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Le 8 mars : Un combat pour l’émancipation des femmes marocaines

Entre avancées et défis persistants


Le 8 mars, Journée internationale des Droits des femmes, n'est pas un simple rituel de célébration. C’est un moment de vérité, une interpellation qui oblige à mesurer le chemin parcouru et celui qu’il reste à franchir. En effet, c’est un appel à regarder en face la réalité, aussi brute qu’injuste, d’une société où les femmes, malgré leurs combats acharnés, continuent de lutter contre un patriarcat profondément ancré.



Rédigé par Hajar Dehane

Le 8 mars : Un combat pour l’émancipation des femmes marocaines
Au Maroc, ce jour résonne comme un écho à des luttes séculaires, portées par des voix féminines qui ont osé briser le silence, bien avant que la politique ne leur accorde une place. Le combat des femmes marocaines, celui des Moudawana, des Akhawat Essafa, ne se limite pas à des lois : il est une question de dignité, de liberté, de justice. Ces combats sont inscrits dans la longue histoire de la résistance féminine au Maroc, un combat pour la reconnaissance et l’égalité.

Cependant, les réformes législatives, bien que saluées, restent un symbole de progrès partiel, une réponse légale à des défis bien plus profonds. En dépit de ces avancées, même lorsque le Code de la famille semble se réécrire, une résistance bien plus puissante, enracinée dans les mentalités, empêche les femmes marocaines de goûter à une véritable émancipation.

Depuis 1946, les militantes marocaines s’opposent à un système qui les invisibilise. À travers le mouvement Akhawat Essafa, elles marquent une rupture décisive. Il ne s'agit pas simplement d'une quête d'égalité, mais d'une lutte pour la reconnaissance pleine et entière des femmes dans la sphère publique. Elles revendiquent ce qui leur est dû : l’accès à l’éducation, l’autonomie économique et une égalité réelle. Surtout, elles défendent une humanité qui leur a été niée, une dignité qui ne doit pas être conditionnée par la bienveillance d’un ordre patriarcal figé dans des traditions séculaires.

Dans ce sens, la réforme de la Moudawana en 2004 semblait offrir une lueur d’espoir. Un acte symbolique, un pas vers la justice. Cependant, les femmes marocaines l’ont vite compris : un texte ne fait pas l’émancipation. En réalité, c’est une mascarade législative tant que les mentalités restent bloquées dans l’ancien siècle, tant que la femme est vue comme un être inférieur, une épouse, une mère, mais jamais une citoyenne pleinement libre et autonome. La polygamie, le mariage des mineures, les droits d'héritage limités : tout ceci demeure gravé dans le quotidien des femmes marocaines.

Les avancées du règne de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, en matière de droits des femmes, sont indéniables. En effet, depuis 1999, il inscrit l'égalité entre les sexes comme un axe fondamental du projet de modernisation du Maroc. La Moudawana de 2004 a été une avancée majeure, mais une avancée freinée par des résistances qui ne cessent de se manifester dans la société marocaine. Car ces résistances, ce ne sont pas seulement des mots : ce sont des mentalités qui se transmettent de génération en génération, une culture patriarcale qui a bien du mal à céder la place à une société égalitaire.

Plus récemment, en 2023, une nouvelle révision du Code de la famille a été ordonnée par Sa Majesté le Roi Mohammed VI, une tentative de rattraper le retard laissé par les réformes passées. Mais, malgré ce progrès, il existe encore un décalage insupportable entre la législation et la réalité sociale. L'élévation de l’âge légal du mariage à 18 ans, la limitation de la polygamie, le partage de la tutelle légale des enfants, tout cela est porteur d’espoir.

Cependant, tant que ces réformes ne sont pas pleinement intégrées dans le quotidien des Marocaines, elles resteront des avancées théoriques, des promesses non tenues.

Ainsi, le 8 mars ne doit donc pas être un jour de satisfaction béate, mais une piqûre de rappel. L’égalité ne se décrète pas uniquement dans les textes, elle se vit au quotidien, dans les mentalités et les pratiques. Tant que les Marocaines ne seront pas pleinement libres de choisir leur destin, cette journée continuera d’être un miroir des défis encore à relever. Le combat se poursuit, et chaque pas en avant écrit une nouvelle page vers un Maroc où l’égalité ne sera plus un horizon lointain, mais une réalité tangible.



Lundi 10 Mars 2025