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Maroc – Banque africaine de développement : ce que révèle vraiment la performance du portefeuille pays


Rédigé par Lycha Jaimssy MBELE le Mardi 23 Décembre 2025

Derrière les montants engagés et les projets affichés, la performance réelle des financements internationaux mérite d’être examinée sans fard. La dernière revue du portefeuille pays du Groupe de la Banque africaine de développement (BAD) consacrée au Maroc dresse un état des lieux nuancé : des avancées tangibles, mais aussi des lenteurs persistantes qui interrogent l’efficacité de l’action publique et la capacité d’absorption des projets structurants.



Maroc – Banque africaine de développement : ce que révèle vraiment la performance du portefeuille pays

Au moment de la revue, le portefeuille de la BAD au Maroc se caractérise par un volume conséquent d’opérations actives, couvrant des secteurs stratégiques tels que les infrastructures, l’énergie, l’eau, l’agriculture, ainsi que l’appui aux réformes de gouvernance et de développement social. Le document souligne que le Maroc demeure l’un des partenaires majeurs de la Banque en Afrique du Nord, avec un portefeuille aligné sur les priorités nationales de développement et les orientations du Nouveau Modèle de Développement.
 

Sur le plan strictement quantitatif, la performance globale du portefeuille est jugée satisfaisante, mais sans être exempte de fragilités. Le taux de décaissement, indicateur clé de l’efficacité de mise en œuvre, progresse de manière modérée, reflétant à la fois des améliorations dans la gestion de certains projets et des retards récurrents dans d’autres. Ces lenteurs sont principalement attribuées, selon la revue, à la complexité des procédures, aux délais de passation des marchés et à des capacités institutionnelles parfois inégales entre les acteurs impliqués.
 

Un point revient avec insistance : la maturité des projets en amont. Plusieurs opérations ont souffert d’une préparation insuffisante, entraînant des ajustements en cours d’exécution, des révisions de calendriers, voire des restructurations. « La qualité à l’entrée reste un déterminant central de la performance », note le rapport, qui appelle à renforcer les études préalables et la coordination interinstitutionnelle dès les phases initiales.
 

Pour autant, la revue ne se limite pas à un constat critique. Elle met en avant des résultats probants dans des secteurs jugés prioritaires pour la résilience économique et sociale du Royaume. Les projets liés à l’eau et à l’assainissement, à l’énergie renouvelable et à l’appui aux réformes sectorielles montrent des impacts mesurables, en cohérence avec les engagements du Maroc en matière de développement durable et de transition climatique. À titre d’exemple, l’intégration transversale du climat et de la durabilité est désormais mieux prise en compte dans la conception des opérations.
 

Le document insiste également sur la nécessité d’une appropriation renforcée par les parties nationales. La performance ne dépend pas uniquement des bailleurs, mais de la capacité des administrations et des maîtres d’ouvrage à piloter efficacement les projets, à anticiper les risques et à arbitrer rapidement. À ce titre, la BAD recommande un suivi plus rigoureux, des mécanismes de reporting simplifiés et un accompagnement ciblé des unités de gestion de projets.
 

En filigrane, cette revue pose une question centrale pour le débat public marocain : comment transformer des financements importants en résultats concrets, visibles et durables pour les citoyens ? La réponse passe moins par l’accumulation de projets que par une exigence accrue de qualité, de coordination et de responsabilité.


La performance du portefeuille pays de la Banque africaine de développement au Maroc n’est ni un échec ni un satisfecit automatique. Elle reflète un pays engagé dans des réformes profondes, mais encore confronté aux défis très concrets de l’exécution. Un rappel utile : en matière de développement, l’efficacité se joue souvent loin des annonces, dans la rigueur quotidienne de la mise en œuvre.





Mardi 23 Décembre 2025