Indépendance : La présence de la femme dans la lutte contre le colonisateur


Rédigé par le Jeudi 18 Novembre 2021

Elles ont longtemps lutté avec courage et dévouement contre la présence coloniale. Issues des quatre coins du Royaume et de toutes les catégories sociales, les femmes se sont investies, à côté des hommes, afin de défendre et libérer le Royaume.



Lors d’une conférence sur l’impact de la femme marocaine sur le mouvement de libération nationale, Mustapha El Ktiti avait déclaré "La mémoire historique et les parcours de lutte nationale sont marqués d'exemples de diligence, de générosité et de sacrifice dont la femme marocaine avait fait preuve dans la lutte pour l'indépendance".


Il avait aussi rappelé que la femme s’est engagée corps et âme lors de l’épopée de la Révolution du Roi et du Peuple, qu’elle avait participé dans les manifestations, contribuait aux opérations des Fidayines et prenait en charge les blessés.
 

 

L’histoire ne garde que quelques noms de femmes qui ont participé dans le mouvement de libération du Maroc. Mais, ce sont des milliers d’autres qui ont durement travaillé dans l’ombre. "Dans le quartier, nous étions une dizaine de femmes à militer contre le colonisateur, chacune à sa manière. Personnellement, je me souviens que j’étais enceinte des jumeaux lorsque mes trois frères étaient emprisonnés, malgré ma grossesse, j'informais les militants des dates des réunions secrètes. Pour aider mon mari qui était dans la Moukawama, je cachais les armes dans les jarres de viande séchée. Un Français a tenté de fouiller la cuisine et j’ai lutté férocement pour l’empêcher à le faire", selon une déclaration de Rkia, une octogénaire de Fès. 


Elle n’était pas la seule à défendre les constantes de la Nation. Des milliers de femmes ont aussi participé de plusieurs manières à la résistance. Si certaines ont transmis les informations aux militants, d’autres ont distribué les armes, l’eau et la nourriture aux combattants ou assistaient les blessés.


 

A propos de ce sujet, des auteurs marocains mais aussi des étrangers  mentionnent dans leurs ouvrages que plusieurs femmes jouaient  un rôle remarquable lors des nombreuses batailles. D'ailleurs, la chercheuse marocaine Assia Benadada a publié un article sur "Les femmes dans le mouvement nationaliste marocain". Dans ce dernier paru dans la revue "Clio, Femmes, Genre, Histoire", Assia Benadala précise que le militantisme féminin est passé par plusieurs périodes. "En 1913, la France voulant déshériter une femme de la tribu berbère de Zemmour appliquant de ce fait Al orf (le droit coutumier), les femmes de cette tribu se réunirent dans la ville de Khemisset pour protester. Ce fut la première manifestation contre la politique berbère avant qu’elle ne devienne officielle le 16 mai 1930", peut-on lire dans l'article.


Elle poursuit : "La deuxième étape de la lutte anti coloniale est la création d’un mouvement politique à caractère urbain et pacifique qui a commencé dans les années trente…Quelle a été la place des femmes dans ce mouvement ? Les sources sont surtout masculines, les femmes n’ayant laissé aucune trace écrite directe sur elles-mêmes contrairement à certains chefs politiques ... Néanmoins, on sait qu’elles ont participé au mouvement comme le montrent les actions qu’elles ont menées au sein des associations féminines. En 1944, le parti de l’Istiqal crée l’association des femmes indépendantes. En 1947, le parti démocrate de l’Indépendance crée l’association Akhaouat Assafa (Sœur de la pureté). D’autres associations naissent également dans la région du Nord".


Toujours selon la même source, plusieurs femmes comme Aicha Bent Abi Ziane, Mama Al Farkhania, Aicha Al Ouarghalia, Haddhoum Bent Al Hassan ont lutté contre le colonisateur. 


Sans oublier les femmes du Moyen Atlas qui sont également connues par leur militantisme. D’ailleurs, Itto la fille de Moha ou Hammou Azzayani a lutté aux côtés de son père et a poursuivi sa mission même après son décès.


L’histoire raconte ainsi que des femmes du Sud du Royaume ont participé directement aux combats et ont été tuées dans la guerre. Prenons comme exemple le cas d'Aicha El Amrania qui a été assassinée dans la guerre d’Assak en 1916. D’autres femmes ont également participé dans des guerres comme El Hri, Anoual, Boughafer.


Outre la participation directe dans les batailles, les femmes villageoises avaient également un rôle très important dans la lutte contre le colonisateur et contre les traîtres aussi.


 

Selon Bouchaib Radif, chercheur en communication politique.  "Les femmes marocaines ont joué un rôle primordial durant la période coloniale. Par exemple dans les villages de l’atlas, les femmes marquaient les traîtres et les hommes qui fuyaient les combats avec du henné pour les humilier et les marginaliser. Elles leur interdisaient même de s’approvisionner en eau des puits".


"Certaines femmes demandaient même le divorce si leur mari refuse de participer au combat. D’autres femmes jetaient des pierres ou de l’eau bouillante sur les agents de police étrangers sans oublier les messages codés transmis dans les chansons de l’Aita comme la fameuse chanson (libgha Habibou yemchi yjibou) le Habib dans cette chanson n’est autre que Feu SM le Roi Mohammed V", a expliqué le même chercheur. 


Plusieurs noms sont gravés en lettres d’or dans l’histoire du militantisme national. A savoir Malika El Fassi, l’unique femme signataire du manifeste de l’indépendance, Fatima Zahra Bent Moulay Hassan El Belghiti, première femme martyre assassinée lors de la manifestation du Mchouar à Marrakech, sans oublier Touria Sekkat et Zhor Zerka, deux femmes qui se sont mobilisées pour la sensibilisation des femmes et Fatima Benslimane qui a mobilisé les femmes à sortir dans les rues et à lire le Latif en signe de protestation contre le Dahir Berbère…


Il reste à noter que plusieurs mouvements féminins se sont constitués dans le but d’éduquer, sensibiliser et améliorer la situation des filles et des femmes qui ont joué par la suite un rôle primordial pour le développement du Royaume Marocain.




Journaliste sportive et militante féministe, lauréate de l'ISIC En savoir plus sur cet auteur
Jeudi 18 Novembre 2021
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