En apparence, le secteur informel au Maroc se porte bien. Il affiche une dynamique démographique soutenue avec 2,03 millions d’unités de production informelles (UPI) en 2023, en hausse de plus de 22 % depuis 2014. Mais cette croissance quantitative cache une réalité économique préoccupante : la contribution du secteur informel à la production nationale chute. De 15 % en 2014, elle est tombée à 10,9 % en 2023, selon les données du Haut-Commissariat au Plan. Pourquoi une telle contradiction entre expansion et recul économique relatif ?
D’abord, le tissu informel marocain se fragilise en se fragmentant. Le phénomène le plus marquant est la micro-structuration du secteur : près de 85,5 % des unités n’emploient qu’une seule personne, contre 74,9 % en 2014. Cela signifie que la majorité des UPI sont réduites à de simples activités de subsistance, sans croissance interne, sans emploi salarié et sans structuration commerciale. Cette atomisation empêche les effets d’échelle et limite la productivité globale du secteur.
Ensuite, la valeur ajoutée créée par le secteur informel, bien qu’en augmentation en valeur absolue (138,97 milliards de dirhams en 2023, contre 103,34 milliards en 2014), progresse à un rythme bien inférieur à celui de l’économie nationale. La croissance annuelle moyenne de la valeur ajoutée informelle (3,06 %) reste faible, surtout comparée à la montée des investissements publics et privés dans les secteurs formels. Ainsi, la part du secteur informel dans la valeur ajoutée nationale hors agriculture passe de 16,6 % à 13,6 % en une décennie.
Un autre élément clé est la concentration de la richesse informelle entre peu d’acteurs. Le rapport révèle que 20 % des unités les plus productives génèrent 65,4 % de la valeur ajoutée du secteur, laissant les 80 % restants dans une économie de faible rendement, souvent limitée à de la vente de proximité, du transport ou des travaux à bas coût. Cela signifie que la majorité des unités informelles stagnent ou régressent, et ne participent pas pleinement à la dynamique de croissance du pays.
Par ailleurs, l’intégration du secteur informel dans les circuits économiques formels reste limitée. Certes, les échanges avec le formel progressent : 33,7 % des approvisionnements en 2023 proviennent d’acteurs formels, contre 18,2 % en 2014. Mais cette ouverture reste marginale, et ne suffit pas à enclencher un cercle vertueux de formalisation ou d’augmentation de productivité. L’essentiel de la production informelle (79,5 %) reste destiné à la consommation directe des ménages, dans des chaînes de valeur courtes, à faible valeur ajoutée.
Enfin, l’absence d’investissement pèse lourdement. Le secteur informel fonctionne presque exclusivement en autofinancement (72,2 % à la création, 91 % pour le fonctionnement courant). Le recours au crédit bancaire reste anecdotique (moins de 1 %), ce qui empêche toute modernisation ou montée en gamme des activités.
Ce paradoxe marocain — croissance en volume, décroissance en impact — soulève une question cruciale pour les politiques publiques : faut-il continuer à tolérer un secteur informel qui ne fait que survivre, ou investir dans son accompagnement structurel ?
Une véritable stratégie de régulation, de soutien à la productivité et d’intégration progressive dans le tissu économique formel semble plus que jamais nécessaire. Sans quoi, le secteur informel risque de se fossiliser dans une logique d’auto-emploi inefficace, tout en continuant à absorber une part massive de la population active, sans réelle contribution à la transformation du pays.
D’abord, le tissu informel marocain se fragilise en se fragmentant. Le phénomène le plus marquant est la micro-structuration du secteur : près de 85,5 % des unités n’emploient qu’une seule personne, contre 74,9 % en 2014. Cela signifie que la majorité des UPI sont réduites à de simples activités de subsistance, sans croissance interne, sans emploi salarié et sans structuration commerciale. Cette atomisation empêche les effets d’échelle et limite la productivité globale du secteur.
Ensuite, la valeur ajoutée créée par le secteur informel, bien qu’en augmentation en valeur absolue (138,97 milliards de dirhams en 2023, contre 103,34 milliards en 2014), progresse à un rythme bien inférieur à celui de l’économie nationale. La croissance annuelle moyenne de la valeur ajoutée informelle (3,06 %) reste faible, surtout comparée à la montée des investissements publics et privés dans les secteurs formels. Ainsi, la part du secteur informel dans la valeur ajoutée nationale hors agriculture passe de 16,6 % à 13,6 % en une décennie.
Un autre élément clé est la concentration de la richesse informelle entre peu d’acteurs. Le rapport révèle que 20 % des unités les plus productives génèrent 65,4 % de la valeur ajoutée du secteur, laissant les 80 % restants dans une économie de faible rendement, souvent limitée à de la vente de proximité, du transport ou des travaux à bas coût. Cela signifie que la majorité des unités informelles stagnent ou régressent, et ne participent pas pleinement à la dynamique de croissance du pays.
Par ailleurs, l’intégration du secteur informel dans les circuits économiques formels reste limitée. Certes, les échanges avec le formel progressent : 33,7 % des approvisionnements en 2023 proviennent d’acteurs formels, contre 18,2 % en 2014. Mais cette ouverture reste marginale, et ne suffit pas à enclencher un cercle vertueux de formalisation ou d’augmentation de productivité. L’essentiel de la production informelle (79,5 %) reste destiné à la consommation directe des ménages, dans des chaînes de valeur courtes, à faible valeur ajoutée.
Enfin, l’absence d’investissement pèse lourdement. Le secteur informel fonctionne presque exclusivement en autofinancement (72,2 % à la création, 91 % pour le fonctionnement courant). Le recours au crédit bancaire reste anecdotique (moins de 1 %), ce qui empêche toute modernisation ou montée en gamme des activités.
Ce paradoxe marocain — croissance en volume, décroissance en impact — soulève une question cruciale pour les politiques publiques : faut-il continuer à tolérer un secteur informel qui ne fait que survivre, ou investir dans son accompagnement structurel ?
Une véritable stratégie de régulation, de soutien à la productivité et d’intégration progressive dans le tissu économique formel semble plus que jamais nécessaire. Sans quoi, le secteur informel risque de se fossiliser dans une logique d’auto-emploi inefficace, tout en continuant à absorber une part massive de la population active, sans réelle contribution à la transformation du pays.