Quand la relance agricole oublie ses racines rurales
En 2020, le lancement de la stratégie Génération Green 2020-2030 devait représenter un tournant. Plus humaine, plus inclusive, plus tournée vers le développement du capital humain rural, elle venait corriger les déséquilibres structurels hérités du Plan Maroc Vert. Mais cinq ans après son lancement, le constat du Conseil économique, social et environnemental (CESE) est sans appel : la petite et moyenne agriculture familiale (PMAF) reste en marge des priorités, mal outillée, sous-financée, mal encadrée, et donc condamnée à la survie, quand d'autres filières prennent leur envol.
Le cœur du mal, selon le CESE ? Une stratégie séduisante dans ses intentions, mais inégalement déployée dans les territoires, où les petits agriculteurs, notamment en zone bour ou montagneuse, n’ont pas vu leur quotidien s’améliorer.
Des jeunes… mais sans terre, sans crédit, sans filet
L’un des piliers de Génération Green est le soutien aux jeunes agriculteurs, à travers l’ouverture d’un million d’hectares de terres collectives à l’investissement. En théorie, cela devait permettre une relève générationnelle et l’émergence d’une classe moyenne rurale. Mais sur le terrain, beaucoup de jeunes se heurtent à une série de verrous : difficultés d’accès au foncier, conditions bancaires inadaptées, manque d’accompagnement personnalisé, et surtout un marché dominé par les grands exploitants et les intermédiaires.
En 2024, seuls 6,5 % des exploitations sont dirigées par des femmes, et moins de 10 % par des jeunes, malgré des aides à l’équipement et à l’irrigation. Ces chiffres révèlent l’écart entre les ambitions centrales et les réalités locales.
Une agriculture familiale encore à la périphérie de la vision stratégique
Alors que 70 % des exploitations agricoles relèvent de la PMAF, leur poids dans la stratégie Génération Green reste marginal. La majorité d’entre elles n’accèdent ni à l’encadrement agricole personnalisé (1 conseiller pour 5 700 agriculteurs en moyenne), ni aux systèmes de financement dédiés, ni aux marchés structurés, et encore moins aux programmes de recherche ou d’innovation technologique.
Le CESE alerte sur un point crucial : l’absence d’un plan spécifique dédié à l’agriculture familiale dans le cadre de Génération Green. Les petits agriculteurs sont souvent noyés dans des dispositifs conçus pour des exploitants moyens ou grands, sans adaptation aux contraintes de taille, d’accès au foncier ou de faible productivité.
Des fonctions sociales et environnementales invisibilisées
Outre leur rôle nourricier, les agriculteurs familiaux remplissent une fonction écologique précieuse : préservation des semences locales, lutte contre la désertification, maintien de la biodiversité, etc. Ils assurent aussi une stabilité sociale en réduisant l’exode rural. Pourtant, ces fonctions ne sont ni reconnues, ni rémunérées. Le CESE appelle à la création de mécanismes de financement pour valoriser ces services écosystémiques, à l’image des paiements pour services environnementaux déjà en place dans d’autres pays.
On pourrait arguer que Génération Green ne pouvait pas tout réparer en quelques années. Moderniser les filières, garantir la sécurité alimentaire et attirer les investisseurs étaient des priorités nationales. Mais sans reconnaissance explicite de la PMAF comme levier stratégique, la fracture entre agriculture capitalisée et agriculture vivrière ne fera que s’amplifier. Or, ce sont bien les petites mains rurales, discrètes mais constantes, qui garantissent au pays ses racines profondes. Les oublier, c’est fragiliser tout l’édifice.
Le cœur du mal, selon le CESE ? Une stratégie séduisante dans ses intentions, mais inégalement déployée dans les territoires, où les petits agriculteurs, notamment en zone bour ou montagneuse, n’ont pas vu leur quotidien s’améliorer.
Des jeunes… mais sans terre, sans crédit, sans filet
L’un des piliers de Génération Green est le soutien aux jeunes agriculteurs, à travers l’ouverture d’un million d’hectares de terres collectives à l’investissement. En théorie, cela devait permettre une relève générationnelle et l’émergence d’une classe moyenne rurale. Mais sur le terrain, beaucoup de jeunes se heurtent à une série de verrous : difficultés d’accès au foncier, conditions bancaires inadaptées, manque d’accompagnement personnalisé, et surtout un marché dominé par les grands exploitants et les intermédiaires.
En 2024, seuls 6,5 % des exploitations sont dirigées par des femmes, et moins de 10 % par des jeunes, malgré des aides à l’équipement et à l’irrigation. Ces chiffres révèlent l’écart entre les ambitions centrales et les réalités locales.
Une agriculture familiale encore à la périphérie de la vision stratégique
Alors que 70 % des exploitations agricoles relèvent de la PMAF, leur poids dans la stratégie Génération Green reste marginal. La majorité d’entre elles n’accèdent ni à l’encadrement agricole personnalisé (1 conseiller pour 5 700 agriculteurs en moyenne), ni aux systèmes de financement dédiés, ni aux marchés structurés, et encore moins aux programmes de recherche ou d’innovation technologique.
Le CESE alerte sur un point crucial : l’absence d’un plan spécifique dédié à l’agriculture familiale dans le cadre de Génération Green. Les petits agriculteurs sont souvent noyés dans des dispositifs conçus pour des exploitants moyens ou grands, sans adaptation aux contraintes de taille, d’accès au foncier ou de faible productivité.
Des fonctions sociales et environnementales invisibilisées
Outre leur rôle nourricier, les agriculteurs familiaux remplissent une fonction écologique précieuse : préservation des semences locales, lutte contre la désertification, maintien de la biodiversité, etc. Ils assurent aussi une stabilité sociale en réduisant l’exode rural. Pourtant, ces fonctions ne sont ni reconnues, ni rémunérées. Le CESE appelle à la création de mécanismes de financement pour valoriser ces services écosystémiques, à l’image des paiements pour services environnementaux déjà en place dans d’autres pays.
On pourrait arguer que Génération Green ne pouvait pas tout réparer en quelques années. Moderniser les filières, garantir la sécurité alimentaire et attirer les investisseurs étaient des priorités nationales. Mais sans reconnaissance explicite de la PMAF comme levier stratégique, la fracture entre agriculture capitalisée et agriculture vivrière ne fera que s’amplifier. Or, ce sont bien les petites mains rurales, discrètes mais constantes, qui garantissent au pays ses racines profondes. Les oublier, c’est fragiliser tout l’édifice.