Pression politique, sanctions et boycott : Shein dans la tourmente
Le décor est posé dans le Marais, quartier tendance où se mêlent touristes, créateurs et grandes maisons. L’arrivée de Shein a été perçue comme une provocation. Des professionnels dénoncent une concurrence déloyale face aux marques françaises, incapables de rivaliser avec des prix cassés et des méthodes de production opaques. Résultat : manifestations, slogans hostiles et boycott symbolique. Plusieurs enseignes partenaires du BHV ont même quitté les lieux, indignées par ce qu’elles considèrent comme une faute d’image.
Face à cette tempête, la Société des Grands Magasins, propriétaire du BHV, a dû calmer le jeu. Son président, Frédéric Merlin, annonce que les prochaines ouvertures prévues à Dijon, Reims, Grenoble, Angers et Limoges seront décalées. D’un ton mesuré, il parle d’ajustements “de quelques jours ou quelques semaines”. En réalité, c’est un signal clair : Shein n'a plus les mains libres.
Et ce n’est pas tout. Sur le terrain réglementaire, les ennuis s’accumulent. La DGCCRF a détecté sur le site de Shein des produits interdits — notamment des poupées déjà proscrites du marché. Le gouvernement français a activé une procédure de suspension des activités de la marque. Elle n’a été gelée qu’après le retrait des articles incriminés, in extremis.
Ce n’est pas la première fois que Shein se fait épingler. L’été dernier, l’entreprise avait écopé d’une amende de 40 millions d’euros pour pratiques commerciales irrégulières. Comme si cela ne suffisait pas, une pénalité supplémentaire d'un million d’euros lui a été infligée pour manquement à son obligation d’information environnementale.
Dans ce contexte, l’ouverture de la boutique parisienne prend des allures de test grandeur nature. Une première mondiale — et un crash-test. Le paradoxe est total : la marque qui cartonne sur TikTok et Instagram est à la fois adulée par les jeunes et honnie par les professionnels du textile.
La question reste ouverte : l’État français ira-t-il jusqu’à interdire des ouvertures ? Les autres enseignes vont-elles se rallier à la fronde ? Et surtout : malgré les polémiques, les jeunes consommateurs continueront-ils à cliquer et remplir leurs paniers ?