
On parlera de violence scolaire, de tensions dans le secteur de l’éducation, de climat dégradé, de circulaires inefficaces, de réforme bâclée, de démission politique. Oui, tout cela est vrai. Mais si on évite le mot juste, on trahit la vérité. Une femme est morte parce qu’elle était une femme dans un espace public, exposée à une violence sexiste et systémique que notre société ne veut toujours pas nommer.
Pourquoi est-ce si difficile de reconnaître que l’école est aussi un théâtre de la violence de genre ? Pourquoi refuse-t-on d’admettre que cette attaque, comme tant d’autres, est le symptôme d’une société qui ne protège pas ses femmes, qui ne les respecte pas, et qui ne les écoute pas quand elles dénoncent ?
Elle est morte au travail. Elle est morte dans un lieu qui devrait être sûr. Elle est morte alors qu’elle portait sur ses épaules les rêves de générations entières. Et elle est morte dans l’indifférence glaçante d’un système qui, au lieu de la défendre, continue de banaliser la haine, la violence et l’impunité.
On parlera de sit-in, de deuil, de brassards noirs et de slogans. Mais est-ce que cela suffira ? Est-ce que cela ramènera la sécurité dans les salles de classe ? Est-ce que cela mettra fin à la violence sexiste dans l’école, dans la rue, dans les foyers ?
Non. Parce que le problème est plus profond. Il est politique. Il est culturel. Il est patriarcal.
Quand une femme meurt parce qu’elle est femme, que ce soit dans son foyer, dans la rue ou dans une salle de classe, ce n’est pas une affaire privée. C’est une affaire de société. C’est un féminicide. Et il faut que l’État, les institutions, les médias et chaque citoyen aient le courage de le nommer.
Les syndicats ont raison de se mobiliser. Mais leur discours doit aussi s’élargir. Car l’école publique, en danger aujourd’hui, est le miroir d’une société malade de ses violences. Et au cœur de cette violence, il y a la domination masculine, le mépris envers les femmes, et le silence coupable des décideurs.
Aujourd’hui, nous ne pleurons pas seulement une enseignante. Nous pleurons une femme tuée dans l’exercice de son devoir. Une femme que le système a laissée seule.
Et tant qu’on ne reconnaîtra pas que c’est parce qu’elle était une femme qu’elle est morte, on restera complices de ces crimes.