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Une voix palestinienne brouille la rhétorique du Polisario
Dans un hémicycle européen saturé de slogans, l’intervention de Rima Hassan, eurodéputée française d’origine palestinienne, a résonné comme une lame froide: refuser l’amalgame entre la lutte palestinienne et le différend du Sahara occidental (Marocain). En s’attaquant à une rhétorique rodée depuis des décennies par le Polisario et ses soutiens, au premier rang desquels Alger, elle a retiré au front séparatiste un levier symbolique: l’emprunt d’une cause perçue comme celle d’un peuple sous occupation.
Depuis des années, le Polisario inscrit sa narration dans la fresque anticoloniale pour fédérer campus, ONG et gauche altermondialiste. Répéter le parallélisme avec la Palestine, c’était chercher un raccourci moral: si l’un est légitime, l’autre le serait par analogie. Cette stratégie, efficace dans certains forums, trouve ses limites lorsqu’une voix liée à la question palestinienne en souligne l’inexactitude politique et juridique.
Les contextes diffèrent profondément. La question palestinienne s’articule autour de résolutions onusiennes sur l’occupation, les frontières de 1967, Jérusalem et le droit au retour, avec un consensus diplomatique sur la solution à deux États, encore inaboutie. Le dossier du Sahara occidental évolue dans un cadre de “processus politique” où, depuis 2007, les propositions d’autonomie du Maroc sont décrites par plusieurs capitales comme “sérieuses et crédibles”, tandis que l’option référendaire s’est enlisée.
En rappelant ces distinctions, l’intervention de Rima Hassan agit comme un contre‑champ : elle remet la focale sur la matérialité des cadres juridiques plutôt que sur l’émotion transversale des causes. Sa posture illustre une maturité critique croissante dans une partie du débat européen, soucieuse d’éviter l’importation automatique de matrices militantes d’un dossier à l’autre. Elle marque aussi une étape symbolique: une voix issue de la diaspora palestinienne refuse que la légitimité de sa propre lutte serve d’outil rhétorique externalisé.
Pour Alger et le Polisario, la perte de ce miroir discursif complique l’effort de mobilisation dans certains cercles. Le capital empathique international n’est pas illimité; chaque cause tente de capter attention, dons, couverture médiatique. Être débranché d’un récit comparatif puissant oblige à réaffirmer sa singularité ou à raffiner d’autres leviers—droits humains, développement régional, gestion des ressources naturelles—sur lesquels les narrations concurrentes du Maroc et du front séparatiste s’affrontent déjà intensément.
Reste à mesurer l’écho concret de cette mise au point hors des enceintes politiques. Les soutiens du Polisario pourraient tenter de relativiser l’intervention en l’inscrivant dans un supposé réalignement géopolitique européen. Inversement, Rabat n’hésitera pas à capitaliser symboliquement sur ce rejet de l’analogie pour renforcer son plaidoyer d’une lecture distincte, centrée sur l’autonomie comme compromis pragmatique. Entre communication et diplomatie, chaque camp sait que le champ lexical façonne la perception anticipant les décisions.
Au-delà de l’instant polémique, un enjeu plus large surgit : réapprendre à différencier les cartographies des conflits sans dégrader la solidarité internationale. La force d’une cause juste ne réside pas dans la dilution analogique mais dans la précision. En ce sens, la parole de Rima Hassan n’est pas un alignement diplomatique; elle est un rappel méthodologique.
Dans un espace public saturé, la clarté devient un acte politique. C’est ce qui, ici, a fissuré une routine narrative.
Depuis des années, le Polisario inscrit sa narration dans la fresque anticoloniale pour fédérer campus, ONG et gauche altermondialiste. Répéter le parallélisme avec la Palestine, c’était chercher un raccourci moral: si l’un est légitime, l’autre le serait par analogie. Cette stratégie, efficace dans certains forums, trouve ses limites lorsqu’une voix liée à la question palestinienne en souligne l’inexactitude politique et juridique.
Les contextes diffèrent profondément. La question palestinienne s’articule autour de résolutions onusiennes sur l’occupation, les frontières de 1967, Jérusalem et le droit au retour, avec un consensus diplomatique sur la solution à deux États, encore inaboutie. Le dossier du Sahara occidental évolue dans un cadre de “processus politique” où, depuis 2007, les propositions d’autonomie du Maroc sont décrites par plusieurs capitales comme “sérieuses et crédibles”, tandis que l’option référendaire s’est enlisée.
En rappelant ces distinctions, l’intervention de Rima Hassan agit comme un contre‑champ : elle remet la focale sur la matérialité des cadres juridiques plutôt que sur l’émotion transversale des causes. Sa posture illustre une maturité critique croissante dans une partie du débat européen, soucieuse d’éviter l’importation automatique de matrices militantes d’un dossier à l’autre. Elle marque aussi une étape symbolique: une voix issue de la diaspora palestinienne refuse que la légitimité de sa propre lutte serve d’outil rhétorique externalisé.
Pour Alger et le Polisario, la perte de ce miroir discursif complique l’effort de mobilisation dans certains cercles. Le capital empathique international n’est pas illimité; chaque cause tente de capter attention, dons, couverture médiatique. Être débranché d’un récit comparatif puissant oblige à réaffirmer sa singularité ou à raffiner d’autres leviers—droits humains, développement régional, gestion des ressources naturelles—sur lesquels les narrations concurrentes du Maroc et du front séparatiste s’affrontent déjà intensément.
Reste à mesurer l’écho concret de cette mise au point hors des enceintes politiques. Les soutiens du Polisario pourraient tenter de relativiser l’intervention en l’inscrivant dans un supposé réalignement géopolitique européen. Inversement, Rabat n’hésitera pas à capitaliser symboliquement sur ce rejet de l’analogie pour renforcer son plaidoyer d’une lecture distincte, centrée sur l’autonomie comme compromis pragmatique. Entre communication et diplomatie, chaque camp sait que le champ lexical façonne la perception anticipant les décisions.
Au-delà de l’instant polémique, un enjeu plus large surgit : réapprendre à différencier les cartographies des conflits sans dégrader la solidarité internationale. La force d’une cause juste ne réside pas dans la dilution analogique mais dans la précision. En ce sens, la parole de Rima Hassan n’est pas un alignement diplomatique; elle est un rappel méthodologique.
Dans un espace public saturé, la clarté devient un acte politique. C’est ce qui, ici, a fissuré une routine narrative.



