CHRONIQUE – Géopolitique façon télé-réalité


Rédigé par le Mercredi 18 Juin 2025

Quand la guerre devient une série en direct : analyse ironique des menaces de Trump contre l’Iran et de la diplomatie façon réseaux sociaux.



Peut-on menacer la paix mondiale comme on tweete un avis sur Netflix ?

On pensait que le XXIe siècle allait être celui de l’intelligence, de la coopération, de l’ONU et des selfies solidaires. Et puis non. Visiblement, la diplomatie se résume désormais à des punchlines sur les réseaux, balancées entre deux bouchées de cheeseburger à bord d’Air Force One. Voilà qu’un président américain – ancien magnat de l’immobilier et star de téléréalité, rappelons-le – menace tranquillement un chef d’État étranger d’exécution ciblée, comme s’il évoquait l’élimination d’un candidat gênant dans une émission de télé-réalité : “On sait où il est, on pourrait le sortir du jeu. Mais pas tout de suite.”

Trump, ou l’art de gouverner à coups de tweets incendiaires, transforme les relations internationales en jeu de guerre grandeur nature, avec carte satellite HD et effets spéciaux. Il ne parle plus de diplomatie, mais de “fin réelle”, de “frappe totale”, et de “patience limitée”. Comme un client mécontent chez un fournisseur de téléphonie mobile.

Dans cette partie d’échecs nucléaire, on attendait les garants de l’ordre mondial : ONU, Conseil de sécurité, casques bleus, experts en désescalade. Eh bien non. Ils semblent absents, ou inaudibles. Pendant ce temps, des chefs d'État, censés incarner la raison d’État, annoncent à demi-mot qu’ils pourraient “ne pas tuer” un guide suprême. Pour l’instant. Charmante perspective.

En réalité, ce n’est pas tant la menace d’une bombe qui sidère. C’est la désinvolture avec laquelle elle est formulée. L’habillage rhétorique est là : “nous ne cherchons pas la guerre”. Mais le contexte géopolitique, lui, est saturé : Israël-Iran, frappes ciblées, missiles sur civils, et désormais une capitale (Téhéran) placée sous contrôle aérien “total” des États-Unis. Ce mot, “total”, a une saveur particulière quand il sort de la bouche d’un homme dont la finesse stratégique se mesure à son nombre de likes.

Trump a même conseillé aux habitants de Téhéran de fuir leur ville. Imaginez un instant que ce genre de message apparaisse sur nos écrans au réveil : “Votre ville pourrait être la prochaine cible, pensez à évacuer. Merci de votre compréhension.” Ce n’est plus de la diplomatie. C’est du survivalisme en temps réel. Une géopolitique “live”.

En parallèle, certains alliés applaudissent. D’autres s’inquiètent. La France, fidèle à sa posture de funambule international, appelle à la retenue. Mais la logique du bras de fer est bien installée. Et l’humour noir de la situation, c’est qu’un tweet présidentiel peut désormais peser autant qu’une résolution onusienne. Voire davantage.

Tout se passe comme si la guerre était devenue une forme de storytelling national : il faut captiver, marquer les esprits, faire peur. L’arsenal militaire n’est plus seulement un moyen de domination. Il est aussi une vitrine. On aligne les acronymes (MOAB, B-2, etc.) comme on vante les caractéristiques d’un nouveau smartphone. On “montre les muscles”, mais toujours avec mise en scène, effet dramatique, et cliffhanger : va-t-il le faire ? Ou pas ?

Et nous, simples spectateurs de ce grand théâtre planétaire, nous oscillons entre incrédulité, angoisse feutrée, et lassitude. Comme si la paix n’était plus une ambition, mais une pause entre deux buzz.

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Dans un monde où l'attention est devenue une monnaie, la communication de crise se joue désormais sur le terrain du buzz. Le danger n’est plus seulement dans les missiles, mais dans la vitesse de l’information. Un président peut déclencher une panique mondiale avec une phrase de 140 caractères. Et si les tweets deviennent des armes diplomatiques, que reste-t-il aux chancelleries ? Le fond du problème, c’est peut-être que nos dirigeants se sont adaptés à l’époque : bruyante, rapide, émotive. Une époque où la stratégie de guerre doit être virale… ou ne sera pas.

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Mercredi 18 Juin 2025
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