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Mondial, la mère patrie et les mères tout court


Voilà, on jouera finalement les sept matchs d’un Mondial, comme cela est donné aux quatre meilleures équipes du monde ! Le Maroc sera champion, vice-champion, 3ème ou 4ème, dans la plus importante compétition sportive de la planète. Et cela est dû à une vingtaine de jeunes hommes, talentueux, engagés, sympathiques, niyalistes…



Par Aziz Boucetta

Talentueux car ils sont parvenus à faire ce que personne n’aurait prévu voici seulement deux semaines. Engagés car ils ont fait montre d’une puissance et d’une extraordinaire régularité et d’une admirable ténacité dans toutes les rencontres, concentrés de la première à la dernière seconde de tous les matchs. Sympathiques comme le montre ce baiser collé furtivement par un défenseur marocain sur le crâne de ce joueur portugais qui a raté son coup de tête vers les filets marocains… et comme le montre aussi cette splendide remarque du toujours souriant gardien Bounou (« b9ina m9assrine htta wselna demi-finale … « on s’est bien amusé jusqu’à nous être retrouvé en demi-finale » ). Niyalistes car ils ont réussi à déjouer tous les pronostics et scénarios nihilistes.

Dans cette compétition, les uns et les autres ont montré leur culture, affichéleur combat, « les droits de l’Homme » pour les Français et autres, les droits LGBT pour les Allemands et autres, mais l’amour et la reconnaissance à l’endroit de leurs parents pour les Marocains. Et cela a fait le tour du monde et cette culture a dépassé les autres postures.

Mais ce qui a le plus frappé les esprits est l’attachement de ces joueurs, de ces battants, à leurs mères. Hakimi, En-Nseyri ou encore Regragui… tous se précipitaient dès la fin des matchs vers leurs mères, les enlaçaient, les embrassaient, les caressaient… jusqu’à cette séquence de Boufal avec la sienne de maman, dansant avec elle sur la pelouse, lui tenant tendrement les mains, lui souriant, lui ajustant son foulard… Une séquence émouvante de ce géant avec celle qui lui a tout donné, qui a tout sacrifié pour faire de lui le champion adulé par tout un peuple qu’il est devenu.

Ces images ont fait le tour du monde, l’expression de l’amour et de la reconnaissance, du bonheur et de la bonne humeur, de l’émotion et de la dévotion. Et ces images doivent nous rappeler le sacerdoce, le calvaire qu’ont connu ces mères, toutes les mères de nos footballeurs, mais aussi de tous ceux, de toutes celle qui ont un jour brillé dans leurs pays d’accueil, devenus leurs pays d’adoption, devenus leurs pays tout court, mais sans oublier leurs origines, le pays de leurs racines. Ces gens sont tous devenus Français, Espagnols, Italiens, Bataves, Belges, Allemands, Américains ou Canadiens, mais leurs mères, leurs pères, partis jadis dans les conditions que l’on sait leur ont appris et inculqué... l’amour de leur pays d’origine, le Maroc.


On l’avait oublié, mais le Maroc reste leur pays de cœur, et ce n’est pas parce que c’est le Mondial et la gloire planétaire que ces sentiments ne sont pas aussi ceux des autres enfants de l’émigration (ou de l’immigration) qui ont réussi. Avocats ou médecins, entrepreneurs ou professeurs, techniciens ou ministres… Tous ces Marocains d’origine sont restés Marocains par le cœur et l’esprit, autant qu’ils sont devenus citoyens loyaux et fidèles à leurs nations d’adoption.

Et cela est le fruit du labeur, toujours difficile, souvent extrême de ces parents, partis de rien et arrivés à tout donner à leurs enfants. Qu’il est beau ce sourire radieux de Mme Boufal avec son grand garçon ! Qu’il est émouvant ce sanglot du père En-Nseyri après le but stratosphérique de son rejeton ! Qu’il est poignant ce geste de Mme Regragui entourant de ses mains le crâne d’avocat de son fils ! Qu’ils doivent être attendrissants, ces signes d’amour et de bonheur de tous ces parents voyant le résultat de leurs efforts, admirant le produit de leurs sacrifices, qui ne sont certes pas passés à la postérité mais qui resteront gravés dans les cœurs pour l’éternité ! Pourquoi les autres joueurs des autres pays portés aux nues ne réagissent-ils pas de la sorte ? Question de culture. Mais les nôtres sont ainsi, témoignant silencieusement, mais par le fait, par l’acte, par le geste, de leur éternelle reconnaissance à leurs mamans, leurs papas. Et c’est splendide ! Face à cela, un silence de respect, le cœur chavirant à la vue de ce bonheur.

Et à côté de cela, de l’indicible joie de ces parents comblés, l’immense et incommensurable joie de tout un peuple, de la mère patrie qui a donné naissance à ces mères courages, à ces mères tout court. Les officiels n’ont pas – encore – donné leurs voix électorales à ces gens qui ont donné une voix à tout un peuple parmi les peuples du monde, ces gens qu’on appelle communément et officiellement les MRE, les Marocains du monde qui, l’espace d’un Mondial, avec leurs collègues locaux, ont apporté joie, fierté, bonheur et assurance aux Marocains, tous les Marocains, en plus des Arabes, des Africains et de tous gens de bien dans ce monde. Nul n’est prophète en son pays, dit-on, mais ça peut changer.

Quand tout sera fini, quand tout sera passé, quand, avec En-Nseyri, nous redescendrons sur terre, il sera temps de rendre grâce à ces mères courage et il sera temps pour la mère patrie de penser à tous ses enfants qui n'apportent pas seulement que de l'argent, mais aussi et surtout de la joie, du bonheur et de la fierté !

Aziz Boucetta



Lundi 12 Décembre 2022