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Rab’Africa, capitale où le rap tutoie le chaâbi


le Mardi 19 Août 2025



Une affluence record qui consacre Rab’Africa comme vitrine culturelle du Maroc

Rab’Africa, capitale où le rap tutoie le chaâbi
Du 8 au 17 août, Rabat a vibré au rythme de la 4ᵉ édition du Rab’Africa Festival, placé sous le Haut Patronage de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu L’assiste, et organisé par le ministère de la Jeunesse, de la Culture et de la Communication. Cette édition a enregistré des chiffres de fréquentation record, avec plus de 900 000 spectateurs, transformant la capitale marocaine en carrefour des musiques populaires, urbaines et patrimoniales sur les rives du Bouregreg.

Dans ce décor grandiose, la ville classée au patrimoine mondial de l’UNESCO conjugua héritage et modernité : de Nass El Ghiwane à Stormy, du chaâbi fédérateur de Hajib aux pulsations gnaoua de Hamid El Kasri, chaque soirée a dessiné un fil narratif unique. Plus qu’un festival, Rab’Africa s’impose désormais comme une vitrine du soft power marocain, fédérant générations et diasporas autour d’une identité culturelle vivante et résolument ouverte sur l’Afrique.

Au cœur de cette dynamique, un basculement s’est imposé comme l’événement majeur de l’édition : l’intronisation du rap comme colonne vertébrale de la scène marocaine. Jadis contesté, réduit à un bruit de périphérie, il a conquis la scène centrale avec une puissance irréversible.

La preuve éclatante en fut donnée le huitième soir : un record de 150 000 spectateurs rassemblés, corps serrés, bras levés, cris jetés dans la nuit. Stormy, 7ari et leurs pairs ont transformé Rabat en immense agora. Leurs textes, tantôt rugueux, tantôt lucides, ont trouvé dans le festival une caisse de résonance inédite. Le rap n’a pas été toléré : il a été célébré. Et dans cette célébration, une génération entière a vu son langage devenir langue nationale.

Pour autant, Rab’Africa n’a pas sacrifié ses racines à la modernité. Le chaâbi, porté par Hajib lors d’une clôture d’anthologie, a montré sa vitalité intacte. Loin d’être un folklore muséifié, il s’est imposé comme ciment collectif. Les jeunes y ont puisé une énergie festive, les anciens, une mémoire vivante. Dans le chœur immense des spectateurs reprenant ses refrains, le chaâbi a prouvé qu’il reste ce socle de reconnaissance commune, une matrice où tout le monde se retrouve.

Cette capacité a conjugué  le passé et l’avenir fait du Rab’Africa bien plus qu’un simple rendez-vous musical : c’est un instrument de soft power. À travers des artistes comme Douzi, Xena ou Benny Adam, le Maroc projette une image moderne et influente, capable de parler le langage global tout en affirmant ses racines. Leurs sons voyagent sur les plateformes, leurs clips circulent dans les diasporas, leurs collaborations s’étendent à l’Afrique, à l’Europe et au-delà. Chaque performance devient ainsi un acte d’influence culturelle, une manière de faire rayonner un Maroc hybride, assumé et tourné vers l’avenir. La musique n’y est plus seulement un divertissement : elle devient diplomatie, transformant la scène en véritable vecteur stratégique.

Mais derrière cette réussite éclatante subsiste une ombre au tableau : les déchets. Chaque nuit, après les concerts, les équipes de nettoyage livraient un combat silencieux contre les traces laissées par le public. L’organisation, impeccable sur les plans logistique et sécuritaire, n’a pas suffi à conjurer ce déficit de civisme. Comme si la fête s’arrêtait aux décibels, laissant au lendemain le soin d’éponger les excès.

En définitive, si le rap a trouvé sa scène et le chaâbi son souffle, il appartient désormais au public de donner au festival sa maturité : faire du civisme le vrai rythme commun.

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Mardi 19 Août 2025