Pendant longtemps, la politique de l’eau au Maroc a semblé se jouer entre deux extrêmes : d’un côté les grandes métropoles comme Casablanca ou Rabat, au centre de toutes les attentions et investissements ; de l’autre, le monde rural, souvent considéré comme le maillon faible de la répartition hydrique. Entre les deux, un acteur discret mais essentiel est resté trop souvent dans l’angle mort des politiques publiques : les villes moyennes. Ces cités de 50 000 à 200 000 habitants, qui concentrent pourtant une part importante de la croissance démographique et économique du pays, commencent enfin à sortir de l’ombre.
La nouvelle cartographie des stations de dessalement et des barrages, analysée dans la dernière étude du Policy Center for the New South, en témoigne clairement. Des villes comme Safi, Nador, Guelmim, Tiznit, Sidi Ifni, Taounate ou Dakhla deviennent des points d’ancrage de la stratégie nationale de lutte contre le stress hydrique. Certaines d’entre elles bénéficient désormais de stations de dessalement fixes, alimentées par les énergies renouvelables, tandis que d’autres voient émerger des micro-barrages ou des unités mobiles de production d’eau douce.
Ce changement de focale est loin d’être anodin. Car ce sont ces villes moyennes qui, depuis une dizaine d’années, accueillent une partie croissante de la population déplacée par l’exode rural, l’urbanisation désordonnée ou la raréfaction des ressources agricoles. Elles sont devenues des zones tampons, ni totalement urbaines, ni totalement rurales, souvent livrées à elles-mêmes en matière d’aménagement. L’eau y est un révélateur des inégalités territoriales.
Prenons l’exemple de Sidi Ifni, petite ville côtière du Sud, longtemps marginalisée dans les grands plans d’équipement. Elle bénéficie aujourd’hui d’une station de dessalement dédiée, de taille modeste (3,15 Mm³), mais suffisante pour couvrir les besoins de sa population. Même logique pour Guelmim, qui, avec une station prévue de 34,6 Mm³, anticipe une croissance démographique soutenue. Dans le Nord-Est, Nador, ville moyenne en surface mais grande en projection économique avec son port de commerce et sa diaspora, se voit dotée d’un mégaprojet de dessalement de 250 Mm³. Là encore, l’échelle régionale est réévaluée.
Mais cette montée en puissance ne doit pas masquer la fragilité structurelle de ces villes. Les réseaux de distribution sont parfois vétustes, les budgets municipaux insuffisants pour gérer les infrastructures nouvelles, et les compétences locales encore en construction. Il ne suffit pas de livrer une station ou un barrage. Il faut former, entretenir, planifier à long terme. C’est tout l’enjeu d’une décentralisation hydraulique maîtrisée, qui évite que les investissements lourds ne deviennent des éléphants blancs.
Derrière cette nouvelle attention aux villes moyennes, se dessine aussi un rééquilibrage du développement national. En rendant l’eau disponible partout, y compris dans les territoires dits intermédiaires, le Maroc désamorce des tensions latentes : migrations internes, sentiment d’abandon, perte de confiance dans l’État central. L’eau devient alors un outil de stabilisation sociale autant qu’une ressource vitale.
Ce virage stratégique mérite d’être consolidé. Car si les métropoles continueront d’attirer la majorité des financements et des préoccupations, le vrai test de résilience se joue souvent à plus petite échelle. Dans une oasis, un centre provincial, un port secondaire. C’est là que se mesure, goutte après goutte, la capacité d’un pays à penser son avenir autrement que depuis ses capitales.
La nouvelle cartographie des stations de dessalement et des barrages, analysée dans la dernière étude du Policy Center for the New South, en témoigne clairement. Des villes comme Safi, Nador, Guelmim, Tiznit, Sidi Ifni, Taounate ou Dakhla deviennent des points d’ancrage de la stratégie nationale de lutte contre le stress hydrique. Certaines d’entre elles bénéficient désormais de stations de dessalement fixes, alimentées par les énergies renouvelables, tandis que d’autres voient émerger des micro-barrages ou des unités mobiles de production d’eau douce.
Ce changement de focale est loin d’être anodin. Car ce sont ces villes moyennes qui, depuis une dizaine d’années, accueillent une partie croissante de la population déplacée par l’exode rural, l’urbanisation désordonnée ou la raréfaction des ressources agricoles. Elles sont devenues des zones tampons, ni totalement urbaines, ni totalement rurales, souvent livrées à elles-mêmes en matière d’aménagement. L’eau y est un révélateur des inégalités territoriales.
Prenons l’exemple de Sidi Ifni, petite ville côtière du Sud, longtemps marginalisée dans les grands plans d’équipement. Elle bénéficie aujourd’hui d’une station de dessalement dédiée, de taille modeste (3,15 Mm³), mais suffisante pour couvrir les besoins de sa population. Même logique pour Guelmim, qui, avec une station prévue de 34,6 Mm³, anticipe une croissance démographique soutenue. Dans le Nord-Est, Nador, ville moyenne en surface mais grande en projection économique avec son port de commerce et sa diaspora, se voit dotée d’un mégaprojet de dessalement de 250 Mm³. Là encore, l’échelle régionale est réévaluée.
Mais cette montée en puissance ne doit pas masquer la fragilité structurelle de ces villes. Les réseaux de distribution sont parfois vétustes, les budgets municipaux insuffisants pour gérer les infrastructures nouvelles, et les compétences locales encore en construction. Il ne suffit pas de livrer une station ou un barrage. Il faut former, entretenir, planifier à long terme. C’est tout l’enjeu d’une décentralisation hydraulique maîtrisée, qui évite que les investissements lourds ne deviennent des éléphants blancs.
Derrière cette nouvelle attention aux villes moyennes, se dessine aussi un rééquilibrage du développement national. En rendant l’eau disponible partout, y compris dans les territoires dits intermédiaires, le Maroc désamorce des tensions latentes : migrations internes, sentiment d’abandon, perte de confiance dans l’État central. L’eau devient alors un outil de stabilisation sociale autant qu’une ressource vitale.
Ce virage stratégique mérite d’être consolidé. Car si les métropoles continueront d’attirer la majorité des financements et des préoccupations, le vrai test de résilience se joue souvent à plus petite échelle. Dans une oasis, un centre provincial, un port secondaire. C’est là que se mesure, goutte après goutte, la capacité d’un pays à penser son avenir autrement que depuis ses capitales.