La Botola en quête d’avenir : s’inspirer du modèle saoudien ?


Rédigé par Hajar DEHANE le Mardi 2 Septembre 2025

Le Maroc, fraîchement titré à Nairobi lors du CHAN, est désormais considéré comme favori à chaque entrée en lice sur le plan continental. Pourtant, une question persiste : qu’en est-il réellement de son championnat national ? Le Wydad ou encore le Raja sont connus à travers le monde, mais pas forcément pour les raisons que l’on aimerait mettre en avant. Beaucoup, sans oser l’avouer, connaissent ces clubs grâce à leurs ultras, leurs tifos ou leurs chants, bien plus que pour leur niveau de jeu. Footballistiquement parlant, il faut bien appeler un chat un chat. La passion est là, indéniable, mais elle masque trop souvent les carences structurelles d’un championnat qui peine encore à s’imposer comme un produit sportif crédible.



Par El Hassane Kamal, journaliste stagiaire à LODJ Média

Pendant ce temps, en Arabie saoudite, un projet prend forme avec une rigueur qui force le respect. Autrefois considérée comme une ligue de retraite dorée, la Saudi Pro League est devenue une vitrine d’ambition mondiale. Le pays a frappé un grand coup avec des transferts retentissants, Cristiano Ronaldo en éclaireur, suivi par Benzema, Neymar et d’autres stars.

Mais surtout, il a su évoluer. Après la phase des coups médiatiques, Riyad a enclenché une deuxième étape, celle de la structuration, avec des investissements massifs dans la jeunesse, des méthodes de travail importées d’Europe et une professionnalisation des clubs transformés en véritables institutions économiques. Le succès récent d’Al-Hilal à la Coupe du Monde des clubs, capable de rivaliser et même de battre un géant européen, en est la meilleure preuve.

Le Maroc n’a pas les ressources pétrolières du Golfe, mais il partage avec l’Arabie saoudite une même ambition : utiliser le football comme levier d’influence et comme moteur de développement. Le pays dispose déjà d’atouts considérables. Ses infrastructures sont modernes, ses stades conformes aux standards internationaux, et sa passion populaire fait partie des plus intenses au monde. La sélection nationale, de son côté, a offert des résultats qui témoignent d’un potentiel réel : une demi-finale de Coupe du Monde en 2022, une régularité dans les compétitions africaines et une visibilité mondiale accrue.

Mais ces réussites reposent davantage sur le travail de la fédération et de l’équipe nationale que sur le championnat lui-même. La Botola, malgré ses ambiances uniques et l’aura de ses clubs historiques, reste encore marquée par des failles structurelles qui l’empêchent de suivre le rythme de cette dynamique. Le championnat marocain reste marqué par un paradoxe. D’un côté, un vivier de talents, une base de supporters inégalée, une visibilité internationale croissante.

De l’autre, une gestion financière fragile, des clubs souvent endettés, un arbitrage contesté et des droits télévisés largement sous-exploités. Le contraste entre le rayonnement de la sélection et la faiblesse du championnat est flagrant.

C’est ici que le modèle saoudien peut servir d’inspiration, non pas pour copier ses moyens financiers, inaccessibles, mais pour s’approprier ses méthodes. Le Maroc doit engager une véritable transformation de ses clubs en sociétés sportives, capables d’attirer des sponsors et de générer des revenus de manière autonome. Il doit étendre le modèle de l’Académie Mohammed VI à l’ensemble de la Botola pour garantir un flux continu de jeunes talents capables d’élever le niveau de jeu local.

Il doit surtout apprendre à mieux vendre son produit, à le mettre en valeur à travers une diffusion télévisuelle modernisée, une mise en scène des matchs plus attractive et un marketing digne de la passion qui existe déjà dans ses tribunes.

Avec la CAN 2025 et surtout la Coupe du Monde 2030, le Maroc n’a plus le temps d’attendre. Ces événements offriront une vitrine mondiale sans précédent, mais aussi une épreuve de vérité. Le royaume a prouvé sa capacité à organiser, à construire et à faire rêver.

Désormais, il doit montrer qu’il est capable de donner à sa Botola l’envergure qu’elle mérite. L’Arabie saoudite a choisi d’acheter du temps en investissant massivement et en attirant les regards par le haut de l’affiche. Le Maroc, lui, a la possibilité de bâtir de manière plus organique, en misant sur sa jeunesse, son savoir-faire en matière de formation et son ancrage populaire.

La passion existe, l’ambition est claire, les infrastructures sont prêtes. Reste à franchir le pas de la professionnalisation et à transformer la Botola en un championnat compétitif et attractif. Car au moment où l’histoire retiendra les Mondiaux 2030 et 2034, ce ne seront pas seulement les sélections nationales que l’on évoquera, mais aussi les championnats qui auront servi de socle à ces épopées. Le Maroc peut choisir d’être spectateur de cette évolution, ou bien d’écrire son propre chapitre en s’inspirant, avec intelligence, de ce que l’Arabie saoudite a déjà commencé à réaliser.

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Mardi 2 Septembre 2025
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