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Santé mentale : une crise silencieuse qui hante les rues marocaines


Ils errent, souvent pieds nus, l’air hagard, dans les rues bondées comme dans les ruelles les plus isolées. Invisibles aux yeux de beaucoup, les personnes atteintes de troubles mentaux trouvent refuge dans la rue, exposées à tous les dangers. Une réalité alarmante que dénonce le bureau régional de l’Observatoire international des médias et des droits de l’Homme.



Santé mentale : une crise silencieuse qui hante les rues marocaines

Dans un communiqué officiel,  l’Observatoire alerte sur la présence croissante de personnes souffrant de troubles psychiques dans les espaces publics. Sans encadrement, ni soins, ni protection, ces individus – parfois inoffensifs, parfois involontairement agressifs – affrontent chaque jour les périls de la rue : circulation routière, malnutrition, violences, exploitation sexuelle, conditions de vie dégradantes

L’organisme met en lumière une triple menace : danger pour soi, pour les autres, et pour la dignité humaine. « Ces personnes vivent dans une détresse absolue, sans aucun accompagnement médical ou social », déplore-t-il. La nuit, elles dorment à même le sol, dans le froid. Le jour, elles errent sans but, maltraitées, ignorées, parfois violentées.

Dans ce contexte de désengagement, les femmes et les enfants souffrant de troubles mentaux apparaissent comme les plus vulnérables, notamment face aux risques d’exploitation sexuelle. Des cas de transferts forcés vers des villes éloignées ont même été signalés, témoignant d’une volonté d’éloignement plutôt que de prise en charge sérieuse.

L’Observatoire pointe la responsabilité des autorités dans cette crise humanitaire, aggravée par un manque criant d’infrastructures psychiatriques et de personnel spécialisé. Le projet de loi 13-71, censé moderniser le dahir de 1959 relatif à la santé mentale, a été abandonné en septembre 2023 après plus de sept ans d’inactivité. Un recul jugé inacceptable.

Parmi les recommandations avancées, l’Observatoire plaide pour une répartition équitable des structures psychiatriques à travers le pays, une amélioration des équipements médicaux, et une augmentation significative du nombre de professionnels en santé mentale. Il insiste aussi sur la nécessité de lutter contre les addictions, identifiées comme un facteur aggravant majeur, et de créer des centres d’accueil et d’écoute pour les malades et leurs familles, dans une démarche de prévention et d’inclusion.

L’organisme propose également la création de brigades d’intervention médico-sociales, composées de professionnels de santé, d’agents de sécurité, de pompiers et de représentants des autorités locales, afin d’assurer une prise en charge immédiate et digne des personnes errantes souffrant de troubles mentaux.

La réhabilitation de l’hôpital psychiatrique de Berrechid, jugé essentiel dans le dispositif national, et la construction de nouvelles structures interrégionales figurent aussi parmi les priorités urgentes.

Enfin, dans un esprit de solidarité et de respect des valeurs humanitaires du Maroc, l’Observatoire appelle à une prise en charge spécifique des migrants d’Afrique subsaharienne atteints de troubles mentaux, avec un suivi médical régulier et des soins adaptés à leur situation.


Observatoire international des médias et des droits de l’Homme, Santé mentale, Troubles mentaux


Mardi 20 Mai 2025



Rédigé par le Mardi 20 Mai 2025
Salma Labtar
Journaliste sportive et militante féministe, lauréate de l'ISIC. Dompteuse de mots, je jongle avec... En savoir plus sur cet auteur