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Quotient électoral et quotient intellectuel




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Quotient électoral et quotient intellectuel

Et finalement, les députés de la commission de l’Intérieur de la Chambre des représentants ont voté l’amendement instaurant le quotient électoral sur la base des inscrits. Le Maroc peut être fier de lui, car mieux que pour les vaccins où nous nous situons dans les premiers au monde, pour cette innovation, nous sommes le seul pays au monde à l’avoir fait.
 

Quand le Maroc veut, le Maroc peut, il l’a déjà prouvé et il le prouve encore. Et puisqu’il a décidé de basculer en démocratie pure et parfaite, il innove à tour de bras, jamais à court d’arguments. Ainsi, avec cette fantastique avancée dans le mode de calcul du quotient électoral, les abstentionnistes s’exprimeront quand même, sans même avoir besoin de les déranger ou de les forcer par une quelconque obligation légale, forcément liberticide. Désormais, ils figureront dans le décompte des voix sans même qu’ils se déplacent. Quant aux personnes inscrites et décédées entre la clôture des inscriptions et le jour du scrutin, la loi leur donne une chance de ressusciter…
 

Bon, on a compris, cette méthode de calcul du quotient n’est pas la meilleure trouvaille de nos législateurs, chouiya paniqués à l’idée de voir le PJD voguer vers un troisième mandat à la tête du gouvernement. Mais, en dépit de cette « innovation blâmable », ou invention peu louable, le PJD a de solides chances de figurer en pole position à l’élection, si bien évidemment elle se tient cette année… Les autres partis, parties du quarteron de tête, sont un peu hors course, hors-jeu, hors-sol… Le parti de l’Istiqlal a un problème de gouvernance, le PAM un problème existentiel et le RNI est en lui-même un problème. Il est valablement permis de s’interroger sur le quotient intellectuel moyen dans nos partis…
 

Lors de la commission qui a largement approuvé l’amendement, le ministre de l’Intérieur Abdelouafi Laftit a exprimé son rejet du nouveau mode de calcul. Il est technocrate mais discipliné, et il s’est aligné sur la position du gouvernement. Les autres, RNI, MP, USFP et la petite UC, ont techniquement et moralement explosé la majorité. Mais ils ont des chances de rectifier le tir avec les nombreuses étapes législatives qui restent, vote en plénière de la 1ère Chambre, commission et plénière de la 2nde, retour à la 1ère si amendement de la 2nde, secrétariat général du gouvernement et Cour constitutionnelle… « N'y a-t-il pas parmi vous un homme raisonnable ? »… Il devrait y en avoir, il faut qu’il y en ait, gageons qu’il y en ait, un homme ou une femme raisonnable…
 

Dans le cas contraire, comment s’assurer d’un taux de participation convenable ? Le PJD, qui a voté contre l’amendement, a un boulevard devant lui pour jouer le rôle qu’il affectionne le plus, celui de la victime… Ses chefs, sous-chefs et sans grade iront se répandre dans les mornes plaines et autres zones urbaines pour dire et maudire cet amendement. Il vaincra.
 

Quant à notre sacro-sainte image à l’extérieur, elle sera réhaussée par le fou rire planétaire que nous offrirons à un monde tétanisé par la crise Covid et qui a tant besoin de rire aux larmes… Mais une fois le rire estompé et les larmes séchées, ce Maroc qui aspire à l’émergence et à bien tenir son rôle tout nouveau de puissance régionale, prend le risque de ruiner cette belle image et de donner des armes à ses (de plus en plus) nombreux adversaires.
 

Nous sommes une monarchie séculaire avec une histoire exemplaire, une société solidaire et une économie de plus en plus prospère… mais nous sommes affligés d’une classe politique délétère, et nous méritons mieux. Formons le vœu que nos juristes du Secrétariat général du gouvernement et de la Cour constitutionnelle remettent le pays sur le bon rail moral, éthique et juridique.
 

Rédigé par Aziz Boucetta sur https://panorapost.com




Jeudi 4 Mars 2021