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Tourisme : Vendre le produit Maroc sans l’améliorer


Rédigé par le Vendredi 23 Avril 2021

Une grande campagne de promotion touristique de la destination Maroc est lancée à partir de la dernière semaine du mois d’avril. L’ambition de relancer les activités de ce secteur ne semble pas tenir compte des dysfonctionnements constatés.



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Jamaa Lefna, à Marrakech, vide de touristes
Jamaa Lefna, à Marrakech, vide de touristes
L’Office national marocain du tourisme (ONMT) s’est appuyé sur des études de marché pour segmenter la clientèle potentielle du produit Maroc en trois catégories. Une marque spécifique est dédiée à chacune d’entre elles.

‘Visitmorocco’ est la marque historique. Elle cible les visiteurs étrangers. ‘Ntla9awfbladna’ vise, pour sa part, les nationaux, locaux et expatriés. Enfin, la marque institutionnelle ONMT, qui s’adresse aux professionnels, marocains et étrangers.

Un recours plus prononcé à la communication digitale est programmé. Une présence accrue sur les réseaux sociaux est également prévue.

Aucun chiffre pour le financement de ladite campagne n’a été avancé, lors de la présentation de la stratégie marketing de l’ONMT, le 21 avril.

Difficultés ignorées

De premier abord, l’ONMT adopte une position proactive, aiguisant ses outils en préparation de l’après-pandémie.

En se référant au rapport du Conseil Economique, Social et Environnemental (CESE) publié en décembre 2020 sur le tourisme, certaines difficultés qui y sont relevées ne semblent pas avoir été prises en considération.

La pandémie du Covid a été une véritable catastrophe pour le secteur touristique à l’échelle internationale.

Sur les 1,4 milliards de touristes comptabilisés, en 2019, la chute enregistrée a été de 50%.

730 milliards de dollars ont été ainsi perdus.

Le tourisme malade du Covid

Au Maroc, la baisse constatée a été de l’ordre de 78,5% à fin 2020, en ce qui concerne le volume des arrivées de touristes.

Le nombre de nuitées dans les hôtels classés a régressé de 72,4%.

Ces chiffres de la Direction du trésor et des finances extérieures (ministère des finances) précisent que le recul a été de 92% pour les visiteurs étrangers et de 59% pour les MRE.

A titre de comparaison, l’année 2019 avait connu une hausse de 5,2% des arrivées et 5,1% des nuitées.


Triple concentration

Mais à en croire le rapport du CESE, résultat d’une autosaisie, le secteur du tourisme national souffre de quelques tares, dont on ne trouve nulle prise en considération dans la stratégie marketing de l’ONMT.

Le CESE a résumé ces difficultés en l’appellation de la problématique de la triple concentration.

Marrakech et Agadir concentrent 60% des nuitées dans les établissements hôteliers classés.

Les nouveaux pôles touristiques édifiés à grands frais n’attirent pas grand monde.

Les villes touristiques ont trop de lits et pas assez d’activités d’animation.

Déficit de notoriété

La France et l’Espagne sont les principaux marchés émetteurs vers la destination Maroc, avec 52% des arrivées de touristes étrangers.

Le produit Maroc ne convainc donc que les peuples qui le connaissent déjà bien.

Une étude d’impact des campagnes promotionnelles à coups de millions de dirhams confiées à des agences de communication internationales paraît ainsi justifiée.

La troisième concentration est temporelle. Les activités touristiques étant essentiellement saisonnières, elles ne permettent ni la stabilité de l’emploi et des revenus, ni une bonne rentabilité des investissements.

Gouvernance en question

Pour couronner le tout, le Conseil national du tourisme, qui doit assurer le suivi des stratégies élaborées pour la promotion de ce secteur d’activités n’a jamais vu le jour.

Ni les agences de développement touristiques chargées de l’implémentation territoriale desdites stratégies.

Le tourisme au Maroc, c’est 7% du Pib, 550.000 emplois, c'est-à-dire 5% de la population active, et 20% des exportations des biens et services.

Ce sont, également, 17 aéroports internationaux à 3 heures de vol des grandes capitales européennes et 7 heures de vol, en moyenne, des marchés américains et asiatiques.

Retour sur investissement

D’importants investissements ont été consentis dans le renforcement des réseaux routiers et ferroviaires pour rendre accessible les charmes naturels dont regorgent les régions du royaume.

Les Marocains sont naturellement hospitaliers, leur culture est riche et diversifiée et leur cuisine est succulente.

Mais il faut bien plus que de la communication pour faire du produit Maroc une destination courue.
 




Ahmed Naji
Journaliste par passion, donner du relief à l'information est mon chemin de croix. En savoir plus sur cet auteur
Vendredi 23 Avril 2021