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Ukraine, l’histoire se répète...


Que c’est triste et affligeant de voir les images de cette guerre… les hélicoptères qui lancent leurs projectiles et les chars qui balaient et écrasent tout sur leur passage, des morts, des blessés, des gens qui s’enfuient…



Par Aziz Boucetta

Ukraine, l’histoire se répète...
Que c’est triste et affligeant de voir les images de cette guerre… les hélicoptères qui lancent leurs projectiles et les chars qui balaient et écrasent tout sur leur passage, des morts, des blessés, des gens qui s’enfuient… On avait pensé être prémunis contre cela, à jamais, malgré les industries d’armement qui fleurissent et en dépit des pyromanes qui prospèrent. Mais constatons que les guerres mondiales ont eu pour théâtre l’Europe et que la grande bascule qui menace aujourd’hui le monde, aussi…

Constatons également que ces guerres trouvent leur origine, peu ou prou, dans des humiliations de peuples, d’Etats, de nations, de leaders qui, un jour, se soulèvent. En 1914, la petite Serbie, dominée par l’Empire austro-hongrois, s’est révoltée à travers le bras meurtrier du jeune Princip qui, en abattant le prince héritier François-Ferdinand, a déclenché la guerre par l’activation des jeux d’alliance entre Entente cordiale et Empires centraux.

Au lendemain de cette guerre, l’humiliation subie par les empires vaincus, accablés par la paix qu’ont dicté des vainqueurs revanchards, a favorisé l’émergence du nazisme… On connaît la suite.

En 1945, l’Allemagne est détruite, ses grandes villes rayées de la carte, son territoire démembré et la plupart de ses dirigeants survivants pendus haut et court par une justice des vainqueurs (il est vrai que les pendus étaient de solides criminels génocidaires).  Il n’est pas sûr que les Allemands et les Japonais (qui ont connu le même sort que leurs alliés allemands) n’en aient pas ressenti une profonde humiliation et gardé un ressentiment refoulé…

L’humiliation. Tel semble être le maître-mot pour expliquer les origines de ce conflit ukrainien qui vient d’éclater en plein cœur du Vieux Continent qui, malgré son grand âge, n’en est pas moins assagi. Dans les années 90, quand l’URSS s’effondre et que Fukuyama décrète la fin de l’Histoire, apparaissent les néo-conservateurs qui veulent façonner le monde à leur image et surtout à leur convenance. L’OTAN, qui n’a alors pourtant plus de raison d’exister, se renforce à l’inverse et recrute un nombre croissant de pays ci-devant communistes, s’approchant dangereusement de la Russie, dirigée par un poivrot nommé Eltsine... La Russie est livrée à la voracité occidentale, laquelle s’appuie sur les nouveaux apparatchiks russes.

Vingt ans après, la Chine (également piétinée, écrasée par les Européens au 19ème siècle), se réveille et, bien évidemment, le monde tremble. Mais au lieu d’attirer Moscou dans leur sphère, les occidentaux accentuent leur stratégie de containment de la Russie, tentant de faire tomber l’Ukraine dans l’escarcelle de l’OTAN mais ne réussissant qu’à jeter Vladimir dans les bras grands ouverts d’un Xi arborant son sourire éternel, les deux déroulant des discours rhétoriques effrayants car menaçants.

Ce qu’ont subi Chinois et Russes de la part d’un Occident inconséquent, ils l’ont connu pendant leur phase de faiblesse, économique, politique et militaire. Et ce que préparent Chinois et Russes à faire subir aux occidentaux intervient à un moment de baisse de régime de ces derniers, qui ne semblent pas le savoir ou le comprendre. Ils agitent la menace de sanctions dont ils n’ont pas les moyens, ils perdent du terrain partout dans le monde, après y avoir perdu leur âme.

Finalement, le syndrome européen évoque en quelque sorte celui de l’Afrique, avec ses luttes ethniques et/ou communautaires, culturelles et/ou religieuses ou même civilisationnelles. Les guerres qui ont secoué l’Europe des siècles durant se perpétuent aujourd’hui encore, avec des interférences communautaires et une éternelle question frontalière, jamais résolue.

S’y ajoute cet ingrédient typiquement européen de l’arrogance coupable du puissant du moment qui aspire à asservir, dominer, soumettre les plus faibles. Charles Quint, la Guerre de Cent ans, celle de Trente ans, Napoléon, et les autres… Les mêmes causes engendrent les mêmes effets, à la différence qu’aujourd’hui, les Américains sont au bord de l’implosion, l’Europe est considérablement affaiblie et d’autres pôles de puissance émergent.

Dans cette configuration potentiellement explosive, il appartient aux autres pays d’affiner leurs doctrines diplomatiques pour sortir de la logique consistant à choisir leur camp. Les plus intelligents parmi les « faibles » gagneraient à réfléchir à un équilibre de leurs alliances et à répartir leurs atouts dans cette polarisation géopolitique en formation.

Rédigé par Aziz Boucetta sur Panora Post


Samedi 26 Février 2022