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Maroc : le sociétal entre l’évolution et la révolution

A l’ordre du jour de 2022 : 3/ 3


Rédigé par La rédaction le Lundi 13 Décembre 2021



Comme promis, je me mouille encore dans ce monde ou l’incertitude est plus évidente…

Dr Samir Belahsen
Dr Samir Belahsen
J’avais cité dans ma  première chronique sur l’ordre du jour de 2022 six thèmes qui feraient partie de l’ordre du jour de 2022.

J’y avais traité les trois premiers ; dans la seconde, j’avais abordé les deux suivants en laissant le thème Maroc à la présente.
 
6- MAROC :
 
Même si le débat sur le sociétal a déjà commencé en 2021, je pense qu’en 2022 et dès la fin de la CAN, c’est le débat sur le sociétal qui prendra le dessus.


Il  faut rappeler que la dernière révision de la moudaouana remonte à  2004.

Dix sept ans après la société Marocaine a continué sa mutation, la société civile avec ses colorations idéologiques avait un peu calmé le jeu. Mais entre temps nous avons eu une nouvelle constitution.

Pendant les deux derniers quinquennats, les organisations féministes se limitaient à rappeler la nécessité d’adapter nos lois aux conventions internationales. Quelques communiqués à des dates anniversaires, sinon un militantisme timide. C’était plus la crainte de la régression qui régnait, un ami du PPS avait même affirmé quand son parti était au gouvernement que c’était grâce au PPS qu’il n’y avait pas de régression. Les avancées n’étaient pas et ne pouvaient pas être à l’ordre du jour. C’était en somme une sorte de blocage.
 
Après la cuisante défaite du PJD, la nouvelle majorité parait dans une situation inconfortable sur le sujet.

Les attentes de la société civile sont énormes, elles feraient bouger quelques pressions internationales. Certaines demandes dérangeraient même une partie de la coalition et donneraient au PJD l’occasion rêvée de rebondir.

C’est pourquoi, je pense que pour  la réussite d’un projet de modernisation du statut personnel, la méthode est importante.

La meilleure, me parait –il, serait d’aborder les thèmes de la réforme step by step…

Commencer par le plus consensuel aurait le mérite d’éviter le blocage global

Interdire le mariage des mineurs serait à mon sens moins conflictuel que l’héritage par exemple.
 
Le fameux article 20 du code qui fixe l’âge du mariage légal à 18 ans, mais qui accorde en même temps au  juge de famille le pouvoir d’autoriser des exceptions et d’autoriser le mariage en deçà de cet âge, à condition de motiver et justifier sa décision. Dans la pratique, les juges sont permissifs et autorisent facilement le mariage des mineurs. Il faudrait aussi mettre fin à ce «Toubout Zawjia», avec quoi on ruse pour contourner la procédure de l’article 16…

C’est à mon avis en commençant par les aberrations évidentes que l’on peut construire un climat de confiance qui permettrait des avancées réelles.

Il va sans dire que si on ne peut interdire ce qui est licite, on peut toujours imposer des conditions strictes et que si on ne peut autoriser l’illicite, on peut toujours décriminaliser ou du moins alléger les sanctions.

J’ai toujours pensé, par exemple, qu’il était plus simple de libérer le testament que de décréter l’égalité entre frères et sœurs dans l’héritage, la limite du tiers n’étant basée que sur un hadith dont le sens peut tolérer diverses interprétations.

En matière de statut personnel, la révolution n’est pas de mise, il vaut mieux assurer l’évolution que tomber dans le blocage.

Bien entendu, sur certaines questions il faudra compter sur l’ijtihad de nos Fouqahas. 
 
 
 ​Dr Samir Belahsen

 




Lundi 13 Décembre 2021