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Piété filiale




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Par Elmontacir Bensaid

Piété filiale
Il y a 4 ans jour pour jour j'ai enterré ma mère et aujourd'hui je suis allé fleurir sa tombe.

J'ai fait enlever les herbes folles qui envahissaient sa sépulture, puis je l'ai lavée à l'eau de fleurs d'oranger, sachant à quelle point maman était coquette et ne tolérait pas le désordre. 

Après avoir récité quelques versets du coran sans pouvoir retenir mes larmes, j'ai  pris un moment pour penser à cette femme extraordinaire, mariée à 14 ans, veuve à 37 ans, mère de 7 enfants, qui a perdu un mari aimant emporté par un terrible cancer au milieu de la quarantaine. 

Vers la fin de sa vie je lui disais maman tu n'as jamais bu d'alcool ni fumé, prends avec moi un cigarillo, qu'est ce qui peut t'arriver ?Faisons la fête !

Elle esquissait un sourire de petite fille dans son visage emacié, sous un regard qui était déjà ailleurs.

Elle me faisait comprendre qu'elle voulait prier puis me murmurait qu'elle ne se rappelait pas à quel moment elle devait se prosterner alors je lui disais qu'on allait s'asseoir côte à côte et que je lui tiendrais la main et que chaque fois que je la lui serrerais  elle devrait se prosterner.
 
Je retenais mes larmes et pleurais plus tard dans ma voiture devant une telle déchéance. 

Chaque fois que je venais la voir, quelques jours avant son décès, alors qu'elle ne parlait plus, ne mangeait plus, ses yeux me cherchaient et semblaient appeler au secours.

Et j'étais impuissant et j'etais désespéré. 

Elle avait un placard toujours verrouillé nous étions curieux de savoir ce qu'il y avait dedans.

C'était aussi son coffre fort et les rares fois où elle l'ouvrait, il en emanait un mélange de musc et de parfum, l'odeur de ma mère. 

La porte à peine entrebaillée se refermait vite à notre grand désespoir.

Le fils ingrat que j'étais ne s'imaginait  pas qu'à sa disparition il allait  trouver une boîte dans laquelle cette femme, qui ne savait ni lire ni écrire  le français ,avait conservé toutes les lettres qu'il lui avait envoyée alors que 'il était étudiant à Paris, Bruxelles, à Aarhus au Danemark.

Elles étaient comme neuves avec leur enveloppe et leur timbre.

Des lettres vieilles de plus de 30 ans

Toutes commençaient invariablement par:

Chère maman.

4 ans après sa disparition je ne suis pas arrivé à les relire.

Que Dieu l'ait en sa sainte miséricorde. 

Allah yerhamha.

Rédigé par El Montacir Bensaid.


Lundi 3 Avril 2023