La violence scolaire au Maroc : un regard sur la réalité actuelle


Rédigé par le Vendredi 8 Septembre 2023

La rentrée scolaire est arrivée, un moment très attendu avec impatience par certains élèves qui sont ravis de retrouver leurs camarades, mais redouté par d'autres qui peuvent parfois se retrouver dans un environnement peu accueillant.



Tout comme de nombreuses nations à travers le globe, le Maroc fait face à un problème inquiétant, à savoir la violence au sein des établissements scolaires. Une étude récente menée conjointement par le Conseil supérieur de l'éducation, de la formation et de la recherche scientifique (CSEFRS) en collaboration avec le Fonds des Nations unies pour l'enfance (UNICEF) a révélé des données préoccupantes concernant cette situation.

Conduite dans 260 écoles marocaines avec la participation de 13 884 élèves, l'étude révèle que les violences verbales, telles que les surnoms méchants, les taquineries et les insultes, sont couramment pratiquées et acceptées au sein des établissements scolaires du pays. Plus en détail, près d'un tiers des élèves du primaire ont rapporté avoir été affublés de surnoms méchants ou dégradants, tandis que 55,9 % des élèves du secondaire, principalement des garçons, ont indiqué subir des taquineries à divers niveaux.

Les garçons plus touchés par la violence physique

Par ailleurs, cette étude souligne également la présence de violences physiques au sein des écoles. En effet, 25,2 % des élèves en écoles primaires ont déclaré avoir subi des coups, tandis que 28,5 % ont été poussés, et au niveau secondaire, 25,3 % des étudiants ont affirmé avoir été victimes de coups, tandis que 37,4 % ont été poussés dans le but de leur nuire. Il convient de noter que les garçons sont plus fréquemment confrontés à des actes de violence physique que les filles.

De plus, il est à noter que certains élèves sont victimes de violences liées à l'appropriation, telles que des vols simples, des vols avec extorsion et des dommages causés à leurs biens personnels. Selon les résultats de l'enquête, ces formes de violence sont assez courantes, touchant respectivement 27,1 % et 38,6 % des élèves du primaire et du secondaire. Les vols avec extorsion et les dommages aux biens personnels affectent les élèves, qu'ils soient filles ou garçons, à des taux similaires. De plus, 61,7 % des collégiens et 70,3 % des lycéens déclarent avoir été témoins d'actes de vandalisme perpétrés par des élèves sur le matériel scolaire.

En plus de ces diverses formes de violence, le harcèlement est largement répandu au sein des établissements scolaires. Environ 15,2 % des élèves en écoles primaires et 29,7 % des élèves en écoles secondaires ont rapporté avoir été victimes de harcèlement dans leur établissement, parmi lesquels respectivement 34 % et 25,4 % ont précisé avoir subi un harcèlement à caractère sexuel. De plus, l'étude indique que les élèves fréquentant des établissements privés et vivant en milieu urbain sont plus enclins à signaler des cas de harcèlement sexuel que ceux qui fréquentent des établissements publics en milieu rural

Quid des auteurs de ces actes ?

En ce qui concerne les responsables de la violence en milieu scolaire, l'étude révèle que, au niveau primaire, les garçons sont les principaux auteurs, et elle mentionne que les enseignants peuvent également être impliqués. Quant au secondaire, ce sont principalement les élèves qui se rendent coupables de violences verbales et symboliques, suivis par les enseignants, les intrus, les groupes de jeunes extérieurs à l'établissement, le personnel et, dans une moindre mesure, les parents, d'après les conclusions de la même étude.

Les facteurs liés à la violence chez les enfants peuvent être classés en trois catégories : ceux liés à l'individu, à la famille et à l'environnement. Le nombre de facteurs auxquels un enfant est exposé est proportionnel au risque qu'il développe des comportements violents. De nombreux élèves optent pour la violence comme moyen de résoudre leurs conflits à l'école et à la maison, plutôt que de recourir à des méthodes plus pacifiques.

Il existe des variations dans les comportements, et les explications ne sont pas uniformes pour tous les enfants. Pour certains, l'acte violent peut être interprété comme un symptôme visant à masquer un sentiment de vide intérieur, une grande difficulté à gérer les frustrations résultant de la relation avec l'autorité. Dans ce cas, la violence verbale peut découler de l'incapacité à faire face à ce vide intérieur et servir de compensation pour éviter un effondrement émotionnel. En outre, certains experts considèrent ces actes de violence comme un manque de compétences dans la communication interne et une difficulté à exprimer leurs émotions. Bien que la violence à l'école nécessite une approche éducative et sociale impliquant tous les acteurs de l'institution, il est essentiel de les aborder de manière holistique, en prenant en compte l'ensemble des acteurs, des victimes et du contexte, plutôt que de se concentrer uniquement sur le point de vue des victimes.

Santé mentale … S.O.S !

La violence à l'école peut parfois entraîner des traumatismes graves chez les victimes. Les enfants exposés à de tels actes risquent de rencontrer des difficultés pour établir des relations saines avec leurs pairs, ce qui peut perturber leur développement émotionnel et social.

Ces comportements incivils peuvent entraîner des conséquences significatives à la fois pour les individus et la collectivité. Cela peut se traduire par des sentiments de peur, d'abandon, de désespoir et d'isolement, en particulier chez de jeunes enfants souvent timides et incapables de se défendre. Les victimes peuvent également développer des problèmes tels que la dépression, l'anxiété, des perturbations du sommeil ou du métabolisme, et parfois des troubles du comportement. À long terme, cela peut compromettre leur épanouissement personnel et rendre la socialisation difficile pour les victimes.

Le parcours scolaire en péril

Outre leurs impacts sur la santé mentale des enfants, ces actes de violence peuvent aussi avoir des conséquences significatives sur la trajectoire scolaire des victimes. Qu'il s'agisse de violence verbale ou physique, elle peut inciter l'élève à s'absenter, voire à abandonner ses études.

Il est à souligner qu'en s'efforçant de lutter contre ce problème, le Maroc a adhéré à la déclaration de Campeche contre la violence et le harcèlement à l'école, y compris la cyberintimidation, en novembre 2021. Cette déclaration vise à encourager la mise en place de mécanismes de prévention visant à sensibiliser rapidement la population scolaire qui est confrontée à, ou témoin de, des actes de harcèlement.


Salma LABTAR




Journaliste sportive et militante féministe, lauréate de l'ISIC En savoir plus sur cet auteur
Vendredi 8 Septembre 2023
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