Gouvernement-Parlement: mi-mandat, en avant toute?


Avec ce mois d’avril, a-t-on affaire à une nouvelle séquence de l’action gouvernementale? L’agenda paraît pousser dans ce sens, mais qu’en sera-t-il en vérité?



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Par Mustapha Sehimi

Voici quelques jours, le vendredi 12 avril, était ouverte la session de printemps du Parlement, la sixième de la présente législature qui a commencé en octobre 2021. À l’ordre du jour, le renouvellement des organes de direction de la Chambre des représentants (Président, membres du bureau et présidents des commissions permanentes).

Pour l’heure, seul le premier scrutin s’est déroulé le vendredi, avec la réélection de Rachid Talbi Alami au perchoir, par une confortable majorité de 264 voix contre le candidat du PJD, Abdallah Bouanou (23 voix), dont le groupe parlementaire ne compte que treize membres.

L’on a noté 37 bulletins nuls, l’absence de 71 députés et le fait que quatre groupes de l’opposition (USFP, MP, PPS et PJD), totalisant 84 sièges, n’ont pas réussi à s’accorder sur un candidat commun -preuve, que certaines postures «unitaires» n’ont par de traduction dans les faits, tant s’en faut.

La reprise? C’est aussi le discours de mi-mandat prévu par le Chef du gouvernement, Aziz Akhannouch, le mercredi 17 avril à 17 heures, devant les deux Chambres du Parlement. Un bilan d’étape à son initiative. Peut-il se limiter à redire ce qui a été précisé à l’issue de la réunion de l’instance de la présidence de la majorité parlementaire, le 8 avril dernier, avec le RNI -qu’il dirige- et ses deux autres composantes, le Parti de l’Istiqlal (PI) de Nizar Baraka et le Parti authenticité et modernité (PAM), représenté par sa direction collective, composée de Fatima Ezzahra El Mansouri, Mohamed Mehdi Bensaïd et Salaheddine Aboulghali.

Le communiqué publié à cette occasion faisait référence à un «bilan positif»…

Mais cet agenda a été reporté à «une date ultérieure» après la découverte tardive des dispositions de l’article 248 du règlement intérieur de la Chambre des représentants, celles-ci prévoyant l’accord des deux bureaux des Chambres pour fixer une séance d’audition du Chef du gouvernement, en application de l’article 101 de la Constitution.

Le Chef de l’exécutif dispose d’une majorité confortable de 270 membres (RNI, PI et PAM), soit pratiquement les deux tiers de la Chambre des représentants (395). L’opposition, elle, ne compte que 125 sièges (USFP, MP, UC-MDS, PPS et PJD). Nul doute que ce cabinet aura le même soutien parlementaire.

Cela dit, une autre observation s’impose: cet exécutif en place depuis octobre 2021 sera-t-il maintenu en l’état, alors que commence un second mi-mandat qui va jusqu’à la fin de la présente législature, dans trente mois, en octobre 2026? La pratique institutionnelle depuis des décennies montre que, généralement, un remaniement ministériel intervient à mi-mandat, indépendamment des changements ou des limogeages en telle ou telle circonstance.

Depuis des mois circule cette idée qu’un réaménagement de l’équipe gouvernementale allait se faire. Il serait lié à un agenda contraignant, celui des congrès de deux partis de la majorité, à savoir le PAM et le PI. Le parti du Tracteur a bien tenu ses assises les 8 et 9 février dernier, avec le départ de son secrétaire général, Me Abdellatif Ouahbi, et l’élection d’une «troïka». Dans l’éventualité d’un remaniement, Me. Ouahbi peut-il être maintenu au ministère de la Justice?

Un tel cas de figure verrait un chef de parti sanctionné par les siens lors d’un congrès continuer à représenter cette même formation durant le second mi-mandat. Depuis octobre 2021, il paraît au surplus s’être distingué par tant de «couacs» médiatiques et politiques portés au passif de son parti et du gouvernement.

Aujourd’hui, il s’échine à expliquer que les réformes prévues dans l’agenda de départ sont finalisées et qu’elles vont être présentées lors de cette session de printemps du Parlement (Code pénal, Code de procédure pénale, Code de procédure civile, etc.), alors que le Code de la famille, dont l’avant-projet a été finalisé par une commission royale ad hoc, est également prévu à l’ordre du jour de la session parlementaire.

 


Quant au parti de l’Istiqlal, il tiendra son 18ème congrès dans une dizaine de jours, du 26 au 28 avril, après un retard de plus de deux ans, le précédent ayant eu lieu en octobre 2017. Là encore, il vaut de s’interroger sur son «traitement» en cas de remaniement ministériel.

Le parti s’est vu attribuer la présidence de la Chambre des conseillers, confiée à Ennaam Mayara, ainsi que quatre départements ministériels.

Membre de cet exécutif, Nizar Baraka a œuvré depuis plus de six ans pour transcender la séquence du mandat de son prédécesseur Hamid Chabat, secrétaire général (2012- 2017) fortement erratique et «populiste», marquée de divisions et de clans. Depuis, un travail a été patiemment entrepris sur le terrain, mais aussi pour mettre en relief des axes mobilisateurs: une direction renouvelée, une unité renforcée, un recentrage des objectifs autour d’un projet social rénové sur la base du référentiel historique de l’égalitarisme, et un programme démocratique alternatif.

Laborieusement, un «deal» a mis un terme à un climat tournant aux dissensions et aux luttes intestines entre le clan du maire de Laâyoune, Hamdi Ould Errachid d’un côté, et celui de Nizar Baraka de l’autre. L’on en aura sans doute une première expression lors de la prochaine désignation des structures organiques du parti à l’issue de ces 18èmes assises.

Nizar Baraka sera ainsi le seul candidat. Reste la représentation de chacune des deux composantes: qui sera nommé Inspecteur général, poste nouvellement créé et qui s’apparente à un rang de «numéro deux»? Qui seront les 34 membres du Comité exécutif, dont la composition en comptait jusqu’à présent dix de moins? Et qu’en est-il du président du Conseil national? Enfin, dans l’éventualité d’un changement de ministres, il faudra bien accorder de la place aux partisans de Hamdi Ould Errachid.


Un mi-mandat finit donc, le second va suivre. Il doit avoir la particularité d’une gestion plus efficiente de l’action gouvernementale. Il faudra en effet accélérer le rythme des réformes qui ont souvent passablement tardé (retraites, codes judiciaires…) ou qui doivent être actées dans les meilleurs délais, telle celle du Code de la famille, dont l’avant-projet a été remis fin mars à SM le Roi.

Il faudra aussi de l’élan et de l’allant, du volontarisme réformateur, des arbitrages et des décisions à assumer et un agenda législatif et gouvernemental à décliner, avec des priorités hiérarchisées et les programmes d’action qui y sont corrélés. Il faudra également faire montre d’une grande capacité à répondre aux attentes et aux aspirations des citoyens. Et concrétiser en même temps des avancées dans un environnement international abrupt, fortement concurrentiel et pratiquement «agressif» à tous égards…

Rédigé par Mustapha Sehimi  sur Le 360


Lundi 22 Avril 2024

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