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​Maintenant que le concept de "la destruction créatrice" a son Nobel


Rédigé par le Mardi 2 Décembre 2025



​Maintenant que le concept de "la destruction créatrice" a son Nobel
Il aura fallu qu’un prix Nobel d’économie vienne le rappeler : la destruction créatrice, ce n’est pas un slogan de start-up ni une fable schumpétérienne pour investisseurs en quête de sens. C’est le cœur battant du progrès, ce moteur impitoyable mais fécond qui fait tomber les vieilles structures pour permettre à de nouvelles de naître.

Philippe Aghion, Peter Howitt et Joel Mokyr viennent d’être consacrés pour avoir démontré, preuves à l’appui, que l’innovation n’est pas un luxe moral, mais une condition vitale de prospérité. Une économie qui ne crée pas finit par se fossiliser, et une société qui ne se réinvente pas se condamne à la dépendance. Voilà qui, espérons-le, parlera enfin aux décideurs marocains, à nos « sachants » et à nos « savants ».

Le Maroc a depuis longtemps les mots – “start-up”, “hub africain”, “innovation”, “transformation digitale”. Mais il lui manque encore la grammaire du risque, cette capacité à tolérer l’échec, à financer le long terme, à laisser l’expérimentation remplacer la procédure. L’innovation ne se décrète pas, elle se cultive ; elle se protège, se finance, se gouverne avec courage.

Derrière ce Nobel, il y a une leçon politique : la croissance ne naît plus du béton ni des exonérations fiscales, mais de la connaissance. Le Maroc a construit ses ports, ses routes, ses zones industrielles ; il doit désormais bâtir ses laboratoires, ses brevets, ses fonds d’innovation. Sans cela, il restera un atelier sous-traitant dans une économie mondialisée qui se referme.

La destruction créatrice à la marocaine n’a pas encore eu lieu. Nous préservons trop nos rentes, nos lenteurs, nos guichets et nos certitudes. Mais le monde bouge. L’intelligence artificielle, l’énergie verte, la biotechnologie et la science des matériaux redessinent déjà les frontières de la richesse.

Peut-être qu’en voyant ce concept élevé à la dignité d’un Nobel, nos dirigeants comprendront enfin qu’il ne s’agit pas d’un caprice d’économistes, mais d’une nécessité historique. Le Maroc n’a pas besoin de plus d’instructions : il a besoin d’un électrochoc créatif. D’un courage collectif pour détruire ce qui bloque, et pour faire naître ce qui manque.

La question, désormais, n’est plus “quand”, mais oserons-nous ?




Mardi 2 Décembre 2025