France : plainte de quatre associations musulmanes contre un sondage Ifop jugé « biaisé »


Rédigé par le Mardi 25 Novembre 2025

Lundi à Paris, quatre Conseils départementaux du culte musulman ont déposé plainte contre X. En cause : un sondage Ifop qu’ils jugent « orienté », « stigmatisant » et dangereux pour le vivre-ensemble.



Ifop dans la tourmente : plainte pour “questions orientées”

L’affaire secoue discrètement Paris mais fait grand bruit dans les milieux associatifs. Quatre Conseils départementaux du culte musulman (CDCM) Loiret, Aube, Bouches-du-Rhône et Seine-et-Marne ont déposé plainte contre X ce lundi. Ils dénoncent un sondage Ifop publié le 18 novembre, consacré au « rapport à l’islam et à l’islamisme » des musulmans de France. Pour eux, impossible de laisser passer ce qu’ils considèrent comme un travail « biaisé » qui alimente les fractures.
 

L’initiative judiciaire est portée par les avocats Raphaël Kempf et Romain Ruiz. Ils affirment que le sondage enfreint la loi de 1977, qui exige objectivité et neutralité dans les enquêtes d’opinion destinées au public. Selon eux, plusieurs questions seraient formulées de manière à orienter les réponses, tandis que les résultats les plus minoritaires auraient été volontairement mis en avant. Résultat, disent-ils : une vision caricaturale de l’islam français qui sème la suspicion au lieu d’éclairer le débat.
 

Le sondage, réalisé auprès de 1.005 personnes se déclarant musulmanes, a été commandé par « Écran de veille », un média confidentiel dédié à la lutte contre les fanatismes. Dès sa publication, il a déclenché une tempête. L’extrême droite y a vu une confirmation de son discours sur une prétendue « islamisation ». Les représentants du culte musulman, eux, ont dénoncé une « stigmatisation » de plus.
 

Le CFCM, déjà affaibli depuis sa mise à l’écart en 2021, a réagi vendredi en parlant d’une « mise à l’index injustifiée » des musulmans de France, pointant des « données contestables » et une lecture anxiogène du religieux. Dans la foulée, Chems-eddine Hafiz, recteur de la Grande mosquée de Paris, a accusé le sondage de « fabriquer les peurs qu’il prétend mesurer ».
 

Des chercheurs se sont également mêlés au débat. Le politiste Haouès Seniguer estime que le sondage entretient un raccourci dangereux : l’idée qu’une pratique religieuse rigoureuse serait automatiquement un pas vers l’islamisme. Une équation « grossière et réductrice », dit-il, qui contribue à figer l’opinion et à polariser la société.
 

Pour l’heure, le tribunal judiciaire de Paris doit décider si la plainte est recevable. Mais l’affaire va clairement au-delà du juridique. Elle rouvre une question devenue sensible en France : comment mesurer l’opinion sans attiser les tensions ? Et surtout, comment parler du fait religieux sans basculer dans la peur ou la récupération politique ? Une chose est sûre : ce dossier ne va pas disparaître du débat public de sitôt.





Journaliste et étudiant malien en stage, passionné par la géopolitique, l'histoire et le sport.… En savoir plus sur cet auteur
Mardi 25 Novembre 2025
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