La Russie coupe la ligne: fin programmée de WhatsApp, cap sur «Max»


Rédigé par le Mardi 30 Décembre 2025

Moscou engage un retrait graduel de WhatsApp, remplacé par l’application locale «Max», dans le cadre d’un durcissement du contrôle du cyberespace. Entre arguments sécuritaires, critiques sur la protection des données et usage des VPN, ce virage interroge l’avenir de l’internet russe.



La Russie s’apprête à resserrer davantage son emprise sur l’espace numérique en interdisant progressivement WhatsApp et en le remplaçant par une application domestique baptisée «Max», dans la continuité de décisions antérieures visant des plateformes occidentales majeures.

Ce basculement soulève de nombreuses questions sur les objectifs de Moscou et les effets d’un tel mouvement pour les utilisateurs comme pour le futur de l’internet russe. WhatsApp, application la plus populaire au monde, rejoint la liste des services occidentaux bannis en Russie, une mesure que les autorités présentent comme une réponse à ce qu’elles décrivent comme l’usage d’outils numériques par l’Occident pour attaquer le pays, à l’intérieur comme à l’extérieur.

Depuis août dernier, les appels audio et vidéo via WhatsApp ont été graduellement interrompus, prélude à une interdiction totale invoquant des motifs de sécurité. Le député de la Douma, Nikolai Novitchkov, défend la décision en affirmant que le maintien de WhatsApp permettrait aux services de renseignement ukrainiens et à des organisations qualifiées de «terroristes» ou «extrémistes» d’accéder aux données des citoyens russes. Il estime par ailleurs que l’ampleur des crimes commis via l’application est préoccupante, avec des dommages évalués à des milliards de roubles.

«Max», alternative locale: chiffrement validé par les services, données liées aux numéros et débat sur la vie privée

En parallèle, Moscou renforce sa «souveraineté numérique» en lançant «Max» comme substitut national à WhatsApp. L’application a connu une adoption rapide, attribuée à son installation obligatoire depuis septembre et à une vaste campagne de promotion officielle.

Toutefois, Sarkis Darbinian, expert et directeur du Centre des droits numériques, critique la solution: selon lui, «Max» offre une protection de la vie privée moindre que WhatsApp. Le nouveau service recourt à un chiffrement approuvé par le service de sécurité russe et conserve les données des utilisateurs en les reliant directement à leurs numéros de téléphone, alimentant les préoccupations sur la surveillance et la confidentialité.

La société russe se montre partagée: certains refusent d’abandonner WhatsApp, d’autres se disent prêts à adopter «Max» par pragmatisme, quand une partie a déjà migré, portée par l’effet d’entraînement de leurs proches. En miroir, beaucoup continuent d’accéder à WhatsApp via des réseaux privés virtuels, malgré l’entrée en vigueur du blocage, mais cette échappatoire s’amenuise à mesure que les autorités annoncent des poursuites contre les utilisateurs de VPN, assorties de sanctions et d’amendes.

Pour des observateurs, cette trajectoire consacre un paysage numérique plus fermé, rapprochant la Russie du modèle chinois de contrôle du web. Le bannissement de WhatsApp apparaît ainsi comme une décision politico‑sécuritaire visant à réduire l’influence des entreprises étrangères, dont le succès dépendra toutefois de la capacité de l’application de remplacement à gagner la confiance de millions d’utilisateurs.




Mardi 30 Décembre 2025
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