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Le Maroc et Corral Holdings : une bataille juridique qui s'éternise


Rédigé par La Rédaction le Samedi 7 Septembre 2024

L’affaire de la raffinerie SAMIR, fermée en 2015, continue de susciter des remous judiciaires entre le gouvernement marocain et le groupe suédois Corral Holdings. Après une longue bataille devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), les deux parties ont déposé des recours demandant la rectification de la décision rendue par le tribunal, révélant un conflit encore loin d'être résolu.



Un Jugement Contesté de Part et d'Autre

Le Maroc et Corral Holdings : une bataille juridique qui s'éternise
Le 15 juillet, le CIRDI a condamné le Maroc à verser 150 millions de dollars de dommages et intérêts à Corral Holdings, l’actionnaire principal de SAMIR. Cette somme, bien qu'importante, est nettement inférieure aux 2,7 milliards de dollars initialement réclamés par Corral. Cependant, le gouvernement marocain, jugeant cette décision injuste, a rapidement annoncé son intention de faire appel. Les deux parties ont officiellement soumis des demandes de rectification au CIRDI le 3 septembre, respectant ainsi le délai de 45 jours autorisé après la décision initiale.

Le recours de Corral Holdings repose sur l'argument que le Maroc est responsable de la faillite de la raffinerie en 2015, alléguant des manquements de la part de l'État marocain ayant conduit à des pertes colossales. En revanche, le Maroc défend sa position en affirmant que Corral, en tant qu’actionnaire majoritaire, n’a pas honoré ses engagements financiers pour maintenir SAMIR à flot, malgré des promesses de recapitalisation de l'entreprise.

Une Procédure de Rectification : Dernière Chance ou Simple Formalité ?

Les demandes de rectification soumises par les deux parties représentent leur dernière opportunité de contester des points de droit ou de fait perçus comme erronés. Le CIRDI permet en effet à chaque partie de solliciter une décision supplémentaire ou une rectification lorsque des erreurs matérielles, de calcul, ou des omissions sont identifiées dans la décision initiale.

Pour le gouvernement marocain, cette démarche est une tentative de réduire, voire d'annuler l'indemnité de 150 millions de dollars jugée excessive. De son côté, Corral Holdings espère renverser la décision initiale qui a rejeté l’essentiel de ses demandes d'indemnisation. La procédure de rectification pourrait cependant s'étendre sur plusieurs mois, laissant planer une incertitude prolongée sur le sort final de cette affaire.

Une Implication Stratégique pour le Maroc et son Secteur Énergétique

L'enjeu de cette affaire dépasse le simple cadre juridique. La fermeture de SAMIR, la seule raffinerie de pétrole du Maroc, a eu des répercussions profondes sur le secteur énergétique national et sur la confiance des investisseurs étrangers. La fermeture de cette raffinerie en août 2015, suite au non-paiement de ses dettes par Corral, a entraîné une dépendance accrue du Maroc aux importations de produits pétroliers raffinés, mettant en lumière la fragilité de sa sécurité énergétique.

Les experts suggèrent que le recours du Maroc pourrait réussir à obtenir une révision à la baisse de la sentence initiale, renforçant ainsi sa position dans ce conflit complexe. Toutefois, un maintien ou un alourdissement de l’indemnité aurait des conséquences financières significatives pour le gouvernement, déjà confronté à des défis budgétaires importants.

Quelles perspectives pour l’avenir ?

L'affaire SAMIR met en lumière les défis auxquels le Maroc doit faire face pour préserver sa souveraineté économique tout en attirant des investisseurs étrangers. La procédure de rectification devant le CIRDI constitue une nouvelle étape dans cette bataille juridique, mais elle soulève également des questions cruciales: le Maroc parviendra-t-il à faire valoir ses arguments et à limiter les répercussions financières? Corral Holdings réussira-t-il à convaincre le tribunal de réviser sa décision initiale en sa faveur?

Il est évident que ce conflit juridique reflète des enjeux stratégiques de taille pour le Maroc, tant au niveau économique que politique. À mesure que cette bataille s’éternise, elle soulève de nombreuses interrogations sur l'avenir de la politique énergétique du pays et sur sa capacité à gérer les relations avec les investisseurs étrangers.




Samedi 7 Septembre 2024