Ce que les arabes ignorent sur l’Afghanistan..


Rédigé par le Mercredi 24 Septembre 2025

L’Afghanistan fascine et interroge. Ce pays enclavé, au relief rude et à l’histoire tourmentée, a réussi là où bien d’autres nations ont échoué : tenir tête aux plus grandes puissances militaires du XXᵉ et du XXIᵉ siècle. Britanniques, Soviétiques, Américains : tous ont fini par battre en retraite, laissant derrière eux un peuple meurtri mais toujours debout. Pourtant, loin de l’image romantique d’une terre indomptable, l’Afghanistan d’aujourd’hui est un pays en quête d’équilibre, tiraillé entre son identité culturelle profondément enracinée et les réalités politiques et économiques du monde moderne.



Entre résistance héroïque et quête de stabilité :

L’histoire afghane est celle d’une succession de victoires contre l’occupation. Mais cette résilience a un coût. Chaque intervention étrangère a laissé des cicatrices profondes : infrastructures détruites, divisions internes exacerbées, générations entières plongées dans la guerre. Malgré tout, un fait mérite d’être souligné : l’Afghanistan, souvent marginalisé et sanctionné, a remboursé toutes ses dettes, preuve d’une volonté farouche de rester maître de son destin.

Mais la victoire contre l’envahisseur russe et américain ne règle pas les dilemmes internes. Les fractures ethniques et religieuses – entre Pachtounes, Tadjiks, Ouzbeks ou Hazaras, entre sunnites et chiites – ont longtemps été gérées par la tradition et les équilibres locaux. Les interventions étrangères, loin d’apaiser ces tensions, les ont instrumentalisées, aggravant les rivalités tribales et alimentant un climat de méfiance.

Aux yeux du monde, l’Afghanistan reste trop souvent réduit à des clichés : terre de terrorisme, d’opium et de burqas. Mais cette caricature masque une société beaucoup plus complexe, riche de traditions, de poésie, d’hospitalité et d’entrepreneuriat. Le pays est au cœur de l’Asie, une position géopolitique qui en fait à la fois un carrefour et un champ de bataille. Revaloriser l’image afghane est un enjeu vital, non seulement pour redonner confiance aux citoyens, mais aussi pour réinscrire le pays dans le concert des nations.

Comparer l’occupation soviétique et l’occupation américaine éclaire une contradiction. Si les Soviétiques, malgré leur brutalité, ont laissé derrière eux quelques infrastructures, l’intervention américaine est perçue comme essentiellement destructrice. Dans les deux cas, l’objectif n’était pas la reconstruction, mais la domination. Résultat : une identité nationale fragilisée, une culture menacée d’effacement et une jeunesse privée d’horizons.

Pourtant, là encore, la résilience s’impose. Les Afghans ont appris à survivre aux cycles d’ingérence et de guerre, souvent avec une inventivité qui force le respect.

L’Afghanistan ou l’art de survivre aux occupations :

Au-delà des frontières, une diaspora afghane s’illustre par son dynamisme. Du Golfe à l’Europe, de l’Amérique à l’Asie, les Afghans émigrés incarnent une autre facette du pays : celle de l’entrepreneuriat, de l’intégration et du pacifisme. Rares sont les cas d’Afghans mêlés à des scandales criminels : la majorité se consacre à bâtir un avenir pour leurs familles et à contribuer aux sociétés d’accueil. Cette diaspora pourrait devenir un levier essentiel pour relier l’Afghanistan à l’économie mondiale, à condition que les passerelles institutionnelles soient établies.

La grande question reste celle de la gouvernance. Peut-on appliquer à l’Afghanistan les recettes occidentales d’une république parlementaire ? Rien n’est moins sûr. Le pays est marqué par des décennies de guerre civile, de tribalismes politiques et d’expériences avortées. Certains plaident pour un modèle émirati ou islamique, mieux adapté aux réalités locales, quitte à choquer les tenants des normes démocratiques occidentales. Le véritable enjeu n’est pas la forme institutionnelle, mais la sincérité des intentions : reconstruire de l’intérieur, sans céder aux influences extérieures et sans reproduire les agendas importés.

Aujourd’hui, l’Afghanistan souffre d’un déficit majeur : le manque de reconnaissance internationale. Absent des instances onusiennes, il se retrouve dans un entre-deux inconfortable. Pourtant, sur le plan économique, des relations existent déjà : la Chine et l’Iran investissent, des entreprises osent prendre le pari de la stabilité relative. Mais sans reconnaissance officielle, le pays reste entravé dans ses échanges et marginalisé dans les grands débats mondiaux.

L’Afghanistan est donc à la croisée des chemins. D’un côté, une histoire glorieuse de résistance, une identité culturelle puissante et une diaspora dynamique. De l’autre, un isolement diplomatique, des fractures internes et une gouvernance encore balbutiante. Le défi est immense : sortir du cycle guerre-occupation-désillusion pour entrer dans une phase de stabilité durable. Cela exige une lucidité politique des dirigeants afghans, une solidarité des communautés ethniques et un regard international débarrassé des préjugés.

Au fond, l’Afghanistan n’a jamais cessé d’être une énigme pour le monde : un pays impossible à dompter, mais toujours en quête de sa propre paix.

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Un ingénieur passionné par la technique, mordu de mécanique et avide d'une liberté que seuls… En savoir plus sur cet auteur
Mercredi 24 Septembre 2025
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