L’intelligence artificielle va-t-elle nous voler nos emplois ou nous en offrir de meilleurs ?


Rédigé par La rédaction le Dimanche 20 Juillet 2025

L’IA va-t-elle détruire ou créer des emplois ? Le dernier rapport du Forum économique mondial pose les vrais enjeux de l’emploi à l’horizon 2030.



Alors que l’intelligence artificielle (IA) continue de redessiner les contours de notre quotidien, le monde du travail s’apprête à vivre une secousse sans précédent. C’est du moins ce que révèle le dernier rapport du Forum économique mondial sur l’avenir de l’emploi. Fondé sur les données de plus de 1 000 grandes entreprises internationales, ce document trace les lignes d’un futur à la fois porteur et inquiétant : 92 millions d’emplois devraient disparaître d’ici 2030, mais 170 millions pourraient être créés dans des secteurs liés à la technologie.

​Une révolution numérique qui n’épargne aucun secteur

Le rapport, qui s’appuie sur des entreprises représentant 14 millions de salariés dans 22 industries réparties sur 55 pays, ne laisse guère de doute : les mutations du marché du travail sont déjà en marche. Depuis la pandémie de COVID-19, les dynamiques du travail ont été profondément bouleversées, amplifiées par des crises politiques, une inflation persistante et une pression technologique constante.

Aujourd’hui, la transformation numérique accélère le rythme : 60 % des dirigeants d’entreprise interrogés estiment que les nouvelles technologies transformeront radicalement leur activité avant 2030. Pour le monde du travail, l’enjeu est simple mais colossal : s’adapter ou disparaître.

Qui sont les grands perdants de l’automatisation ?

Le rapport met en évidence les fonctions les plus vulnérables face à l'automatisation croissante, soulignant une tendance inquiétante à la disparition de certains métiers

En première ligne figurent les saisisseurs de données, dont les tâches répétitives sont désormais facilement prises en charge par des algorithmes. Viennent ensuite les secrétaires traditionnelles, progressivement remplacées par des outils de gestion numérique plus performants. Les analystes financiers de premier niveau sont également menacés, l’intelligence artificielle étant désormais capable d’effectuer des analyses préliminaires à grande vitesse. Enfin, les agents des centres d’appel voient leur rôle s’éroder face à l’essor des assistants vocaux intelligents, capables de traiter une large gamme de requêtes sans intervention humaine.

Des métiers aujourd’hui encore largement occupés dans des économies comme celle du Maroc, souvent caractérisées par une forte dépendance au travail administratif et aux services externalisés. La tendance est claire : tout emploi répétitif, faiblement qualifié, ou facilement automatisable sera remplacé à court ou moyen terme.

C’est un changement de paradigme qui s’annonce, et qui pose une question fondamentale : que fait-on de tous ceux qui ne sont pas formés pour surfer sur cette vague numérique ?

​L’intelligence artificielle, grande pourvoyeuse d’emplois ?

Mais le rapport du Forum économique mondial n’est pas totalement pessimiste. Si 92 millions d’emplois doivent disparaître, 170 millions devraient voir le jour. Et pas dans n’importe quels domaines.

En tête de liste des métiers les plus recherchés, figurent les spécialistes en intelligence artificielle, les analystes de données, les développeurs de logiciels et les experts en cybersécurité.

L’IA, souvent accusée d’être une menace pour l’emploi, apparaît ici comme un levier de création massive de valeur. Mais à une condition : que les travailleurs soient formés aux nouvelles compétences exigées par cette révolution.

Il ne suffira plus de maîtriser un logiciel bureautique. Les emplois du futur nécessiteront un haut niveau d’expertise technologique, une compréhension fine de la data et une culture numérique avancée. Autrement dit, il faudra apprendre à collaborer avec la machine plutôt qu’à la fuir.

​Le Maroc face à l’équation de la reconversion

Pour les pays comme le Maroc, ces conclusions posent un immense défi. Si la numérisation de l’économie avance, elle reste très inégale selon les territoires, les secteurs, et les catégories sociales.

La majorité de la population active occupe encore des postes peu qualifiés, dans le commerce informel, l’agriculture, ou l’administration. Ces catégories risquent d’être particulièrement exposées aux vagues d’automatisation sans bénéficier de la dynamique de création d’emplois qualifiés.

Pire encore : les inégalités d’accès à la formation continue, à l’équipement technologique et à la reconversion professionnelle pourraient creuser davantage la fracture numérique, et transformer cette transition en crise sociale si elle est mal gérée.

Cybersécurité, data et IA : les compétences qui valent de l’or

Le rapport insiste sur un point fondamental : l’l’avenir appartient aux compétences numériques. Dans un environnement professionnel en mutation rapide, la maîtrise des outils bureautiques traditionnels ne suffit plus. Il devient essentiel de comprendre les logiques de l’intelligence artificielle, de savoir manipuler des volumes massifs de données (big data), d’anticiper les risques liés à la cybersécurité et de maîtriser certains langages de programmation ou de modélisation. 

En somme, l’analphabétisme de demain ne sera plus celui qui ne sait pas lire, mais celui qui ne sait pas coder, traiter ou sécuriser des données.

Ce changement de référentiel implique une transformation en profondeur du système éducatif, mais aussi une réorientation des politiques publiques vers la formation continue et l’inclusion numérique.

​Est-ce que tous les métiers vont devenir technologiques ?

Une question, soulevée à la fin du rapport, mérite d’être posée : le futur du travail sera-t-il entièrement technologique ? Est-il réaliste de croire que toutes les fonctions humaines, des métiers manuels à ceux des arts, devront passer par le filtre de l’IA ?

La réponse est sans doute plus nuancée. Si l’IA va dominer les tâches analytiques, répétitives ou prévisibles, les compétences humaines telles que la créativité, l’empathie, le leadership ou la pensée critique resteront irremplaçables. Le travail de demain sera donc hybride, mêlant haute technologie et haute humanité.

​La responsabilité des États et des entreprises

Face à ces bouleversements, les États et les grandes entreprises portent une responsabilité majeure. Il ne s’agit plus seulement d’adopter la technologie, mais d’accompagner les populations dans cette transition. Cela implique la mise en place de politiques publiques de reconversion professionnelle, le soutien à la formation continue, l’intégration des jeunes dans les filières technologiques et la protection sociale des métiers fragilisés. Une transformation inclusive suppose en effet d’investir autant dans les compétences humaines que dans l’innovation technique.

Sans une réponse rapide, structurée et équitable, cette révolution du travail pourrait devenir un facteur d’instabilité économique, sociale et politique, notamment dans les pays en développement.

​Le mot de la fin : une opportunité à saisir ou une menace à dompter ?

Le futur de l’emploi s’écrit sous nos yeux. Mais il n’est pas encore écrit dans le marbre. Ce que nous en ferons dépendra des choix collectifs que nous poserons dès aujourd’hui.

L’intelligence artificielle peut être un accélérateur d’exclusion ou un levier de progrès, selon qu’elle est subie ou maîtrisée. Elle peut broyer les travailleurs ou leur offrir des perspectives inédites.

À l’heure où les cartes du monde du travail sont rebattues, il est urgent de poser les bonnes questions : comment former les citoyens de demain ? Comment réconcilier progrès technologique et justice sociale ? Et surtout, comment remettre l’humain au cœur de cette nouvelle économie ?

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Dimanche 20 Juillet 2025
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