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Vers le flottement total: le dirham à l’aube de 2026


Rédigé par le Jeudi 4 Septembre 2025

Le Maroc s’achemine vers une libéralisation complète de son régime de change à l’horizon 2026, couronnant un processus graduel entamé par l’élargissement des bandes de fluctuation. Objectif: renforcer la résilience aux chocs et la capacité d’attraction des investissements.



Entre risque inflationniste et gain de compétitivité

Vers le flottement total: le dirham à l’aube de 2026
L’évolution du régime de change marocain ressemble à une partition écrite en nuances plutôt qu’en ruptures. Depuis l’introduction progressive d’une bande élargie autour du panier de référence, Bank Al-Maghrib teste la digestion par les acteurs économiques d’une volatilité plus assumée, tout en préservant les ancrages de confiance. L’annonce d’une libéralisation totale vers 2026 n’est ni un saut dans le vide ni une simple formalité: c’est l’aboutissement d’un calibrage technique où réserves de change, crédibilité institutionnelle et profondeur des marchés financiers interagissent.

Le cœur de la réforme tient en une promesse de flexibilité. En théorie, un dirham pleinement flottant absorbe mieux les chocs exogènes – variation des prix de l’énergie, cycles monétaires globaux – en laissant le taux s’ajuster plutôt que d’épuiser les réserves. Cette plasticité peut protéger l’activité exportatrice et faciliter la diversification sectorielle. Mais elle comporte un revers: le risque de transmission plus rapide des tensions externes aux prix domestiques, surtout si les anticipations d’inflation ne sont pas solidement ancrées. D’où l’importance d’une communication monétaire pédagogique qui rende intelligible la mécanique aux entreprises comme aux ménages.

La condition de réussite est triptyque. D’abord, la robustesse des fondamentaux: réserves suffisantes pour amortir des épisodes spéculatifs, déficit courant contenu, trajectoire budgétaire crédible. Ensuite, la maturation technique: existence d’acteurs capables de gérer activement l’exposition de change (couvertures, produits dérivés standardisés) sans dérive spéculative excessive. Enfin, la pédagogie: la volatilité ne doit pas être lue comme une crise. Construire une tolérance sociale à des oscillations quotidiennes exige un discours aligné entre banque centrale, ministère des Finances et régulateurs.

L’impact structurel pourrait être puissant pour l’investissement direct étranger. Un régime flexible clarifie le prix du risque, réduit l’anticipation de réajustements administrés brusques et signale une volonté d’intégration financière plus poussée. Pour les exportateurs, la discipline devient plus marquée: gains de change potentiels mais nécessité d’améliorer productivité et sophistication de l’offre pour résister à un cycle d’appréciation éventuelle.

Du côté bancaire, la transition imposera un renforcement des capacités de gestion de trésorerie et de couverture. Les PME, souvent peu outillées, représentent le maillon fragile: sans accompagnement, elles pourraient subir les variations au lieu de les gérer. Programmes de formation, plateformes d’information en temps quasi réel et incitations à l’usage d’instruments de couverture standard seront des amortisseurs essentiels.

Regard extérieur, la trajectoire marocaine s’inscrit dans un mouvement observé chez des économies émergentes cherchant à concilier ouverture et stabilité macroprudente. Le test final sera celui d’une crise réelle: la flexibilité promise devra alors démontrer qu’elle est un instrument d’ajustement ordonné plutôt qu’un vecteur de désancrage. À l’horizon 2026, la souveraineté monétaire ne se mesurera plus à la fixité d’un taux, mais à la capacité d’orchestrer une volatilité saine au service de la transformation économique.

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Mamoune ACHARKI
Journaliste junior passionné par l'écriture, la communication, les relations internationales et la... En savoir plus sur cet auteur
Jeudi 4 Septembre 2025