Dakar-Rabat : la cohérence stratégique d’une alliance africaine


Par Saïd Temsamani

Il est des gestes diplomatiques qui dépassent la simple liturgie des communiqués officiels. L’appui vigoureux exprimé par le Sénégal à la suite de l’adoption de la résolution 2797 du Conseil de sécurité, le 31 octobre 2025, appartient à cette catégorie des actes qui comptent, qui s’inscrivent dans une histoire longue et qui redessinent, subtilement mais sûrement, les équilibres régionaux.



La résolution onusienne, saluée comme un tournant majeur, a réaffirmé la prééminence du plan d’autonomie marocain en tant que base unique, sérieuse et durable d’un règlement politique du dossier du Sahara.

Pour Dakar, ce vote représente bien plus qu’un alignement sur une dynamique internationale ; il consacre une position mûrie, assumée et désormais structurante de sa vision de la stabilité en Afrique du Nord et au Sahel.
 
C’est dans ce contexte que la visite à Rabat du ministre sénégalais de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères, Cheikh Niang, a pris une dimension singulière. À l’issue de ses entretiens avec son homologue marocain, Nasser Bourita, un communiqué conjoint a réaffirmé avec clarté l’intangibilité du soutien sénégalais à l’intégrité territoriale du Maroc; une constante de la diplomatie de Dakar, mais qui trouve aujourd’hui un écho nouveau à la lumière du débat international relancé par la résolution 2797.

Le Sénégal ne se contente plus d’exprimer une solidarité traditionnelle ; il inscrit son choix dans une logique stratégique.

Pour Dakar, la stabilité régionale passe par une solution politique réaliste, et cette solution, aux yeux des autorités sénégalaises, demeure le plan d’autonomie sous souveraineté marocaine. Loin des postures idéologiques qui ont longtemps parasité le dossier, le Sénégal adopte une approche lucide : le statu quo n’est plus tenable, et l’autonomie constitue la seule voie susceptible d’éviter l’enlisement prolongé d’un conflit qui obère l’intégration économique du Maghreb.
 
Le Maroc n’a d’ailleurs pas manqué de saluer cette position. En remerciant son homologue, Nasser Bourita a souligné la profondeur de la compréhension sénégalaise des enjeux historiques et géopolitiques du dossier. Une manière de rappeler que Dakar parle en connaissance de cause et que son engagement s’inscrit dans un continuum politique qui remonte à plusieurs décennies.
 
Un symbole illustre cette constance : l’ouverture, en avril 2021, d’un consulat général du Sénégal à Dakhla. Un geste diplomatique fort, devenu au fil des ans un marqueur tangible de la confiance politique entre les deux pays et de l’ancrage sénégalais dans une vision d’avenir partagée avec Rabat.
 

L’épisode de cette semaine n’est donc pas un simple épisode diplomatique. Il s’inscrit dans une tendance lourde :

Celle de l’affirmation croissante, sur le continent, de positions pragmatiques privilégiant la stabilité, l’intégration régionale et la souveraineté des États sur les tentations séparatistes.
 
En renouvelant son soutien sans ambiguïté au plan d’autonomie, le Sénégal ne fait pas que conforter le Maroc ; il réaffirme une vision africaine de la résolution des crises, fondée sur la responsabilité, la lucidité et la cohérence stratégique. Et cela, à l’heure où le continent fait face à d’immenses défis de sécurité et de développement, mérite d’être souligné.

Par Saïd Temsamani 


Mardi 11 Novembre 2025

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