La pensée critique : Le caractère incontournable du soft skill !


Rédigé par Aya Azaddou le Lundi 27 Juin 2022

Lors de la 50ème édition du Forum économique mondial, tenue début 2020 à Davos, le rapport « Futur of jobs » a proposé une liste de dix soft skills essentielles pour l’emploi de demain. En tête de cette liste, on trouve : 1. la résolution des problèmes complexes ; 2. la pensée critique ; 3. la créativité.
Parmi les soft skills de ce podium, la pensée critique est peut-être la plus intrigante. Qu’est-ce que cela veut dire que d’avoir une pensée critique ? En quoi est-ce utile ? Et peut-on réellement attendre des salariés qu’ils soient « critiques », alors qu’ils sont dans un nécessaire rapport de subordination par rapport à leur employeur ?



Qu’est-ce que la « pensée critique » ?

Désambiguïsation du terme « critique »

Il faut en premier lieu être au clair sur ce que signifie le mot « critique ». Dans le langage courant, le terme a pris une tournure péjorative et « critiquer » désigne communément l’émission d’un jugement négatif à propos de quelque chose ou de quelqu’un. Il ne s’agit pourtant là que d’un sens très particulier du terme.

À l’origine, « critique » vient du grec ancien kritikos, un adjectif qui qualifie une personne « capable de discernement et de jugement », lui-même issu du verbe krinein : « séparer », « choisir »,  « décider », « passer au tamis ».

La critique relève donc avant tout du tri des idées, de l’organisation des pensées. Lorsque l’on parle de « pensée critique » dans le monde du travail, il n’est donc pas question d’immodérément tout déprécier et contester. Il s’agit plutôt d’une manière de considérer les choses, en prenant du recul, en questionnant les choses, afin de cerner d’éventuels problèmes, ordonner ses pensées à leurs sujets et tirer les conclusions qui permettront d’avancer vers une résolution. Bien au contraire du sens courant, il s’agit donc d’être constructif et d’aller dans le sens du bien commun.

La différence entre « pensée critique » et « esprit critique »

Le psychologue Jacques Boisvert propose de distinguer « pensée critique » et « esprit critique ».
Selon lui, l’esprit critique relève d’une certaine posture intellectuelle, d’un certain état d’esprit à adopter, d’une certaine attitude. La pensée critique est quant à elle la réunion de cette attitude (l’esprit critique) et d’un ensemble de capacités qui permettent de mener la critique correctement.

En clair : pensée critique = esprit critique (attitude) + capacités à être critique

À cette équation, on pourrait encore ajouter les connaissances sur un sujet donné. Difficile en effet d’être critique sur un sujet que l’on ne maîtrise pas : si on vous affirme que la téléportation est désormais rendue possible grâce à la physique quantique, des connaissances en physique quantique sont indispensables pour vérifier l’information et exercer sa pensée critique. L’omniscience étant impossible, il est bien sûr possible et souhaitable d’alors recourir à un tiers spécialiste. Néanmoins, un telle démarche complexifie le processus et peut être un frein à la pensée critique.

Quels sont les intérêts de développer la pensée critique ?

Savoir mener une pensée critique présente de nombreux bénéfices, utiles à la fois dans la vie professionnelle et dans la vie personnelle.

Lutter contre les rumeurs infondées, les fake news et les fausses croyances
La pensée critique se fonde en premier lieu sur le doute et le questionnement (dixit Socrate ; ndlr). Or interroger les choses nous amène à rechercher des réponses. Pour que la recherche soit fructueuse, il est nécessaire de vérifier les sources et le bien-fondé des propos que l’on entend ou des faits que l’on constate. Il s’agit alors de se mettre en quête de preuves pour fonder un jugement solide, que l’on pourra ensuite aisément argumenter et soutenir. Alors qu’Internet nous fournit désormais une surabondance d’informations et que le phénomène des fake news a pris une ampleur inquiétante, être capable de discernement et de séparer le vrai du faux apparaît comme une compétence indispensable.

Se construire un avis propre
Suivre une telle démarche amène nécessairement à se construire un avis propre, argumenté et solide, et à ne pas juste répéter ce que l’on a lu ou entendu. D’une part, cela permet de nous préserver du conformisme et d’entrer véritablement dans le débat d’idées ; d’autre part cela nous préserve de la manipulation, voire de l’endoctrinement et du dogmatisme dont les conséquences peuvent être graves.

De manière plus professionnelle, se forger un avis propre permet de mieux manipuler les savoirs et les données. À l’ère de la big data et des statistiques, une progression mensuelle de 100 % d’un indicateur peut sembler être une bonne chose, mais si la valeur de référence de cet indicateur est faible, il n’y a peut-être pas raison de se réjouir démesurément. Si l’on considère par exemple le nombre de visite sur une page internet : une hausse de 100 % s’interprète différemment si l’on parle de +100 % par rapport à 4000 visites ou par rapport à 4 visites.

Favoriser l’innovation et la créativité
En favorisant le doute et le questionnement des acquis, la pensée critique cherche sans cesse à sonder s’il n’existe pas une autre explication, une meilleure voie, souvent insoupçonnée. Une telle démarche mobilise alors une certaine flexibilité cognitive au service de l’innovation, de l’évolution et de la transformation. La créativité n’est alors pas très loin, d’autant plus si la pensée critique porte sur une chose établie et que l’on ne pense pas spontanément à remettre en cause.

​Une astuce de zététique pour finir

La zététique (du grec ancien zêtêtikós, « qui cherche, qui enquête ») est une attitude qui consiste à chercher la vérité avec autrui par la confrontation des points de vue. Remise récemment au goût du jour comme un art du doute, elle est un moyen pour la réflexion et l’enquête critique.

Un bon moyen de cultiver sa pensée critique, selon les zététiciens, est de considérer que chaque jour est un premier avril et d’ainsi tout appréhender avec le même doute et le même scepticisme que si l’on s’attendait à un canular. Par exemple : êtes-vous sûrs que le mot « zététique » existe ?

Source: le blog Mood Work, https://moodwork.com/blog/well-being/pensee-critique/
Article repris par la Fondation Tamkine, #Tamkine_ensemble_nous_reussirons
 
 
 




Lundi 27 Juin 2022
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