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Une guerre faite pour durer


Rédigé par le Mercredi 4 Mai 2022

La guerre d’Ukraine fait moins la Une des médias et réseaux sociaux. Elle s’est embourbée, tels des chenilles de chars, dans les steppes ukrainiennes. Surtout qu’elle ne semble pas se dérouler selon les plans tracés par les états-majors des deux camps.



Une guerre faite pour durer
Les Ukrainiens avaient amassés et bunkerisés leurs meilleures troupes dans le Donbass, en vue de la confrontation armée. Les Russes les ont simplement débordés, dès le début de l’offensive fin février, par les deux ailes, au Nord vers Kharkiv et Kiev, et au Sud, vers Marioupol.

Les Russes s’imaginaient leurs bataillons groupements tactiques s’enfoncer comme du beurre dans les flancs du dispositif ukrainien, après une séance « choc et effroi » à coups de salves de missiles et d’obus et de pluies de bombes guidées.

Ils se sont retrouvés face à des soldats ukrainiens très motivés et bien formés par des encadrants de l’Otan, au cours des huit dernières années. Faute de pouvoir faire face au rouleau compresseur russe, les soldats ukrainiens ont adopté des tactiques asymétriques, tendant des embuscades aux blindés russes.

Mais c’est surtout dans les zones urbaines que les forces ukrainiennes parviennent à s’accrocher le mieux, à l’abri des populations civiles. Elles ne peuvent tout simplement pas affronter les forces russes en rase campagne.

Par la faim et par la soif

A Marioupol, déclarée par Poutine ville « libérée », persiste pourtant une poche de résistance, enterrée au complexe industriel d’Azovstal. Comme ce site comporte toute une infrastructure à plusieurs niveaux sous terre datant de l’ère soviétique ou se cachent les combattants ukrainiens, les Russes ne peuvent la prendre d’assaut sans essuyer de lourdes pertes.

Décision a donc été prise de laisser les soldats ukrainiens crever de faim et de soif jusqu’à ce qu’ils acceptent de se rendre. Les pourparlers pour permettre l’évacuation des occupants d’Azovstal ont jusqu’à présent échoué, car les Russes insistent pour filtrer les sortants, à la recherche des miliciens d’extrême-droite et d’éventuels combattants étrangers.

Les forces russes ont récemment annoncé la capture d’un général canadien à la retraite, Trevor Cadieu, justement à Marioupol, nouvelle non-démentie par Ottawa. Les médias canadiens s’étaient, cependant, déjà fait l’écho de sa présence sur le front contre la Russie, aux côtés des soldats ukrainiens.

Le guêpier de Marioupol

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A la mi-avril, il avait également été question de l’arrestation d’un général américain, Roger Cloutier, commandant des forces terrestres de l’Otan, mais l’information s’est avérée erronée.

Özgür Bursali, secrétaire général du parti turc Vatan, a toutefois déclaré à la presse de son pays, le 22 avril, qu’une cinquantaine d’officiers français avaient été abandonnés à leur sort à Marioupol par l’état-major de l’Elysée, puisqu’ils ne dépendaient pas de celui des armées.

Ce qui est certain, c’est qu’au moins deux britanniques et un danois ont trouvé la mort en se battant en Ukraine et deux autres sont actuellement entre les mains des Russes.

Du côté de ses derniers, la réputation des Tchétchènes a grimpé jusqu’au zénith auprès de l’opinion publique. L’état-major russe les a engagés dans la prise de Marioupol, en raison de leur expérience des combats en zone urbaine acquise sur leur propre territoire contre leurs compatriotes jihadistes.

« Allah Akbar » en russe

Alors que le cri de guerre des Tchéchènes, « Allah Akbar », a longtemps suscité la crainte et l’appréhension des Russes, suite aux deux guerres de Tchétchénie, il leur est devenu désormais agréable à entendre. Comme quoi se donner un ennemi commun crée un esprit de corps qui transcende les inimitiés.

La composition des troupes des deux belligérants ressemble à une mosaïque ethnique, mais leurs idéologies sont foncièrement opposées. Il s’agit d’une lutte à mort, dans une sorte de continuation de la 2ème guerre mondiale.

Les pays occidentaux sont parfaitement conscients que leurs sanctions économiques contre la Russie sont non seulement peu efficaces, mais aussi nocives pour l’Europe.

Voyant leurs protégés ukrainiens se faire laminer lentement mais sûrement par les forces russes, les Occidentaux ont estimé que la solution réside dans un doublement de la mise.


Faux semblants et véritables antiquités

De l’envoi de simples missiles antichars Milan et antiaériens Stinger, des vieilleries qui ne pèsent pas lourd dans une guerre moderne, les Occidentaux sont passés à celui d’armes lourdes, de systèmes d’artillerie, de blindés et d’avions de combat.

C’est là ou l’hypocrisie occidentale a atteint le comble. Il s’agit d’abord des vieux chars T72 et de Mig29, que les militaires ukrainiens savent utiliser. Mais aussi de matériel occidental, auxquels ils doivent d’abord être formés.

Le cas le plus comique est celui de ce que les médias occidentaux ont appelé le char allemand « Guépard », précisant que c’est la première fois que Berlin accepte de livrer pareil armement. Sauf que…

Le Guepard n’est d’abord pas un char, mais un système de défense antiaérien de courte portée monté sur un véhicule à chenilles, dont l’Allemagne ne produit pas les munitions.

Des lance-pierres sans cailloux

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Berlin aurait-elle pu s’imaginer un seul instant que la Suisse, ou sont fabriqués ces munitions, allait accepter qu’elles soient utilisées par l’Ukraine contre la Russie ?

Ce n’est pas fini. Le Guépard utilise deux radars, l’un d’acquisition de cibles, l’autre de conduite de tir. Il faut une année de formation pour qu’un équipage soit opérationnel. Car toute manipulation hasardeuse signalerait la position du radar à l’ennemi, qui le ferait taire d’un missile à domicile.

L’Ukraine devrait donc attendre une année avant de pouvoir utiliser les « chars » Guépard, et ce si elle arrive à trouver des munitions pour pouvoir les utiliser.

En fait, en ce qui concerne la formation des équipages ukrainiens, là encore il faut d’abord pouvoir dénicher suffisamment de militaires allemands qui sachent manipuler le Guépard, puisque ce système antiaérien archaïque avait été relégué par la Bundeswehr au débarras.

Dix de perdus, un de retrouvé

A moins que les Allemands n’aient l’intention de s’y prendre comme les Français. Paris a, en effet, offert de livrer des canons autotractés de 155mm Caesar à Kiev, et même de former 40 militaires ukrainiens pour les opérer.

Comme l’équipage d’un Caesar est composé de cinq personnes, cela fait donc à peine huit pièces d’artillerie. En raison de l’attrition des équipements sur le théâtre des opérations, si ces pièces d’artillerie française venaient à être engagées ensemble, elles seraient toutes détruites en moins d’une journée.

L’on assiste donc à une triste comédie jouée par les dirigeants des pays occidentaux pour faire croire à leurs opinions publiques qu’ils font quelque chose pour soutenir l’Ukraine dans son effort de guerre contre la Russie, alors que les bombardements aériens russes effectués sur l’infrastructure ferroviaire ukrainienne font que les aides envoyées ne peuvent même plus parvenir aux forces engagées sur le terrain.

L’entêtement jusqu’à l’annihilation

L’aviation militaire ukrainienne a été quasi-annihilée, la marine ukrainienne n’existe plus, une bonne part de l’artillerie, blindés, radars, batteries contre-aériennes de l’armée de Kiev a été détruite.

Les pertes humaines ukrainiennes sont énormes, les soldats professionnels tombés au combat sont difficiles à remplacer par des appelés.

Il n’existe plus de communication entre l’état-major ukrainien et ses troupes presque encerclées au Donbass et le soutien logistique est difficile sous un ciel contrôlé par l’aviation russe.

Les Ukrainiens n’ont aucune chance d’emporter cette guerre face aux Russes et les états-majors des pays occidentaux ne peuvent l’ignorer. Les médias occidentaux peuvent affirmer le contraire, mais la réalité du terrain fini toujours par s’imposer.

L’Ukraine seule dans la détresse

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Entretemps, l’Ukraine se vide de sa population (44 millions d’habitants). Plus de 5 millions de personnes ont déjà fui les combats dans leur pays.

Nombreux sont ceux parmi eux qui, réfugiés en Europe de l’Ouest ou en Amérique du Nord ou ils vont trouver un meilleur niveau de vie que chez eux, ne rentreront plus.

Déjà désindustrialisée par la mafia des oligarques, l’Ukraine va se retrouver, à la fin de la guerre, démolie et dépeuplée.

Les Ukrainiens n’auront plus que leurs yeux pour pleurer leurs illusions longtemps nourries par les promesses, non tenues, des Occidentaux.

Guerre hors limites

L’objectif de ces derniers semble se réduire à une volonté d’affaiblir la Russie, et ce en sacrifiant jusqu’au dernier Ukrainien. Et plonger, au passage, le reste de l’humanité dans une crise hyper-inflationniste et une série de pénuries.

La Chine aussi y participe, à sa manière. La saturation du port de Shangaï, le plus grand du monde, en raison du confinement décrété le 8 avril, met à nouveau sous forte pression les chaînes d’approvisionnement à l’échelle mondiale.

C’est ce qu’appellent les généraux Qiao Liang et Wang Xiangsui, auteurs du célèbre ouvrage « La guerre hors limite », les moyens non-militaires de faire la guerre.

Tout ceci fait penser que la « grande réinitialisation » si chère aux prêtres de Davos, entamée avec la pandémie du Covid, se poursuit avec la guerre en Ukraine. Jusqu’à ce que « vous ne posséderez rien et vous serez heureux », d’après l’angoissante formule de Klaus Schwab.

De toute évidence, la guerre en Ukraine ne s’arrêtera pas avant d’avoir noyé l’humanité dans une conception du « bonheur » dont elle se passerait très bien.




Ahmed Naji
Journaliste par passion, donner du relief à l'information est mon chemin de croix. En savoir plus sur cet auteur
Mercredi 4 Mai 2022