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Marchica : Un chantier à la dérive malgré 26 milliards de dirhams


le Vendredi 11 Juillet 2025

Marchica, mégaprojet touristique à Nador, s'enlise dans les retards et blocages malgré un budget colossal de 26 milliards de dirhams. Pourquoi ce naufrage ?

Marchica, l’éveil d’un mirage
Un chantier à la dérive malgré 26 milliards de dirhams
Quand l’ambition urbanistique se heurte à la réalité marocaine



Mais que se passe-t-il réellement à Marchica ?

Marchica : Un chantier à la dérive malgré 26 milliards de dirhams
Il fut un temps où l’on murmurait que Marchica allait transformer la région de Nador en vitrine du développement durable au nord du Maroc. Une lagune réhabilitée, des infrastructures touristiques modernes, un littoral valorisé et une croissance locale dynamisée. Vingt-six milliards de dirhams plus tard, le rêve peine encore à sortir de terre. Et derrière les maquettes séduisantes et les slogans écoresponsables, c’est aujourd’hui la déception qui flotte sur les eaux calmes de la lagune.

Marchica : du rêve à la réalité d’un chantier à l’arrêt

Initiée il y a plus d’une décennie, l’Agence pour l’aménagement du site de la lagune de Marchica avait pour ambition de repositionner Nador sur l’échiquier touristique méditerranéen. En misant sur une approche durable alliant écologie, attractivité et développement économique — le projet promettait un avenir radieux à la province.

Mais sur le terrain, le constat est amer. Le boulevard du Pont, censé relier la ville à la zone balnéaire en longeant la lagune, est toujours en chantier. Le village d’Arkman, annoncé comme une nouvelle station éco-touristique modèle, reste inachevé, figé dans une éternelle attente. Quant à la corniche de Nador, elle présente l’aspect d’un chantier abandonné, où les promesses de promenade en bord de mer ne sont que souvenirs de conférences de presse.

Le silence des institutions, le bruit des rumeurs

Du côté des autorités, les réponses se font rares. À Nador comme à Rabat, les dossiers semblent s’être empilés dans des tiroirs poussiéreux. Quelques déclarations ponctuelles évoquent des "ajustements techniques" ou des "restructurations internes", sans jamais expliquer la réalité de la paralysie du projet.

Ce silence institutionnel laisse place aux rumeurs. Certains y voient une mauvaise gestion chronique, d’autres évoquent des conflits d’intérêts entre partenaires publics et privés. D’autres encore pointent du doigt un manque de volonté politique, dans une région souvent perçue comme périphérique au regard du pouvoir central.

Un coup dur pour la région de Nador

Pour les habitants de la région, l’immobilisme de Marchica n’est pas qu’un échec urbanistique : c’est une promesse de développement qui s’effondre. Les commerçants attendaient l’arrivée de touristes. Les jeunes espéraient des opportunités d’emploi. Les investisseurs tablaient sur une nouvelle dynamique régionale.

Or, rien de tout cela ne s’est produit. Ou du moins, pas à l’échelle attendue. L’impact socio-économique du projet est quasi nul. Et dans certains quartiers, la déception se transforme en colère sourde, nourrie par une impression d’abandon.

Un projet mal ancré dans son territoire ?

Le paradoxe, c’est que Marchica avait tout pour réussir. Une nature exceptionnelle, une localisation stratégique, un engouement initial réel. Mais peut-être a-t-on oublié une chose essentielle : l’ancrage territorial.

Les projets d’envergure ne peuvent pas se construire en vase clos, coupés des dynamiques sociales locales. À trop vouloir imposer un modèle “top-down”, on finit par perdre le lien avec le terrain. Et à Nador, ce lien semble bel et bien rompu.

Les associations locales, les professionnels du tourisme, les architectes de la région ou même les pêcheurs qui vivent au bord de la lagune : tous disent la même chose. Ils n’ont pas été suffisamment écoutés. Ils n’ont pas été impliqués.

Et maintenant, que faire de ce mirage à demi-construit ?

Il est peut-être encore temps de sauver Marchica, mais cela exigera un réexamen complet du projet. Il faudra repenser les priorités, clarifier les responsabilités, assainir les circuits de financement et, surtout, rétablir le dialogue avec les habitants.

Cela demandera aussi du courage politique. Car reconnaître l’échec partiel d’un projet aussi emblématique, c’est prendre un risque. Mais ne rien faire, c’est en prendre un bien plus grand : celui de banaliser l’échec comme norme.

Marchica ne devrait pas devenir un exemple de ce que le Maroc fait de mieux en matière de gaspillage d’opportunités. Elle pourrait encore incarner l’ambition marocaine de construire, durablement, avec et pour ses citoyens.

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Vendredi 11 Juillet 2025