Airbnb, studios et spéculation douce : la capitale piégée entre attractivité et exclusion
Le cœur du problème tient à la convergence de trois dynamiques. D’abord, la rareté de l’offre immédiatement disponible dans les segments les plus recherchés (studios, petites surfaces bien situées, appartements rénovés proches des pôles administratifs et universitaires). Ensuite, la montée d’une logique d’optimisation des propriétaires qui arbitrent entre location longue durée et location courte durée via des plateformes comme Airbnb. Enfin, une redistribution de l’investissement vers des quartiers en développement (Orangeries et autres zones d’extension) qui joue le rôle de soupape, mais avec un décalage temporel : le cycle de production d’un logement est plus lent que le cycle d’évolution de la demande.
Le studio est devenu un actif tactique. Il capte la demande étudiante, les jeunes actifs, parfois des consultants de passage, et désormais une frange de “résidents hybrides” (télétravailleurs internationaux, employés d’organisations) prêts à payer un premium pour flexibilité et localisation. Résultat : tension sur les loyers, rendements brut affichés attractifs, ce qui attire davantage d’investisseurs. Ce micro‑cercle vertueux pour le capital est perçu comme un cercle vicieux par les ménages à revenus fixes. Là où Casablanca conserve encore un stock plus large et diversifié d’anciens appartements modulables, Rabat souffre d’un parc plus étroit et d’une rotation moins fluide.
Les anciens appartements, souvent moins optimisés thermiquement ou fonctionnellement, auraient pu constituer un segment abordable. Mais plusieurs propriétaires préfèrent vendre avant d’engager des travaux de mise aux normes ou de revalorisation énergétique, alimentant une offre de vente plutôt qu’une stabilisation locative. L’inflation des coûts de construction post‑pandémie (matériaux, main‑d’œuvre spécialisée), combinée à la remontée des taux de financement, renchérit les programmes neufs ; ceux‑ci sortent sur le marché avec des prix qui tirent vers le haut l’ensemble des anticipations.
La hausse ne concerne pas que le foncier : les biens de consommation, certains produits alimentaires et services urbains reflètent une chaîne logistique plus coûteuse et parfois une captation d’opportunité dans un contexte de demande solvable segmentée. L’écart de perception devient criant : une partie des résidents s’habitue à une nouvelle “normalité” des prix, tandis qu’une autre éprouve un décrochage subjectif, nourrissant frustration et soupçons de spéculation diffuse.
Le studio est devenu un actif tactique. Il capte la demande étudiante, les jeunes actifs, parfois des consultants de passage, et désormais une frange de “résidents hybrides” (télétravailleurs internationaux, employés d’organisations) prêts à payer un premium pour flexibilité et localisation. Résultat : tension sur les loyers, rendements brut affichés attractifs, ce qui attire davantage d’investisseurs. Ce micro‑cercle vertueux pour le capital est perçu comme un cercle vicieux par les ménages à revenus fixes. Là où Casablanca conserve encore un stock plus large et diversifié d’anciens appartements modulables, Rabat souffre d’un parc plus étroit et d’une rotation moins fluide.
Les anciens appartements, souvent moins optimisés thermiquement ou fonctionnellement, auraient pu constituer un segment abordable. Mais plusieurs propriétaires préfèrent vendre avant d’engager des travaux de mise aux normes ou de revalorisation énergétique, alimentant une offre de vente plutôt qu’une stabilisation locative. L’inflation des coûts de construction post‑pandémie (matériaux, main‑d’œuvre spécialisée), combinée à la remontée des taux de financement, renchérit les programmes neufs ; ceux‑ci sortent sur le marché avec des prix qui tirent vers le haut l’ensemble des anticipations.
La hausse ne concerne pas que le foncier : les biens de consommation, certains produits alimentaires et services urbains reflètent une chaîne logistique plus coûteuse et parfois une captation d’opportunité dans un contexte de demande solvable segmentée. L’écart de perception devient criant : une partie des résidents s’habitue à une nouvelle “normalité” des prix, tandis qu’une autre éprouve un décrochage subjectif, nourrissant frustration et soupçons de spéculation diffuse.
Rabat sous tension immobilière : quand la rareté alimente la flambée des prix
Faut‑il blâmer exclusivement les plateformes de location courte durée ? Leur effet n’est jamais unique mais multiplicateur : elles accélèrent une requalification de quartiers sans mécanismes compensatoires. L’absence de données publiques fines (taux d’occupation, répartition par type de bail, vacance) empêche un débat rationnel. Une transparence structurée permettrait de calibrer des outils proportionnés : quotas par micro‑zone, modulation fiscale incitant le retour d’une partie du parc vers la location longue, bonus de rénovation contre engagement locatif pluriannuel.
Parallèlement, la réponse ne peut pas être seulement restrictive. Il faut élargir l’entonnoir de l’offre : densification maîtrisée autour des futurs axes de transport, accélération des procédures d’autorisation, typologies plus flexibles (coliving encadré, surfaces modulaires), incitations à la reconversion d’immeubles sous‑occupés. L’accès à l’eau et aux infrastructures de base dans les zones périphériques en développement doit suivre, faute de quoi l’étalement produit une urbanisation inégale et des coûts sociaux futurs (mobilité, ségrégation fonctionnelle).
Rabat joue ici un jeu d’équilibre : conserver son attractivité administrative, diplomatique et culturelle tout en évitant une trajectoire “ville vitrine” déconnectée de son socle résidentiel.
La capitale a l’occasion de piloter une gouvernance du logement fondée sur l’intelligence des données, la différenciation spatiale des instruments et la priorisation de l’habitat accessible pour étudiants, jeunes actifs et familles émergentes. À défaut, la fracture symbolique – “une ville qui se modernise pour d’autres” – risque de s’ancrer, alimentant un récit de dépossession urbaine.
La flambée des prix n’est pas un destin ; c’est une équation à résoudre entre temporalité de l’offre, régulation fine des usages et innovation dans les modèles d’habitat. Le temps d’agir est celui d’aujourd’hui, avant que la normalisation de la tension ne devienne une rente difficile à déloger.
Parallèlement, la réponse ne peut pas être seulement restrictive. Il faut élargir l’entonnoir de l’offre : densification maîtrisée autour des futurs axes de transport, accélération des procédures d’autorisation, typologies plus flexibles (coliving encadré, surfaces modulaires), incitations à la reconversion d’immeubles sous‑occupés. L’accès à l’eau et aux infrastructures de base dans les zones périphériques en développement doit suivre, faute de quoi l’étalement produit une urbanisation inégale et des coûts sociaux futurs (mobilité, ségrégation fonctionnelle).
Rabat joue ici un jeu d’équilibre : conserver son attractivité administrative, diplomatique et culturelle tout en évitant une trajectoire “ville vitrine” déconnectée de son socle résidentiel.
La capitale a l’occasion de piloter une gouvernance du logement fondée sur l’intelligence des données, la différenciation spatiale des instruments et la priorisation de l’habitat accessible pour étudiants, jeunes actifs et familles émergentes. À défaut, la fracture symbolique – “une ville qui se modernise pour d’autres” – risque de s’ancrer, alimentant un récit de dépossession urbaine.
La flambée des prix n’est pas un destin ; c’est une équation à résoudre entre temporalité de l’offre, régulation fine des usages et innovation dans les modèles d’habitat. Le temps d’agir est celui d’aujourd’hui, avant que la normalisation de la tension ne devienne une rente difficile à déloger.


