Selon la Direction générale de la météorologie (DGM), les températures observées depuis le début d’octobre affichent une anomalie moyenne de +3 à +5 °C par rapport aux normales saisonnières. Ce dérèglement est attribué à la persistence d’une masse d’air chaud venue du Sahara, combinée à un affaiblissement des vents atlantiques.

Résultat : des nuits étouffantes, un ensoleillement prolongé et un retard notable des premières pluies. Cette chaleur inhabituelle s’ajoute à une tendance observée depuis plusieurs années : le Maroc se réchauffe 1,5 fois plus vite que la moyenne mondiale, selon le ministère de la Transition énergétique.

Pour les agriculteurs, cette météo déstabilise les cycles naturels. Les semis d’automne sont retardés, la germination du blé est compromise par le manque d’humidité, et certaines cultures comme les agrumes et les oliviers subissent un stress hydrique accentué. Dans les zones du centre et du sud, les réserves en eau continuent de baisser, aggravant une situation déjà critique. Les barrages affichent un taux de remplissage moyen inférieur à 30 %, du jamais-vu à cette période.

Les autorités tentent de compenser en accélérant la mise en œuvre du Programme national d’approvisionnement en eau potable et d’irrigation 2020–2027, mais le défi reste immense. Les éleveurs, eux aussi, sont impactés. Les pâturages s’assèchent prématurément, forçant les éleveurs à acheter du fourrage, ce qui alourdit leurs coûts et menace leur rentabilité.

En milieu urbain, ces températures prolongées bouleversent le quotidien. Les habitants ressentent une fatigue accrue, liée à la chaleur persistante et à la mauvaise qualité de l’air. Les vagues de chaleur tardives augmentent les risques de déshydratation et de troubles cardiovasculaires, notamment chez les personnes âgées. Dans les grandes villes, la consommation d’électricité explose, conséquence directe d’une utilisation prolongée de la climatisation.

Ce phénomène met en lumière un paradoxe : alors que le Maroc cherche à réduire sa dépendance énergétique, le réchauffement climatique pousse à consommer davantage d’énergie pour se rafraîchir.

Les climatologues sont unanimes : ces anomalies ne sont plus des exceptions. Elles constituent un signal d’alerte sur la fréquence et l’intensité croissante des phénomènes extrêmes. Le Maroc, déjà exposé à la sécheresse et à la désertification, devra accélérer ses stratégies d’adaptation, en misant sur la gestion durable de l’eau, la diversification agricole et la transition énergétique.

Mais au-delà des politiques publiques, c’est l’ensemble des comportements individuels qu’il faudra repenser : réduction du gaspillage d’eau, consommation responsable, aménagements urbains plus verts.

Ce mois d’octobre, avec ses airs d’été interminable, marque peut-être le début d’une nouvelle normalité climatique. Le Maroc, à l’instar de nombreux pays du Sud, se retrouve en première ligne du dérèglement climatique mondial, contraint d’innover et de s’adapter plus vite que prévu.

L’automne 2025 restera sans doute comme un tournant climatique, où le pays a pris conscience que la lutte contre la chaleur ne se joue plus seulement dans les chiffres, mais dans la vie quotidienne, les champs et les foyers.