2024, année de tous les records climatiques : le Maroc face à un tournant brûlant


Rédigé par La rédaction le Samedi 21 Juin 2025



Un réchauffement record et des impacts multiples sur la vie quotidienne

Quarante-sept degrés à l’ombre à Béni Mellal, des nuits d’hiver trop douces à Ifrane, et une chaleur record en plein mois de janvier à Laâyoune… L’année 2024 n’a pas seulement été chaude : elle a été historique. Pour la première fois, le Maroc a franchi la barre symbolique de +1,49°C au-dessus des normales climatiques, confirmant une bascule à la fois météorologique, sociale et économique. C’est un signal fort, un tournant climatique que le Royaume ne peut plus ignorer.

L’année 2024 est officiellement la plus chaude jamais enregistrée au Maroc depuis le début des mesures, avec une anomalie de température moyenne nationale de +1,49°C par rapport à la période de référence 1991-2020. Janvier et novembre ont battu des records, enregistrant respectivement +4,08°C et +3,23°C au-dessus des moyennes saisonnières. Ce phénomène s’inscrit dans une tendance mondiale où les dernières années sont systématiquement les plus chaudes jamais relevées.

Certaines régions marocaines ont été particulièrement touchées : Béni Mellal-Khénifra, l’Oriental, Fès-Meknès, Al Haouz et Drâa-Tafilalet ont connu des anomalies supérieures à +2,8°C. Même les zones côtières habituellement tempérées comme Casablanca ou Laâyoune ont enregistré des écarts importants. L’ensemble du territoire a été concerné, avec des pics supérieurs à 47°C dans le Centre et le Sud.

Cette chaleur extrême ne s’est pas contentée de battre des records : elle a bouleversé les conditions de vie. Sur le plan sanitaire, les cas de déshydratation, d’épuisement thermique et de complications respiratoires ont augmenté, notamment chez les personnes âgées, les enfants en bas âge et les travailleurs du BTP. Les villes ont souffert d’ilots de chaleur urbains, aggravés par la densité bétonnée et le manque d’espaces verts.

Sur le plan économique, la surconsommation électrique due à la climatisation a pesé sur les réseaux. Le secteur agricole a vu la fenêtre de culture se réduire, avec des rendements en baisse et une difficulté accrue à planifier les semis. La chaleur persistante a aussi perturbé les calendriers scolaires, sportifs et touristiques, remettant en question les rythmes sociaux traditionnels.

Un climat devenu instable
Plus qu’une simple vague de chaleur, 2024 symbolise un climat devenu instable. Le Maroc a connu en quelques mois des extrêmes opposés : des records de chaleur en hiver, des précipitations torrentielles en automne, et même des baisses brutales de températures à la fin du printemps. Cette variabilité accrue rend la prévision météo plus difficile, tout en accentuant la vulnérabilité des populations.

Les vagues de chaleur ne sont plus ponctuelles : elles deviennent structurelles. L’impact cumulé sur les ressources en eau, la santé, la production alimentaire et la biodiversité appelle une réponse urgente et coordonnée.

Quelles réponses pour demain ?

Le rapport 2024 de la DGM appelle à l’accélération de la mise en place de stratégies d’adaptation. Cela inclut la modernisation des systèmes d’alerte précoce, le verdissement des villes, la promotion de l’architecture bioclimatique, et la formation des collectivités locales aux risques climatiques. La question de l’éducation au changement climatique devient elle aussi cruciale.

En parallèle, les politiques publiques devront mieux anticiper les répercussions sectorielles de cette chaleur persistante : qu’il s’agisse d’ajuster les horaires de travail, de garantir l’accès à l’eau potable, ou de protéger les populations vulnérables.

L’année 2024 restera comme un jalon : celui d’un Maroc entré dans l’ère de la chaleur extrême. Ce constat ne doit pas mèner à la fatalité, mais à l’action. En reconnaissant la nature structurelle de ces mutations climatiques, le pays peut encore s’adapter, innover, et préserver sa souveraineté climatique. Le vrai défi n’est plus de prévoir la chaleur, mais d’y résister.




Samedi 21 Juin 2025
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