, en risquant des hommes et des équipements sur le terrain. L’opération « choc et effroi » du premier jour de l’attaque de la Russie contre l’Ukraine, dans le style de la première guerre du Golf en 1991, serait suffisante.

Un autre courant de planification stratégique estime que c’est l’occasion de changer de régime à Kiev, sauf qu’une telle approche risque de s’avérer très coûteuse en vies humaines, militaires et civils confondus. Outre les moyens supplémentaires à y consacrer.

Déjà, acheminer du carburant, des munitions et de la nourriture aux quelques 170.000 soldats russes lancés contre l’Ukraine commence à poser problème. Poutine pourrait se rendre compte qu’avoir les yeux plus gros que le ventre l’a fait tomber dans le piège américain qu’il a pourtant tout fait pour contourner.




Ahmed Naji
Journaliste par passion, donner du relief à l'information est mon chemin de croix. En savoir plus sur cet auteur
Samedi 26 Février 2022