Chaque année, Mawazine sort le chéquier XXL pour faire venir des stars internationales : Mariah Carey, Shakira, Haifa Wahbi… On parle de cachets allant jusqu’à 7 millions de dirhams pour une seule prestation. En comparaison ? Des artistes marocains comme Zina Daoudia ou Tarik Batma tournent autour de 40.000 à 70.000 DH. Certains, comme Aymane Serhani, atteignent à peine les 400.000 DH — soit jusqu’à 100 fois moins que leurs homologues étrangers. Une claque pour la scène locale.
Mais ce n’est pas tout. Les stars mondiales montent sur la prestigieuse scène OLM Souissi, pendant que les chanteurs marocains sont relégués à Salé, Nahda ou des scènes peu médiatisées. Pour beaucoup, c’est le signe d’une hiérarchie culturelle injuste, où l’international est roi et le national invisible.
Le hashtag #BoycottMawazine refait surface avec force. Les critiques dénoncent un événement financé en partie par de l’argent public, dans un pays où les écoles rurales manquent de bancs, les hôpitaux de personnel, et les jeunes d’opportunités.
Des artistes marocains eux-mêmes commencent à hausser le ton, évoquant un système qui « glorifie les étrangers » mais oublie ses propres talents. L’ambiance festive masque mal un sentiment d’injustice qui monte chaque année un peu plus.
Les organisateurs se défendent avec des chiffres : 3.000 emplois directs, des hôtels pleins à 100 %, des retombées économiques à +22 % pour Rabat. Mais sur le terrain, ces bénéfices restent concentrés dans le temps et l’espace. Et surtout, ils ne profitent pas aux artistes marocains sur le long terme.
Pas d’écoles de musique, pas de tournées locales, pas de dynamique pérenne pour la scène artistique nationale. Juste un feu d’artifice de dix jours… puis rideau.
Mawazine continue, les foules sont là. Mais derrière l’enthousiasme, la contestation enfle. Les jeunes, les artistes, les citoyens veulent un événement plus juste, plus équilibré, plus marocain dans l’âme.
Reste à savoir si l’édition 2025 sera le point de bascule. Vers un festival qui ne brille pas seulement par ses stars étrangères, mais aussi par ses racines locales. La balle est dans le camp des organisateurs.
Ce que reflète Mawazine, c’est l’image d’un Maroc moderne, ouvert, cosmopolite. Une ambition noble… mais qui ne peut ignorer sa propre culture. Le problème n’est pas de faire venir des stars, mais d’oublier les siennes. Un festival soutenu par l’État doit aussi être un moteur d’inclusion et de valorisation des talents marocains.