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T1 et T2 le Maroc relance son économie


Rédigé par le Vendredi 11 Juillet 2025

L’économie marocaine a progressé de +4,8 % au T1 et +4,6 % au T2 2025, portée par une demande intérieure vigoureuse. Mais les exportations ralentissent, et les risques extérieurs s'accumulent. Décryptage.



Hausse du PIB à 4,8 % au T1 et à 4,6 % au T2 2025, inflation contenue, investissement en rebond…

T1 et T2 le Maroc relance son économie
L’économie marocaine affiche un retour en forme, mais l’essoufflement des exportations et les incertitudes mondiales appellent à la prudence.

Le Maroc semble avoir retrouvé son souffle économique au début de l’année 2025. Porté par une demande intérieure vigoureuse, des investissements publics dynamiques et un retour de la croissance agricole, le pays a enregistré un taux de croissance du PIB de +4,8 % au premier trimestre et de +4,6 % au second. Ces performances marquent une nette accélération par rapport aux années précédentes, mais elles ne doivent pas faire oublier les risques qui pèsent sur le second semestre, notamment le ralentissement des exportations et les tensions commerciales à l’international.

Au cœur de cette reprise, on retrouve un moteur classique mais robuste : la demande intérieure. Celle-ci a contribué à hauteur de +8,5 points à la croissance du PIB au T1 2025 – un niveau jamais atteint depuis la phase post-Covid – avant de légèrement reculer à +7,7 points au T2.

La consommation des ménages a progressé de +4,4 % au T1 (contre +3,7 % au T4 2024), dopée par une amélioration de l’emploi salarié (+3,4 %) et par des mesures socio-fiscales favorables. Côté administration publique, la dépense a maintenu son rythme de croissance avec +5,2 % au T1, puis +5 % au T2.

Mais c’est surtout du côté de l’investissement que le redressement est spectaculaire : +17,5 % au T1 (après +12,3 % fin 2024). Cette dynamique provient d’un boom dans les infrastructures sportives, routières et hydrauliques, tandis que le secteur manufacturier reste plus timide. Les flux de crédits se sont également intensifiés dans les domaines de l’eau et de la construction.

Sur le plan sectoriel, les moteurs traditionnels ont retrouvé leur vigueur. Au premier trimestre 2025 :

L’agriculture, après une année difficile, a contribué largement à la croissance avec un rebond des productions céréalières, maraîchères et sucrières, particulièrement dans les zones irriguées. Sa croissance a été confirmée au T2 avec +4,7 %, malgré des conditions climatiques contrastées.

L’extractif affiche une performance solide : +6,7 % au T1, grâce notamment à une demande mondiale forte en phosphates, poussant les exportations de ce secteur à la hausse au T2.

Le secteur de la construction a crû de +6,3 % au T1 et +6,8 % au T2, tiré par les grands chantiers d’infrastructure.

Le tourisme et les industries chimiques signent des hausses remarquables de +9,7 % et +6,8 % respectivement.

Les services, moteur durable de l’économie marocaine, poursuivent leur montée en puissance, évoluant depuis 2022 à des rythmes supérieurs à ceux de la décennie 2010-2019.

Mais tout n’est pas aussi radieux. Le revers de la médaille vient de la demande extérieure. Elle a amputé la croissance de -3,8 points au T1 et -3,1 points au T2. Les exportations de biens et services, en net ralentissement (+2,2 % au T1 contre +9,8 % au T4 2024), peinent à suivre le rythme, notamment à cause du coup de frein de la zone euro. Dans le même temps, les importations bondissent de +9,8 %, tirées par la forte consommation de biens d’équipement et de produits de consommation.

Le solde extérieur dégradé pèse sur le financement global, qui s’est alourdi de 3 points de PIB au T1 comparativement à la même période de 2024, malgré une amélioration des recettes fiscales (+21,6 %).

Dans ce contexte de reprise, le Maroc a réussi un exploit rare : croître sans déclencher d’inflation. L’indice des prix à la consommation a ralenti à +0,8 % au T2 2025 (contre +2 % au T1), et l’inflation sous-jacente est descendue à +1,1 %, un plus bas depuis 2021. Les prix des denrées alimentaires ont été mieux maîtrisés (+1,4 %), notamment grâce à la baisse des prix des œufs, poissons, céréales transformées et légumineuses.

Les prix de l’énergie ont même connu un recul notable (-2,2 %), grâce à la détente sur les marchés mondiaux du pétrole et du gaz. Les services (+0,9 %) et les produits manufacturés (quasi-stabilité) ont aussi contribué à cette désinflation.

Côté monétaire, Bank Al-Maghrib a joué la carte de l’équilibre. Après avoir abaissé son taux directeur de 25 points de base au T1, elle l’a maintenu à 2,25 % au T2. Les taux d’intérêt du marché interbancaire ont suivi la tendance, avec un recul de 74 points de base en glissement annuel.

La masse monétaire a crû de +7,6 % au T2 (contre +8 % au T1), les réserves officielles de change se sont renforcées de +9,5 %, et le Trésor public a entamé un désendettement monétaire (-5,5 %). Parallèlement, le dirham s’est apprécié de +2,7 % face à l’euro et de +7,7 % face au dollar.

Le marché des actions a été l’un des grands bénéficiaires de ce contexte. L’indice MASI a grimpé de +37,6 % en glissement annuel au T2, après +36,5 % au trimestre précédent. La capitalisation boursière a suivi (+38,6 %), portée par la performance des secteurs de l’électricité, de la santé, du transport, des holdings, des mines et de l’immobilier. La liquidité du marché s’est accrue de +25 %.

Quelles perspectives pour la suite ?

Le HCP prévoit une croissance de +4,4 % au troisième trimestre 2025, avec une contribution intérieure de +6,6 points, contre une soustraction de -2,2 points pour la demande extérieure. La consommation et l’investissement devraient rester solides, mais les exportations continueront à souffrir du ralentissement économique mondial.

Les risques sont bien identifiés : nouvelles barrières commerciales américaines, essoufflement de l’Europe, éventuelle rechute de la production animale en cas de chaleur estivale excessive.

Mais des facteurs d’atténuation existent : relance du secteur agroalimentaire, vigueur du secteur chimique, et possibilité d’un pétrole sous les 70 dollars, qui allègerait la facture énergétique.

Le Maroc avance à pas sûrs, mais sur une crête étroite. Sa croissance repose désormais largement sur ses forces internes, avec une économie qui commence à mieux résister aux chocs exogènes. Reste à savoir si cette résilience pourra durer, surtout en cas de tempête mondiale. Ce qui est certain, c’est que la phase de consolidation est là, mais qu’elle devra être accompagnée d’une vigilance stratégique pour que le souffle retrouvé ne soit pas de courte durée.

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Vendredi 11 Juillet 2025