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​Le défi de l'entrepreneuriat au Maroc : changer les mentalités pour construire l’avenir




Par Abdelghani El Arrasse

​Le défi de l'entrepreneuriat au Maroc : changer les mentalités pour construire l’avenir
Au Maroc, un constat préoccupant persiste : la majorité des jeunes diplômés aspirent encore, pour la plupart, à intégrer la fonction publique ou à décrocher un emploi salarié, laissant l’entrepreneuriat à la marge. Cette tendance n’est pas le fruit du hasard ; elle s’explique par l’absence d’une véritable culture entrepreneuriale, aussi bien dans l’environnement familial que dans le système éducatif. Les idées reçues ont la vie dure : « un emploi salarié est plus sûr », « entreprendre, c’est risqué », entend-on souvent. Ces stéréotypes constituent un frein majeur à l’émergence d’une génération d’entrepreneurs innovants et audacieux, capables de répondre aux défis économiques du pays.

Face à ce blocage culturel, il devient urgent d’agir sur plusieurs fronts. Changer les mentalités, c’est d’abord sensibiliser les familles, éduquer à l’école, mais aussi mobiliser l’ensemble des acteurs autour d’un écosystème favorable à l’initiative entrepreneuriale.

 Le rôle des parents : catalyseurs du changement 

Les parents ont une influence décisive sur les choix de vie de leurs enfants. Pour les amener à envisager l’entrepreneuriat comme une voie possible – et même souhaitable – il est essentiel de déconstruire certaines perceptions négatives.

D’abord, il faut démystifier l’entrepreneuriat. Cela passe par l’organisation d’ateliers et de conférences spécialement conçus pour les parents, avec la participation d’entrepreneurs marocains ayant réussi dans différents secteurs. À travers des témoignages concrets et accessibles, il s’agit de montrer que l’entrepreneuriat peut être source d’autonomie, d’innovation, d’impact social et de réussite financière.

Ensuite, il est important de présenter l’entrepreneuriat comme une option professionnelle viable, encadrée par de nombreux dispositifs d’accompagnement : incubateurs, centres d'affaires, structures de financement et programmes publics de soutien. Le risque, bien que réel, peut être maîtrisé grâce à une bonne préparation et un encadrement adapté.

Par ailleurs, il convient de valoriser dès le plus jeune âge l’esprit d’initiative et la créativité. Les parents doivent être encouragés à soutenir les projets de leurs enfants, même modestes, à les écouter, à les motiver et à les accompagner. Enfin, il faut rappeler que les compétences développées dans un parcours entrepreneurial – résolution de problèmes, leadership, adaptabilité, persévérance – sont précieuses dans n’importe quelle carrière, qu’elle soit entrepreneuriale ou salariée.

 L’école : terreau de l’audace et de l’innovation 

L’école est un levier fondamental pour semer les graines de l’esprit entrepreneurial. Pour ce faire, il n’est pas forcément nécessaire de créer une nouvelle discipline ; l’enjeu est plutôt d’infuser la culture entrepreneuriale à travers les différentes matières.

En mathématiques, par exemple, on peut initier les élèves à la gestion budgétaire d’une petite entreprise. En français, analyser des biographies d’entrepreneurs inspirants permet d’associer la réussite à l’audace et au travail. Des projets concrets peuvent aussi être mis en place : mini-entreprises scolaires, concours d’idées, simulations de création d’entreprise, autant d’activités qui permettent aux jeunes d’expérimenter le processus entrepreneurial de façon ludique et formatrice.

Les interventions de professionnels – entrepreneurs locaux ou jeunes créateurs d’entreprise – dans les établissements scolaires peuvent également jouer un rôle inspirant. Ces rencontres brisent les clichés et rendent l’entrepreneuriat tangible, humain et accessible.

Il convient aussi d’enseigner la prise de risque comme une compétence à part entière. Apprendre à planifier, anticiper les difficultés et faire preuve de résilience face à l’échec est une leçon précieuse, bien au-delà de l’entrepreneuriat.

 Créer une dynamique collective pour un écosystème porteur 

Pour ancrer durablement cette nouvelle culture, il faut créer une synergie entre les familles, les jeunes, l’école, les institutions et le monde économique.

Cela passe par la mise en place de plateformes d’échange entre parents, enseignants, entrepreneurs et institutions, afin de mutualiser les expériences et construire ensemble une vision partagée de l’avenir. Des programmes de mentorat peuvent être développés pour permettre aux jeunes porteurs de projets d’être accompagnés par des entrepreneurs aguerris.

L’accès à l’information doit être facilité par des guides clairs et accessibles expliquant les démarches de création d’entreprise, les opportunités de financement et les ressources disponibles. Il est aussi fondamental de soutenir les initiatives locales – associations, clubs, centres d’innovation – qui œuvrent activement à la promotion de l’entrepreneuriat chez les jeunes.

 Conclusion : vers une jeunesse plus audacieuse 

Changer les mentalités ne se décrète pas. Cela nécessite du temps, de la pédagogie, de la persévérance. Mais en agissant de concert, en mobilisant les familles, l’école et les acteurs institutionnels autour de cette cause commune, nous pouvons transformer la perception de l’emploi au Maroc. En insufflant une culture entrepreneuriale vivante, ouverte, valorisante, nous permettrons à notre jeunesse de devenir actrice de son destin, de saisir les opportunités offertes par l’innovation et, ainsi, de construire un avenir plus prometteur pour notre pays.
 
Rédigé par Abdelghani El Arrasse


Samedi 21 Juin 2025